Cet été le Lieu d'art contemporain la Halle accueille Perrine Lacroix et Lucja Ramotowski-Brunet pour une exposition en duo intitulée La bonne aventure. Leur intérêt commun pour le paysage a été l'occasion d'une invitation en résidence, et à la réalisation d'un travail spécifique lié au territoire. Leur perception du paysage et les processus de création des deux artistes sont pourtant opposés.
Lucja Ramotowski-Brunet, photographe, travaille par série. Elle présente une série de "figures humaines" où les modèles jouent des compositions selon les règles qu'elle établit. La nature sert de décor à ses fictions : "une rhétorique des gestes induit un suspens : l'action semble arrêtée, comme si toute image était un vidéogramme" écrit Marie de Brugerolle. Ce contraste crée un trouble. Une violence sourde apparaît malgré la perception panthéiste de la forêt et des rivières : la menace originelle et intrinsèque de l'homme pour l'homme. Le jeu la révèle, la mime pour mieux la dépasser et pour lui donner une existence possible, à l'état symbolique.
Pour Lucja Ramotowski-Brunet, la photographie est une finalité, le paysage un accessoire, un attribut symbolique, alors que pour Perrine Lacroix, ce sont deux points de départ qui servent le processus. Chez elle la construction est omniprésente quelque soit le médium utilisé, à travers le choix des lieux, des matériaux, des objets, du vocabulaire. Son travail change les échelles, ruine les points d'appui, le grand devient le petit et inversement, pour mieux provoquer le vertige. Elle créé ainsi des espaces in situ, des interventions ; elle provoque des distances et des rapprochements simultanés, un effet miroir comme au théâtre. "Par une stratégie de déplacement et de détournement d'objets usuels, Perrine Lacroix évoque un état transitoire et suspendu dans le temps où les terrains vagues deviennent la métaphore de cette indétermination entre passé inachevé et avenir incertain." Audrey Illouz.
Le temps de la résidence, les deux artistes ont mis en place un protocole de travail dans les environs de la Vernaison et de la Bourne (rivières), les flux conducteurs des paysages traversés.
Lucja, accompagnée par deux modèles (Etienne et Emmanuel), compose des saynètes. Ils sont jumeaux et le jeu met en tension les corps, entre eux et avec le paysage-décor.
Perrine documente et rend visible le processus de création, tout en permutant les rôles, le décor revient à sa nature : environnement, espace, matière.
La bonne aventure révèle le plaisir de l'exploration. L'exposition est le prolongement de cette aventure, elle présente les oeuvres issues de cette collaboration ainsi que des oeuvres plus anciennes, celles qui ont incité au rapprochement.
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