Songes de femmes permet de redécouvrir l'univers feutré et chargé de poésie du peintre symboliste, puis intimiste, Aman-Jean. Une cinquantaine d'œuvres - peintures, pastels, sculptures - provenant de collections publiques et privées, européennes et américaines, consacrées à son thème de prédilection, la femme, sont réunies.
Après l'exposition Le Sidaner, le musée de la Chartreuse poursuit son cycle sur les artistes du tournant du 19e siècle. C'est la première manifestation consacrée à Aman-Jean depuis celle du musée des Arts décoratifs en 1970. Elle permet d'admirer son œuvre à la palette nuancée, témoignage d'une époque raffinée.
Ce sont bien des rêves de femmes, plutôt que les femmes elles-mêmes, qui sont évoqués ici, et ces femmes rêvées incarnent, derrière le voile pudique de l'étoffe, des cheveux et de la carnation, le cheminement secret et sans cesse changeant d'un artiste qui s'interroge.
Ami de Seurat et de Verlaine
Arman-Jean entre en 1878 à l'école des Beaux-Arts, où il se lie d'amitié avec Seurat. Ils vont partager atelier et modèles. Tous deux se passionnent pour les théories chromatiques de Chevreul, découvrent Puvis de Chavannes et participent à la mise au carreau du Bois Sacré. Un voyage en Italie les fait s'enthousiasmer pour les primitifs italiens. Ami de Verlaine, dont il fait un portrait en 1892, Aman-Jean fréquente les milieux littéraires symbolistes, côtoie Mallarmé et Huysmans. Alors que Seurat se tourne définitivement vers le divisionnisme, il s'oriente vers un synthétisme plus atténué.
Cette même année 1892 , il épouse Thadée Jacquet qui lui inspire ses plus beaux portraits et expose des toiles intimistes qui lui valent les faveurs de la critique. Invité de tous les Salons, il est considéré comme l'un des meilleurs portraitistes de son époque. Il réalise également de nombreuses décorations. La plus importante, Les Éléments, est commandée par l'État pour l'amphithéâtre de l'École de chimie de la nouvelle Sorbonne.
Un temps à redécouvrir
Il se tourne de plus en plus vers le pastel qui le libère des contraintes imposées par la technique de l'huile et donne à ses portraits une légèreté inédite, une saisissante souplesse, et un éclat maîtrisé. Leurs harmonies claires retrouvent les couleurs découvertes en Italie. « Ses harmonies apaisées et rares enveloppent de gracieuses et nonchalantes jeunes filles » dira Verhaeren
Au lendemain de la grande guerre, il refuse l'avant garde mais évolue vers une peinture plus libre, souhaitant, dira-t-il, « exprimer mon temps à ma guise, en accordant ma chanson à celle de mon époque ». Cette nouvelle manière ne séduira pas la critique, et lors de sa mort, en 1936, La Revue d'art ancien et moderne concluera : « ce peintre au talent subtil était caractéristique d'un temps déjà lointain ».
Un temps à rédécouvrir...
CATALOGUE
152 p. 58 ill. coul. Editions Le Capucin, 30 Euros.
Cette exposition sera présentée au Musée des Beaux-Arts de Carcassonne, du 7 février au 7 mai , puis au Musée de Brou à Bourg en Bresse du 18 septembre au 15 décembre 2004.
|