JULES CHÉRET
L'ESPRIT ET LA GRÂCE

Né en 1836, Jules Chéret est, à juste titre, considéré comme l’inventeur de l’affiche moderne. L’ensemble de son immense production (près de 1000 affiches) témoigne d’une créativité extraordinaire. Chéret a réussi l’exploit de marier - dans ces supports publicitaires qui vantent spectacles, fêtes et produits de toutes sortes - l’esprit et la grâce. Le revers de ce succès est qu’il a occulté l’œuvre peint de l’artiste…

Des affiches aux faire-part

Pour beaucoup, Chéret demeure un affichiste. Ce pan de son œuvre est évidemment présenté dans l’exposition avec une sélection de grandes affiches. Certaines sont accompagnées de leurs maquettes préparatoires à la gouache, permettant de comprendre le processus de création de ces superbes supports publicitaires, qui impressionnèrent Toulouse-Lautrec. La lithographie a été l’un des médiums préférés de Jules Chéret. A côté de ses fameuses affiches, il a créé un grand nombre d’œuvres lithographiées, proches des dessins, destinés à illustrer des menus, programmes de spectacles, faire-part de naissance, etc. Une sélection de ces travaux de plus petit format est exposée.

Une riche œuvre picturale

On ignore souvent que Chéret a été bien plus qu’un affichiste. C’est ce Chéret peintre et décorateur que l’exposition souhaite mettre en lumière. En effet, aucune grande rétrospective ne lui a été consacrée depuis l’hommage qui lui a été rendu à Paris au Grand-Palais en 1933 au lendemain de sa mort. Ce pan abondant et méconnu de son œuvre, réalisé pour l’essentiel entre 1880 et 1920 (date à laquelle la progression de sa cécité devient un handicap majeur), constitue le cœur du parcours. Il y a là des peintures à l’huile - portraits, allégories et personnages de la Commedia dell’arte - mais aussi de superbes pastels, technique dans laquelle Chéret excellait. Les dessins, souvent conçus comme étape préparatoire à des compositions plus importantes, sont un autre volet important de son activité. Il les effectuait en grand nombre, souvent d’après des modèles – qu’il faisait habiller de vêtements de son invention, vestes bouffantes ou déguisements de berger.



Illustration : Jules Chéret Arlequine

Des décorations dans toute la France

Jules Chéret a également été un grand décorateur mural. A Evian même, « La Sapinière », la villa du baron Vitta, riche banquier et soyeux lyonnais, en est un magnifique exemple. Il faut y ajouter l’Hôtel de ville de Paris (1898-1902), la Taverne de Paris (1905), le musée Grévin (1900) ou la salle des fêtes de la préfecture de Nice (1906-07), avec ses fresques sur le thème du carnaval. Cette œuvre décorative est évoquée par l’intermédiaire de nombreux pastels préparatoires, dont l’un des plus beaux est celui du rideau de scène du musée Grévin, œuvre onirique dans laquelle on retrouve, dans une sarabande nocturne effrénée, la plupart des personnages chers à l’artiste. Et pour montrer combien Chéret existe en dehors de l’affiche, le visiteur peut également découvrir son activité de céramiste, mise en lumière par quelques pièces en porcelaine délicatement peinte.