ArtAujourdhui.Hebdo

Le retour du seigneur de Sipán

LIMA - On se souvient de cette grande découverte de 1988 au nord-ouest du Pérou : une tombe d'un seigneur de la civilisation précolombienne mochica, contenant de nombreuses pièces de céramique anthropomorphe et des bijoux d'exception. L'exposition de ce trésor avait été l'une des attractions, à Paris, du bicentenaire de la Révolution. Le président péruvien, Alan García, a annoncé le 20 novembre la découverte d'un autre mausolée intact dans la région, près de Ferreñafe. Les archéologues ont réussi à prendre de vitesse les huaqueños, les pilleurs de tombes, pour mettre au jour des objets en métal et notamment des tumis ou couteaux sacrificiels en bronze, dont l'un mesure un mètre et demi de long. Lors de l'exposition de 1989, certaines pièces provenant d'une collection privée et d'une origine contestable avaient été légalisées pour que le Pérou puisse faire bonne figure à Paris. A l'heure où les pays émetteurs de merveilles archéologiques se "soulèvent" contre les acquisitions illicites réalisées sur le marché par les grands musées, la bonne surprise de Ferreñafe souligne que le problème s'est aujourd'hui déplacé en amont. Si les pratiques du marché se moralisent, il est à peu près impossible de controler les sites archéologiques eux-mêmes et le flux qui s'en dirige vers des collectionneurs privés peu regardants. De l'Afghanistan à l'Iran, du Pérou au Nigéria, la défense du patrimoine ancien est une tâche démesurée...

ATTENTION DERNIERS JOURS Ne manquez pas L’ART JAPONAIS ou la reliure selon Victor Prouvé et Camille Martin ÉMILE GALLÉ ET L’AFFAIRE DREYFUS; Deux expositions - dossier au MUSÉE DE L'ÉCOLE DE NANCY À NANCY Deux temps forts de la vie artistique de Nancy au tournant du siècle. Jusqu’au 10 décembre prochain. Voir l'article d'ArtAujourdhui.info

Hirst, le collectionneur

LONDRES - Bien qu'âgé d'à peine 41 ans, Damien Hirst est l'un des artistes les plus riches du monde. Sa fortune lui sert à payer ses nombreux assistants, à s'offir un manoir dans la campagne anglaise (Toddington Manor, près d'Oxford), à racheter ses propres oeuvres à Charles Saatchi... mais également à acquérir les créations de ses contemporains. C'est ce que prouve l'exposition qui se tient à la Serpentine Gallery. Outre un ensemble conséquent de Sarah Lucas et Tracey Emin, ses collègues dans le groupe des Young British Artists (YBAs), on y trouve aussi Jeff Koons, Francis Bacon, Angela Bulloch, Richard Prince ou le très figuratif John Currin. Et des propositions aussi provocantes que l'ont été celles des YBAs en leur temps : les graffiti politiques de Banksy ou le travail sur les têtes de mort de Steven Gregory. Qui rejoint la fascination pour Thanatos de Damien Hirst, dont les requins et agneaux découpés dans le formol demeurent les oeuvres emblématiques.

Bons baisers de Kaboul

PARIS – La France a toujours eu des liens forts avec l’archéologie afghane. C’est ce que démontre l’exposition présentée au musée Guimet sous un titre accrocheur, « les trésors retrouvés », en provenance du Musée national de Kaboul. De ces quatre trésors, enfouis depuis 2000 ou 4000 ans, deux ont été exhumés par les chercheurs de la renommée DAFA (Délégation archéologique française en Afghanistan) : ceux de Begram, fouillé à la fin des années 1930, et d’Aï-Khanoum, fouillé entre 1964 et 1978. Ivoires, bronzes, lingots d’or d’époque hellénistique… Le contenu des tombes princières de Tillia-Tepe a été mis au jour en 1978, juste avant que des décennies de guerre ne s’abattent sur le pays. Alors que les chars grondaient dans les plaines, ces pendentifs, miroirs ou ceintures de différentes origines soulignaient le brillant rôle de carrefour de l’Afghanistan à l’époque du Christ. Certains de ces objets d’exception ont été restaurés pendant leur séjour en France.

Le site du musée Guimet

Nitsch, grand-prêtre de l’actionnisme

BERLIN – C’est avec Muhl, Brus et Schwarzkogler un des représentants historiques de l’actionnisme viennois, qui a si fort dérangé les observateurs dans les années 1960 et 1970. Mélange de performances extrêmes (automutilation), de peinture, de sang et autres fluides corporels, ce courant a vu disparaître ses protagonistes, parfois de façon violente (Schwarzkogler s’est suicidé en 1969). Seul Hermann Nitsch (il a 68 ans) a poursuivi jusqu’à aujourd’hui sa quête d’une vérité qui s’apparente, par sa charge mystique et par sa dimension liturgique, aux mystères antiques (en octobre, il tenait la 122e performance de son Théâtre des Orgies et des Mystères). Certaines de ses œuvres les plus célèbres sont présentées comme l’Existenzaltar de 1960, le Geiselwand ou les immenses tableaux des Stations de la Croix. On a également procédé à la recréation d’installations éphémères comme l’Asolo-Raum.

Philadelphie se rebiffe

PHILADELPHIE - La décision de la Jefferson University de vendre un célèbre tableau de Thomas Eakins, The Gross Clinic (1879), continue de faire des vagues. Présentant un grand médecin de la ville, pionnier de la chirurgie, cette oeuvre est depuis plus d'un siècle dans les collections de l'université. Au point d'être considérée comme inaliénable par de nombreux étudiants et par le maire lui-même, qui a annoncé qu'il allait tout faire pour empêcher son départ. The Gross Clinic a été vendu à une héritière de la famille Walton (qui contrôle Wal-Mart, la plus grande chaîne de supermarchés au monde) pour 68 millions de dollars. La bonne conjoncture du marché de l'art explique la décision de l'Université de réaliser cet actif pour investir le produit dans des projets de développement. Mais la réaction inattendue des habitants montre que, dans l'esprit du public, le combat pour le patrimoine se réduit de moins en moins plus aux "vieilles pierres".

Voir le tableau sur le site de l'université d'Ithaca