Continuant sa prospection sur les formes contemporaines de la création et en particulier autour du thème du paysage, le musée des Beaux-Arts de Rouen invite l'artiste Ralph Samuel Grossmann. Travaillant à la fois l'image et le volume, l'artiste traduit dans des œuvres, à la forme classique, une vision et une interrogation sur l'état de notre rapport contemporain à la nature.
Questionner les métamorphoses de notre monde
Pour le projet de Rouen, Grossmann intègre, une nouvelle fois, représentation de la nature et imaginaire de la science. Transformée en grand panorama, la Galerie accueille de larges images de ciels nuageux, où flottent de lumineux encodages colorés. Ces images dialoguent dans l'espace avec des sculptures-assemblage formées de fragments naturels et de modélisations scientifiques. L'ensemble questionne ainsi, sobrement et avec poésie, les métamorphoses du monde actuel et comment le réchauffement climatique annoncé altère notre perception de la nature. «La science observe le monde, explique l’artiste, nous en informe et ajoute ainsi à notre perception directe de la réalité, une dimension nouvelle, située entre information abstraite, poésie et illusion. La série Le Monde voilé propose des œuvres (paysages photographiques et sculptures conceptuelles) traduisant le sentiment contemporain de la nature. »
L’horizon de notre inquiétude
L’exposition se compose de grands formats (1 m x 1,40 m) et de sculptures en bois, pierre et pigments naturels. Comme l’explique Ralph-Samuel Grossmann, ces sculptures dérivent « du modèle développé par les sismologues, pour signer chaque séisme, en forme simple à lire. Devant la simplicité de cet objet mathématique, la dimension souvent terrifiante du séisme lui-même disparaît et devient un signal coloré et ludique, un code couleur. Les grands paysages photographiques s’ouvrent au regard. Un code barre coloré se trouve de l’un à l’autre. Ils semblent associer l’observation météorologique en temps réel et le constat d’une réalité invisible. Au-delà de la magie sublime du ciel nuageux, ils évoquent le nouvel horizon de notre inquiétude contemporaine. »
Connaître et ressentir…
Né en 1970 à Strasbourg, Grossmann a étudié en France et aux Etats-Unis, où il a obtenu un Master of Fine Arts en photographie à l’université Tyler de Philadelphie. Il vit et travaille à Berlin. Son œuvre d’accompagne d’une réflexion théorique élaborée. « Notre vision, appuyée sur des données scientifiques, devient plus performante, mais continue de reposer aussi sur notre perception oculaire directe. Comment alors voir le mouvement d’un nuage, sa transformation continue et poétique ? Comment voir, et s’émouvoir, du rayon mauve que fait la pluie le soir dans le contre-jour du soleil orangé ? Quels souffles, quelles odeurs légères venues de la terre restent disponibles à notre attention ? (…) Allons-nous réussir à ressentir, tout en connaissant ? Saurons-nous avec nos sensations, notre imaginaire et notre pensée rationnelle regarder, apprécier, et surtout préserver, cette nature dont nous sommes ? »
Illustration : Pampelonne (altocirrus)
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