C'est à l’œuvre tardive de Matisse, cette période qu'il qualifiait de “seconde vie ” qu'est consacrée la nouvelle exposition du Musée du Luxembourg. Une période de travail considérable, marquée par un profond renouvellement et un extraordinaire épanouissement de son art et caractérisée par un éclatement de couleurs pures et une abstraction tendant toujours plus vers le signe et l’arabesque. Elle réunit une centaine d’œuvres du peintre sur une grande variété de supports - huiles sur toile, gouaches découpées, dessins, maquettes de livres illustrés, tapisseries - avec, comme fil conducteur, la correspondance échangée avec son ami André Rouveyre entre 1941, date d’une grave intervention chirurgicale qu’il subit à Lyon, et sa mort en 1954.
Une relation privilégiée
Rouveyre et Matisse, qui s’étaient rencontrés dans l’atelier de Gustave Moreau, s’écrivaient quasi quotidiennement. Cette relation épistolaire privilégiée - près de 1200 lettres dont de nombreuses rehaussées de croquis - offre un regard unique sur le processus créatif et les aspirations de Matisse. Rouveyre, portraitiste redouté pour son trait cruel et romancier à ses heures, s’avérait être un correspondant de tout premier ordre, malgré un style de vie et une personnalité bien différents. Matisse qui résidait alors dans le Midi était très limité dans ses déplacements par une convalescence longue et douloureuse. Aussi appréciait-il particulièrement ces interludes littéraires qui lui permettaient d’affiner sa pensée, tant sur des considérations artistiques que sur des préoccupations plus prosaïques, sans pour autant l’interrompre dans son travail.
Le cheminement d’un artiste épris d’absolu
Grace à de nombreux concours internationaux, l’exposition a pu réunir des œuvres majeures telles la Gerbe de 1953, œuvre monumentale et ultime de Matisse jamais exposée en France, la série complète des planches au pochoir pour Jazz deux tapisseries Polynésie Ciel et Mer de 1946, ou L’Arbre de vie de 1949, une gouache découpée de 515 sur 252 cm qui servit de maquette pour le double vitrail du sanctuaire de la Chapelle du Rosaire à Vence. En les présentant de façon conjointe avec la correspondance qui les évoque elle offre un regard renouvelé sur l’œuvre et la personnalité d’Henri Matisse entre 1941 et 1954. Cette juxtaposition d’œuvres et d’écrits de l’artiste illustre par ailleurs, de façon singulièrement tangible, la place de la mémoire, du souvenir, de la réflexion et de l’inspiration dans le processus créatif. Elle permet au spectateur de visualiser le cheminement artistique autour de thèmes récurrents - arbres, femme... - d’un artiste épris d’absolu, de beauté et de poésie.
Cette exposition est réalisée en collaboration avec le Louisiane Museum of Modern Art, Humlebaek (Danemark) où elle sera présentée du12 août au 4 décembre 2005>
PUBLICATION
Catalogue de l ‘exposition, présentant l'ensemble des œuvres exposées (145 illustrations). Textes d’Isabelle Monod-Fontaine, Catherine Coquio, Claudine Grammont et Anne Coron, 24x28 cm, 256 pages. Éditions Hazan 39 €
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