Né dans l'avant dernière décennie du XIXe siècle à Dresde et disparu vers 1958 en URSS dans un camp de travail, Karl Waldmann est l'une des dernières découvertes du constructivisme et indéniablement une découverte très importante, ainsi qu'on peut en juger par la première exposition que lui consacre la galerie Pascal Polar.
L’homme et l’œuvre
C'est seulement après la chute du mur de Berlin qu'on le redécouvre à travers 50 œuvres achetées chez un brocanteur. Par la suite, une recherche approfondie a permis de retrouver des œuvres en Allemagne, en Italie, en Belgique, en France, aux USA et en Ukraine. On a ainsi pu identifier à travers le monde à peu près 900 œuvres, allant de 1915 aux années cinquante. Il s'agit essentiellement de collages ou photomontages. On possède malheureusement peu d’éléments sur sa vie ou sa personnalité, et on ne le retrouve pas dans les revues d'art de l'époque. Sa famille, rencontrée à Dresde en 1989 et décédée depuis, l’avait déclaré “fou”. Il aurait refusé d'exposer pour des raisons « mentales » - mais plutôt sans doute pour des raisons de sécurité, durant les années où les nazis étaient au pouvoir, puis sous la censure stalinienne. Une autre hypothèse est qu'il n'aurait pas été un « pur » artiste mais aurait eu une autre activité principale, - d’architecte par exemple - et aurait consacré ses loisirs à la création artistique.
Des compositions abstraites au constructivisme
Dans ses formes, l'œuvre de Waldmann, est assez hétéroclite, et ne se rattache jamais à un seul mouvement. Ses œuvres de jeunesse sont abstraites mais, très vite, ses créations font référence au constructivisme, au dadaïsme, voire même au surréalisme. Les formes sont empruntées au constructivisme, avec une destruction de l'image classique dans une vision dynamique. Cependant l'état d'esprit de ses photomontages est proche des dadaïstes par sa volonté d'intégrer les événements de son temps dans une vision acide et politisée. Face à l'absurde et à l'intolérable de la politique d'hommes comme Hitler ou Staline, ses collages fustigent son époque par des charges politiques où éclatent sa sensibilité exacerbée et l'ironie du regard qu'il porte sur son temps. On a pu ainsi le rapprocher d'artistes comme Schwitters, Heartfield, Haussmann mais aussi Rodchenko et Maiakowski. Son œuvre touche au cinéma, à la politique, à la littérature, au théâtre. Il y développe les thèmes de la ville, de la machine, des actrices. Il s’agit d’une œuvre très riche qui n’a pas encore été étudiée en profondeur.
Œuvres constructivistes russes en provenance de la collection Bodenschatz de Bale
Le premier étage de la galerie regroupe plusieurs œuvres marquantes d'Art Russe depuis le début du siècle jusqu'aux affiches du « Réalisme socialiste ». Ce choix provient de la collection Bodenschatz. rassemblée à Bâle pendant plus de 30 années. Cette collection, peu connue encore, permet de découvrir les affiches rares de Malévitch - "Le Loubok", quelques œuvres du début du siècle sur les Emprunts russes - des constructivistes, de la peinture, des dessins, et surtout un choix étonnant et rare d’affichistes du Réalisme Socialiste : Ivanov V, Deni V, Miakovski, Malevitch, Filonov, Korovine, Sorionov, Benois, Nicolai, Udalzova, Otrochenko, Korovine Mansourov, Dimitrienko, Efimov Gorskin,Lebedev, Koretsky, etc.
Illustration : Korezsky Nous voulons la paix Affiche de 1950, 116 x 78 cm. Photo Pascal Polar
Publication : Karl Waldmann, 23 x 17 cm, 160 pages, 181 reproductions en couleur, textes en français, anglais, allemand, 35 €.
Pour voir d'autres illustrations, cliquez sur ENGLISH VERSION en haut de page
|