Cent ans après la présentation des Fauves, le Salon d’Automne, témoin en son temps de la naissance de l’art moderne, veut faire découvrir ou redécouvrir les formes d’art les moins connues du globe, et l’apport des traditions africaines et asiatiques à l’art contemporain. Première contribution marquante, plus d’une centaine de peintures sacrées Yao sont présentées au public pour la première fois, dans le cadre du salon 2005. En France, le Musée Guimet possède un petit nombre de ces peintures, qui ne sont malheureusement pas présentées au public. Grâce au concours de collectionneurs privés de tous les coins du monde, le Salon a pu mettre en place une exposition d’envergure, réunissant des œuvres d’époques différentes et d’une grande diversité, qui offrent un large panorama de cet art menacé de disparition..
Une civilisation longtemps ignorée
Les Yao ont une origine mal connue. Ils sont plus d’un million, répartis entre une constellation d'ethnies, parmi lesquelles environ 350 000 pour les Yao Mien et 300 000 pour les Yao Moun, seuls groupes représentés ici, auxquels il faut ajouter encore 500 000 Yao des deux groupes au Vietnam, et quelque 70 000 à 80 000 Yao au Laos en Thaïlande et dans la diaspora, en Europe et aux Etats-Unis d'Amérique. Ils ont depuis des siècles perpétué un art pictural sacré resté ignoré du grand public. Jalousement gardées par les prêtres Yao, ces peintures commencent à être accessibles en raison des bouleversements politiques entraînant la disparition partielle des cultures traditionnelles, qui ont affecté cette partie du monde depuis 40 ans.
Un art taoïste
À l’origine animistes, certains groupes Yao se convertirent entre le Xe et le XIIIe siècle au Taoïsme, dont les peintures, représentant les principaux dieux, sont utilisées lors de rituels religieux. Les dieux sont conviés et siègent à l’intérieur de leurs images le temps de la cérémonie. En dehors des rituels, ces peintures enroulées sont conservées précieusement dans la maison des prêtres. Peintes avec des couleurs naturelles, exécutées sur du papier de bambou et, plus rarement, sur toile, elles mesurent de 0,90 à 1,40 mètres. Elles se présentent en général sous forme de séries comprenant 17 ou 18 rouleaux principaux, représentant l’ensemble des divinités importantes, une étroite banderole de plus de deux mètres, le Pont de Dragon du Grand Tao, des petits portraits de dieux portés comme un masque sur le front de l’officiant, et 4 peintures de taille moyenne nécessaires au rituel.
Les faces cachées de l’homme
Il est difficile de rester insensible à cet univers empli de mystère et de foi, où des dieux si proches des humains, dont ils sont issus, sont représentés avec plus ou moins de naïveté, mais en même temps une grande rigueur et toute l’originalité de l’artiste. Cet univers que l’on pourrait croire clos est en effet d’une telle diversité dans l’expression que chaque peinture a sa propre personnalité et que l’on ne se lasse pas de découvrir à chaque fois des interprétations différentes. Les peintures Yao sont une expression artistique au sens plein du terme et, sous leur apparente simplicité, on ne tarde pas à découvrir les faces cachées de l’homme et son aspiration à un monde meilleur.
Illustration: Les cavaliers du poi P'an.Époque .XXe 0m40x 0m25 Photo Jean Pierre Cormerais
PUBLICATIONS
Catalogue de l'exposition Textes de Jean Pierre Cormerais, docteur en ethnologie, et du Docteur Jacques Lemoine (auteur du seul ouvrage sur la peinture Yao :Yao ceremonial paintings 168 pages Éditions White lotus -Bangkok 1982) 44 pages, ill., 20x15 10 euros
Catalogue du Salon . 364 pages 21 xx 29,7 cm 25 euros
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