Depuis les rondes-bosses des années 1970, Madeleine Weber sculpte l’humanité et son rapport avec l’espace, l’air et la lumière. Ses personnages, Femme qui avance, Corps, Naissance, ont pénétré ce printemps dans l’avant-nef de la cathédrale de Noyon. Quatre autres édifices de l’Oise, l’église de Saint-Jean aux Bois, celle de Choisy-au-Bac ainsi que Montmille près de Beauvais et Saint-Leu d’Esserent accueillent des artistes pour un projet intitulé Dialoguons avec le visible initié par l’Evêché de Beauvais qui souhaite établir un contact entre la création contemporaine et les lieux de culte.
Le relief et la surface sensibles d'une vision intérieure
La figuration a progressivement disparu des sculptures de Madeleine Weber qui déclare : Au cours de mon évolution vers une certaine géométrisation, les éléments figuratifs de mes premières sculptures ont donné lieu et place à une autre corporalité, une transfiguration du corps, tension vivante entre la matière et l'esprit, concentrée dans des oeuvres de moindre format. Je crée le relief et la surface sensibles d'une vision intérieure, alliés à la justesse des proportions dans un espace donné. Les titres des œuvres nous donnent des indices évoquant le temps qui passe, l'esprit migrateur ou prisonnier, la place de l'homme dans l'univers : Voyages aléatoires, L'aventure intérieure, La traversée, Espaces intérieurs et solaires...
L’intériorité a trouvé sa voie d’expression par la relation de l'artiste avec la matière et les relations des matières les unes avec les autres et avec l’espace. Preuve que majesté et monumentalité ne résident pas seulement dans le surdimensionné, souvent utilisé dans la figuration démonstrative, surtout en sculpture.
L’instant ou la maîtrise devient poésie.
Pour Madeleine Weber, le sentiment intense de la fragilité du vivant et d'un au-delà du temps sont les bases sur lesquelles s'appuient la vie, le travail et la réflexion plastique.. Carton ondulé modelé par un fil métallique invisible, s’élevant dans l'inconnu, ou terre cuite à laquelle la poudre de marbre donne une lumière directrice, aérienne ou tendue, la matière disparaît en tant que telle dans cela même qui a donné naissance à la sculpture : lumière et mouvement. Matière pourtant savante, même quand elle se présente toute prête, récupérée, comme ces cartons ondulés dont l'artiste utilise les lignes. Madeleine Weber parvient à faire oublier l’historique de la composition, et à nous faire croire qu’elle a elle-même oublié comment l’œuvre est construite. Elle préfère l'instant où la maîtrise devient poésie, où l'œuvre accomplie ne s'explique plus par la technique mais, dans sa matérialité, rejoint la pensée.
Le concret du temps
Il n’y a point ici de mouvements intempestifs, ni provocations, ni messages bavards, mais une violence contenue, toute en pudeur, une sorte de sérénité quasi tellurique, silencieuse, chargée d‘humour et de paix . Concrète autant que spirituelle, c’est une restitution des forces de la nature reliées au corps, cette nature où l’humain cherche sa respiration, pour ne pas dire la voie oubliée. L’engagement de Madeleine Weber est du côté de la possible réconciliation de l’homme et du cosmos. Ne pas fuir, faire … Son travail a le concret du temps et nous murmure l’immanence.
Illustration : MADELEINE WEBER Femme qui avance, orme,cathédrale de Noyon, © Musées de Noyon
Publication
Lumière et mouvement. Madeleine Weber, sculptures Textes de Bernard Billa et Barbara Sibille. 44 pages, 30 reproductions.Prix 5 Euros
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