Le peintre flamand Patinir, actif au début du XVIe siècle, est considéré comme le pionnier de la peinture de paysage. Le Prado, qui possède une très riche collection de peinture flamande, aidera par cette rétrospective à faire la lumière sur un artiste encore mystérieux. Sur les quarante-huit œuvres rassemblées, vingt-deux sont de la main de Patinir lui-même, le reste provenant de ses plus importants précurseurs et disciples. Ce sera l’occasion de découvrir des compositions singulières, qui ne cessent de surprendre par leur mariage de fiction et de réalité, ainsi que par leur évocation lyrique de la grandeur de la nature.
Anvers, capitale des arts
L’exposition du musée du Prado est la première dédiée au peintre Joachim Patinir (ou Patenier, en français), artiste flamand du XVIe siècle. Ce contemporain de Jérôme Bosch est probablement né entre 1480 et 1485 dans le sud-est de l’actuelle Belgique. On estime qu’il travaillait comme peintre à Anvers en 1515 et qu’il y est mort en 1524. Décrit par Dürer comme ce « bon peintre de paysage », Patinir est considéré comme le premier de l’ère moderne à s’être spécialisé dans ce genre. Le facteur géographique n’est pas négligeable dans la naissance de la peinture de paysage. Anvers était en effet le cœur du marché de l’art européen et son énorme production, plus profane qu'ailleurs, était contrôlée par les artistes eux-mêmes plutôt que par l’Eglise.
Trois quarts des œuvres de Patinir sont réunies
L’exposition réunit 22 des 29 tableaux attribués à Patinir par le commissaire, Alejandro Vergara, conservateur en chef de la peinture flamande au musée du Prado. Elle comprend, en outre, 27 tableaux et œuvres sur papier de ses prédécesseurs et admirateurs, tels que Jérôme Bosch, Robert Campin ou Dirk Bouts, où l’intérêt pour l’environnement naturel devient de plus en plus évident. Les trois salles consacrées à Patinir montrent l’originalité de son style mais s’intéressent aussi aux problèmes d’attribution. Ces œuvres datent d’une époque où il était commun de travailler en atelier. Distinguer la main du maître de celle de ses assistants n’est pas une mince affaire. Sont ainsi présentées deux œuvres de collections privées, récemment attribuées à Patinir et à son atelier : il s’agit du Triptyque avec saint Jérôme en pénitence et de Paysage avec la Crucifixion.
La maîtrise vient avec la maturité
La maîtrise progressive de la peinture de paysage par Patinir est éclatante dans ses dernières œuvres, de grandes dimensions. Trois d’entre elles constituent le cœur de la rétrospective : Paysage avec saint Christophe de l’Escorial, Charon traversant le Styx et la Tentation de saint Antoine, tous deux du Prado. L’exposition réunit des œuvres essentielles comme le Martyre de sainte Catherine et le Baptême du Christ, provenant du Kunsthistorisches Museum de Vienne, le triptyque Pénitence de saint Jérôme, du Metropolitan Museum de New York, la petite mais magnifique Fuite en Égypte du Koninklijk Museum d’Anvers. L’exposition s’achève en révélant l’impact fondamental de Patinir sur ses contemporains, comme Quentin Metsys (1466-1530), Bernard van Orley (vers 1488-1541), Joos van Cleve (mort en 1540/1541), et sur les artistes des générations suivantes comme Herri Met de Bles (mort après 1550) et Jan van Amstel (mort vers 1542).
Richesse des collections espagnoles
C’est la plus vaste rétrospective jamais réalisée sur Patinir. En effet, la majorité de ses œuvres ne sortent que très rarement de leur lieu de conservation en raison des problèmes spécifiques que posent les huiles sur bois. Parmi celles qui sont exposées, six appartiennent à des collections espagnoles (quatre au musée du Prado, le plus riche au monde en la matière, qui ont été récemment restaurées, une au musée Thyssen, une au monastère San Lorenzo del Escorial). Il convient au passage de remarquer la forte présence de Patinir en Espagne, près du quart de ses œuvres se trouvant dans l’agglomération de Madrid. L’exposition a été précédée d’une recherche approfondie, à laquelle ont participé les conservateurs des musées abritant des œuvres de Patinir (tels que la National Gallery de Londres ou le Louvre). Elle a abouti à la publication du catalogue raisonné de Patinir.
PUBLICATIONS
L’exposition est accompagnée de la publication d’un catalogue raisonné dans lequel figurent, outre les vingt-deux œuvres exposées, huit autres tableaux du maître flamand, inscrits dans sa production suite au travail mené à bien lors de la préparation de l’exposition.
Le musée publie également un guide de l’exposition contenant un article du commissaire, « Patinir et l’origine de la peinture des paysages », ainsi que des illustrations des œuvres exposées.
Illustration : JOACHIM PÄTINIR Saint Christophe huile sur panneau, 29 x 21 cm c. 1465 Philadelphia, Philadelphia Museum of Art, John G. Johnson Collection
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