ArtAujourdhui.Hebdo

C’est de qui ?

FRANCFORT – C’est une bien intéressante exposition que propose la Schirn Francfort. Il y suffit d’une petite variante par rapport à l’habitude – gommer le nom des artistes – pour que le visiteur perde ses repères. Il nous arrive si souvent de lire le cartel avant de regarder l’œuvre et de déterminer notre jugement en fonction du nom du créateur… Impossible à « Anonymous ». Les onze artistes exposés ont choisi de le demeurer, anonymes. La démarche, on l’avouera, est très conceptuelle et vise à mettre le doigt sur une réalité, nourrie par le système médiatique : les artistes connus se réduisent de plus en plus à des marques (allez, un exemple au hasard : Damien Hirst) que l’on promeut selon les recettes classiques du marketing. En finissant par faire abstraction de tout critère de qualité ou d’originalité. Quel commissaire a donc eu cette idée brillante pour faire parler de lui ? A ce jour, il joue le jeu et est resté dans l’obscurité. Allons plus loin : il ne nous déplairait pas que l’embargo subsistât après l’exposition. Mais c’est peut-être trop demander. Le système rattrape toujours ceux qui veulent lui résister…

Le site de la Schirn Kunsthalle (en anglais et sur un air de gigue irlandaise…)

Klimt et Picasso, la nuit des records ?

NEW YORK - Jamais vente n'aura été aussi alléchante : Christie's propose à New York, dans ses vacations des 8 et 9 novembre, cinq toiles évaluées chacune autour de 50 millions de dollars. Le marché sera-t-il solvable ? Lorsque le contenu de la vente a été annoncé il y a quelques mois, le clou en était un Picasso, un portrait mélancolique de la période bleue, celui d'Angel Fernández de Soto (1902), appartenant au compositeur Andrew Lloyd Weber. Depuis, la mise sur le marché (toujours chez Christie's) de quatre œuvres de Klimt spoliées pendant la guerre et rendues à leurs héritiers légitimes a bouleversé la donne. Un cinquième tableau de cet ensemble, le portrait d'Adèle Bloch-Bauer, a en effet été acheté au printemps 135 millions de dollars par Ronald Lauder, le roi des cosmétiques. Et on lui prête l'intention de continuer sur le même voie. Les chèques comporteront donc, a priori, beaucoup de zéros ce soir-là, même si l'on n'est jamais à l'abri d'une mauvaise surprise. A côté, un Balthus à 7 millions de dollars (Les Trois Sœurs), un Kirchner à 18 millions ou un Schiele à 20 font quasiment figure d'amuse-gueule. Seul L'homme à la hache de Gauguin pourrait entretenir l'espoir de monter sur le podium. Tâche ardue tout de même : il n'est estimé que 35 millions de dollars…

Présentation de la vente

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Novembre, y’a photo

PARIS – Créée en 1980, la manifestation obéit à un rythme biennal : à l’automne de chaque année paire, novembre est promu « mois de la photo ». Ce qui signifie quelque 80 expositions sur une thématique choisie – cette année les rapports entre photo et page imprimée. Dans des musées et des galeries, évidemment, mais aussi des librairies (Artazart, la Chambre claire), des centres culturels étrangers (mairies d’arrondissement (Erich Lessing dans celle du Xe), voire un lycée (Louis-le-Grand). A la Maison européenne de la photographie, qui est un peu le vaisseau amiral de la manifestation, on fait le point sur la jeune création européenne (Mutations 1, à partir du 2 novembre). Un projet qui trouve des échos dans les villes partenaires (Berlin, Bratislava, Luxembourg, Moscou, Rome et Vienne). Le point d’orgue de ce marathon de l’image sera le festival Paris Photo, du 14 au 18.

Les mondes parallèles d’Artaud

PARIS – Une puissance créatrice fébrile, effrayante, « folle », et ce dans plusieurs domaines : cinéma, dessin, écriture, théâtre… C’est ce dont veut rendre compte la Bnf dans son exposition sur un homme à part, Antonin Artaud (1896-1948). Sa part de folie, son enfermement à l’asile de Rodez sont scénographiquement rendus par un tunnel que doit emprunter le visiteur. Mais la richesse du fonds de la Bnf et de collectionneurs privés permet d’aller au-delà de ce qui est devenu le cliché Artaud. Des dizaines de cahiers manuscrits, dont certains encore inédits, une soixantaine de dessins (avec de nombreux autoportraits), de curieux « sorts » lancés à ses amis mais aussi ses écrits sur l’art, ses contributions au 7e art (en 1927-28, années intenses, il tourne pour Dreyer et Dulac et incarne Marat dans le d’Abel Gance). Pour aider à cerner le personnage - cela est-il possible ? -, quelques-unes de ses sources d’insipration sont mises en regard. Cela va de Lucas de Leyde à Balthus en passant par André Masson et la peinture mexicaine de María Izquierdo.

Rouault-Matisse, une amitié

PARIS – Alors que toutes les expositions ambitionnent d’être mémorables, uniques, en voici une, riche, intelligente, qui annonce qu’elle n’a aucune visée rétrospective. Voilà qui est rafraîchissant ! Le propos est simple : faire revivre l’amitié qui a uni deux grands artistes du XXe siècle en mettant en avant un cheminement parallèle. Les deux hommes sont contemporains – Georges Rouault (1871-1958) étant de peu le cadet de Henri Matisse (1869-1954). Ils sont passés par l’atelier de Gustave Moreau et se rejoints pendant un demi-siècle sur certains « nœuds » : le goût pour le paysage, l’amour pour le cirque, la passion pour Baudelaire, que chacun illustrera. Septuagénaires, Rouault et Matisse se rencontrent une dernière fois dans la revue Verve de Tériade. Nous sommes dans les années 1940 : les héros sont vieux et fatigués, ont assisté à deux guerres monstrueuses mais sont toujours amis…

Ici Londres, à vous Paris

LONDRES – La saison « Paris Calling », consacrée à la scène contemporaine française et ouverte depuis juin, a été officiellement lancée par le ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, le 31 octobre. Elle propose un ensemble de manifestations dans des institutions anglaises (Pierre Huygue à la Tate Modern, Antigone under hypnosis des designers M/M au Victoria & Albert Museum, Klossowski et Bellmer à la Whitechapel) et dans des galeries privées (Tatiana Trouvé chez Bischoff & Weiss, Erik Dietman chez Anthony Reynolds). Mais aussi des installation au Great Eastern Hotel et au Chelsea College of Design. Ou Ange Leccia au Sketch, le restaurant très en vogue de Pierre Gagnaire. Avec le secret désir de prouver que l’art contemporain français est capable de s’exporter…