A l’occasion de cette année de commémoration, cette exposition a pour intention de présenter l’homme de presse que fut Jean Jaurès. Son talent d’écriture et sa force de conviction marquent une plume engagée auprès des mineurs tarnais de cette fin de XIXe siècle et témoignent de la philosophie d’un homme aux prises avec les mutations socio-économiques de son temps dont la pensée demeure fondamentale.
Les débuts dans le journalisme
Jean Jaurès (Castres, 3 septembre 1859 – Paris, 31 juillet 1914) est une des grandes figures politiques de l’histoire de France, symbole du socialisme humaniste. Connu pour ses talents d’orateur – on le surnommait « Saint Jean bouche d’or » - il est aussi l’auteur de publications parmi lesquelles les fameux Discours à la jeunesse et L’armée nouvelle. Bien qu’il ait été le fondateur du journal L’Humanité, son activité en tant que journaliste est moins connue que son rôle politique, qui l’a vu être député et participer à la fondation du Parti socialiste français en 1902. Jaurès débute sa carrière dès 1885 dans les journaux locaux du Tarn. Il devient co-directeur de La Petite République en 1898. Il collabore à La Dépêche pendant 27 ans, du 21 janvier 1887 au 30 juillet 1914, veille de sa mort et c’est dans ses colonnes qu’il prend la défense du capitaine Dreyfus.
Jaurès et L’Humanité
En 1903, face aux restructurations de La Petite République (perspectives de vente et de changement de titre), Jaurès fait le choix de quitter ce quotidien pour fonder L’Humanité, le 18 avril 1904. Il entend en faire un outil pour l’unification du mouvement socialiste français et, par la suite, un des leviers de la lutte révolutionnaire contre le capitalisme. Dans son premier éditorial, Jaurès en fixe les deux idées force : la recherche d’informations pour fournir « à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde » et l’indépendance financière. Dans le contexte international de plus en plus tendu du début du XXe siècle, le journal de Jaurès défend résolument des positions pacifistes, en accord avec l’internationalisme du mouvement socialiste. Il est également très présent dans le combat pour la laïcité. Le journal sera profondément ébranlé par l’assassinat de Jaurès en 1914 et le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Il subira de profondes restructurations et deviendra communiste après la scission du Parti socialiste au Congrès de Tours en décembre 1920.
La défense des mineurs
Jaurès s’implique dans toutes les grandes questions de son époque avec le souci de la justice sociale, inséparable d’une vision profondément humaniste. La presse est pour lui un moyen d’expression au même titre que la tribune de la Chambre des députés. A travers ses nombreux articles, il prend la défense des travailleurs et mène le combat contre les inégalités engendrées par le capitalisme. Ainsi, les articles les plus célèbres qu’il écrit pour La Dépêche sont ceux qu’il consacre au conflit minier de Carmaux en 1892. Jaurès soutient les mineurs et accuse la République d’être aux mains de députés et de ministres capitalistes favorisant la finance et l’industrie au détriment du respect des personnes. Lors de la longue grève de Montceau-les-Mines, en 1901, il défend la grève générale. Au moment de la catastrophe de Courrières (1101 morts lors du terrible coup de grisou du 10 mars 1906), il exhorte les mineurs à « s’unir étroitement […] dans la fierté d’une revendication commune » qui aboutira à des avancées en termes de sécurité et de repos hebdomadaire.
Illustration : La Catastrophe de Courrières , Le Petit Journal, dimanche 15 avril 1906, n°804.Collection Centre National Musée Jean Jaurès, Castres.
|