Le musée Jean-Lurçat et de la tapisserie contemporaine présente un ensemble de plus de cinquante œuvres, tapisseries et cartons d’une trentaine d’artistes, représentatifs de la tapisserie catalane contemporaine. Construite en partenariat avec le musée du cloître de Sant Cugat et l’historien d’art Francesc Mirallés, l’exposition a été présentée en 2009 au musée de Sant Cugat puis au Centre Culturel Caixa de Terrassa, en Catalogne. Pour cette exposition, des prêts ont été consentis auprès d’institutions prestigieuses comme le musée Picasso de Barcelone, le gouvernement de Catalogne, la fondation Maeght à Saint-Paul-de-Vence.
Joan Miró, Tapisserie (tissée par Josep Royo), 1980, 270 x 480 cm, Fondation Maeght, St Paul de Vence. © Succession Joan Miró, Adagp Paris 2011, photo C. Germain, Coll.artiste Une école est née
C’est à Sant Cugat, dans la Manufacture Aymat que naît en 1955, sous l’impulsion de Miquel Samaranch, son directeur, l’Ecole catalane de tapisserie. Il demande au jeune artiste Grau-Garriga de diriger l’atelier expérimental. Celui-ci fera le voyage en France pour rencontrer Jean Lurçat (dont le chef-d’œuvre, Le chant du monde, est exposé à Angers). De retour à Sant Cugat, il fait venir de Madrid de jeunes liciers qu’il formera et qui tisseront les artistes de sa génération comme Ràfols Casamada, Tàpies ou Guinovart, ainsi que leurs admirables aînés, Pablo Picasso ou Joan Miró. Il favorise aussi l’émergence de liciers-créateurs catalans formés dans son atelier, qui s’inscrivent dans le mouvement de la Nouvelle tapisserie.
Le poids de la Guerre civile
La majorité des artistes sélectionnés pour l’exposition sont nés entre 1920 et 1930. Il s’agit de la génération qui a subi la terrible Guerre civile pendant l’enfance. De ces années sombres, et de celles du franquisme qui suivirent, est issue une création particulière empreinte de violence, d’ombre et de lumière, de dépression et d’espoir. Ainsi est née l’idée du titre de l’exposition : «De l’ombre à la lumière...» Parmi ces créateurs, Grau-Garriga occupe une place particulière. Après ses premières expositions à Angers en 1989, il s’installe en Anjou. L’artiste y a tissé des liens étroits avec le musée Jean-Lurçat et de la tapisserie contemporaine, qui présente de façon permanente son travail des dix dernières années. Josep Royo et Carles Delclaux ont également favorisé l’essor de l’atelier Aymat et son rayonnement international : le premier s’engage dans une longue collaboration avec Miró qui fera date dans le domaine du textile et ouvrira une voie tout à fait nouvelle dans l’art de la tapisserie. Le second assure, à la suite de Grau-Garriga et Royo, la continuité de la manufacture Aymat-Samaranch en créant un centre-école à Gérone.
Teresa Codina, Núvol en l’aire cel (Nuage dans le ciel), 1973, 69 x 98 cm, Gouvernement de Catalogne. Droits réservés Expérimenter d’autres matières…
Parallèlement à ce renouveau, un ensemble d’artistes indépendants catalans explorent de nouveaux matériaux (jute, corde, chanvre mais aussi plastique, métal, etc.) et cherchent à s’affranchir des limites bidimensionnelles. Pour Francesc Mirallés, la notion d’Ecole catalane s’applique aussi à ce courant hétérodoxe, dont deux des principales représentantes, Aurèlia Muñoz et Maria Teresa Codina, pionnières du mouvement de l’art souple, du «Fiber Art», vont représenter la Catalogne aux Biennales de la tapisserie de Lausanne de 1965 et 1967, aux côtés de Grau-Garriga. À leur suite, d’autres artistes talentueuses, comme Mariona Sanahuja, Lluïsa Ramos, Teresa Lanceta ou Marga Ximènez vont s’inscrire dans ce courant de la Nouvelle Tapisserie qui explore le volume et les matériaux.
PUBLICATION :
• Catalogue en catalan : textes de Francesc Mirallés, Roser Sanjuan
• Fascicule en français : traduction du texte de Mirallés, texte de Françoise de Loisy, entretien avec Josep Grau-Garriga, 143 pages, 25 €
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