ArtAujourdhui.Hebdo
N° 58 - du 13 septembre 2007 au 19 septembre 2007
L'AIR DU TEMPS
Des Chinois en petit nombre
LONDRES – On l’annonce depuis si longtemps comme le clou de la rentrée que les attentes risquent d’être déçues. Les guerriers de terre cuite du Premier Empereur sont enfin visibles en Europe ! Ces personnages à taille humaine, découverts en 1974 dans la tombe de Qin Shi Huandi, qui unifia la Chine en 221 av. J.-C, constituent l’une des grandes découvertes archéologiques du XXe siècle. Il ne s’agit d’ailleurs pas que de guerriers : l’exposition du British Museum comprend aussi des musiciens et la tombe n’étant pas entièrement fouillée, on peut s’attendre à d’autres révélations. La Chine étant synonyme d’excès en chiffres (1,3 milliard d’habitants, des taux de croissance à 10%, une production manufacturière qui s’abat en avalanche sur le reste du monde), on attendait beaucoup de soldats. Leur pouvoir d’évocation est d’ailleurs très lié à un « effet de foule ». La faute à leur fragilité ? Aux coûts d’assurance ? Seules une quinzaine de ces statues ont fait le voyage. Dommage. Pour une fois que l’on aurait aimé être envahi par la Chine…
MUSÉES
Une Cité pour l’architecture
PARIS – Il y a dix ans, le musée des Monuments français brûlait, en plein été. On a cru ne jamais le revoir tant les projets de modernisation ont semblé s’enliser. Et pourtant, en revoilà l’essence dans cette grande galerie des moulages où se succèdent porches romans, jubés et tympans gothiques, copiés pendant toute la Troisième République, sur l’élan de Viollet-le-Duc. Mais ce n’est plus là aujourd’hui qu’un élément d’un ensemble plus vaste. La nouvelle Cité de l’Architecture et du Patrimoine occupe au palais de Chaillot plus de 10 000 m2, aménagés par l’architecte Jean-François Bodin. Outre cette galerie des moulages, s’y juxtaposent l’Ecole du patrimoine, une bibliothèque, des salles pour expositions et la galerie d’architecture moderne et contemporaine. Cette dernière actualise le discours en présentant plans, dessins et maquettes du Crystal Palace londonien de 1851 jusqu’à nos jours. Vu le nom et la fonction de la nouvelle Cité, son inauguration ne pouvait qu’être concomitante avec les journées du patrimoine : à découvrir à partir du 15 septembre.
EXPOSITIONS
Rubens and Co
BRUXELLES – Les Musées royaux, dotés d’un fonds remarquables de Rubens, dont d’immenses tableaux d’autel, ont choisi de centrer leur rétrospective autour de l’activité du peintre à l’époque où, au sommet de sa gloire, il anime un important atelier à Anvers (1614-1640). C’est la conclusion d’un cycle de quatre ans d’étude, qui a permis de mieux comprendre le fonctionnement de cette véritable PME du XVIIe siècle et qui a donné lieu à des restaurations significatives, comme celles du Portrait d’Hélène Fourment ou du Couronnement de la Vierge, dont l’on pourra suivre l’évolution en salle. Grâce aux prêts de l’étranger (dont le Paysage avec la chasse d’Atalante du Prado ou l’esquisse de la Montée au Calvaire de l’université de Berkeley), 120 œuvres ont été rassemblées, permettant de mieux démêler les rôles respectifs du patron, de ses alter ego (Van Dyck, Jan Bruegel l’Ancien) ou des petites mains.
Les pots-pourris d’Arcimboldo
PARIS – Révéré par les surréalistes après une longue période d’oubli, Arcimboldo est tout à fait à la mode aujourd’hui. Ses tableaux-puzzles où fruits, légumes ou livres composent des visages, sont une valeur sûre des fabricants de posters et ont inspiré une rétrospective en 1987 au Palazzo Grassi. En collaboration avec le Kunsthistoriches Museum de Vienne (qui conserve nombre de ses œuvres puisque le peintre passa vingt-cinq ans à la cour des Habsbourg), c’est le musée du Luxembourg qui en expose désormais quelques-uns, dont les « réversibles », qui peuvent se lire à double sens, comme les images d’Epinal. Mais de ce Lombard aristocratique et mystérieux (1526-1593), on découvrira aussi autre chose : des portraits de facture classique, des projets de costumes et de décors, et de belles études à la plume. On étudiera un carnet du musée de Boston, avec des dessins sur l’industrie de la soie, en attendant de nouvelles découvertes : Arcimboldo aurait en effet été dessinateur d’histoire naturelle pour le savant bolonais Ulisse Aldrovandi.
BIENNALE DE LYON
Le jeu de l’art et du hasard
LYON – Cent dix biennales ! Et moi ? Et moi ? On pourrait paraphraser Dutronc pour souligner le dilemme de ces manifestations qui ont connu un essor exponentiel en quelques années. C’est un peu ce que fait le directeur de la Biennale d’art contemporain de Lyon, Thierry Raspail, en en présentant la 9e édition. Pour arriver à distinguer la simple actualité du présent qui, lui, deviendra « histoire », les règles du jeu ont été changées. Sous la baguette de Stéphanie Moisdon et Hans Ulrich Obrist, les « joueurs » sont des commissaires du monde entier qui ont chacun sélectionné leur artiste significatif. Si l’on a du mal à trouver une unité dans ces choix délégués, c’est voulu ! Car l’humeur n’est plus aux mouvements et aux regroupements, disent Moisdon et Obrist, mais à l’hétérogénéité, à la scène éclatée. On sera vraisemblablement servi avec des participants comme Michel Houellebecq, le photographe de nus David Hamilton, des « émergents » indiens ou slovènes, des « confirmés » comme Saâdane Afif ou James Coleman. Une macédoine originale à découvrir dans des lieux eux aussi marquants comme l’ancien entrepôt de la Sucrière ou l’Institut d’art contemporain de Villeurbanne.
MARCHÉ
Eloge de la collection
PARIS – Guizot disait : Enrichissez-vous ! Ici, on dit : Collectionnez ! A l’image de la FIAC, le jeune Salon du Collectionneur, organisé par le Syndicat national des antiquaires, effectue sa migration : il passe du Carrousel du Louvre au Grand Palais. Tenu en alternance avec la Biennale des antiquaires, ce rendez-vous lancé en 2003 affiche clairement une vocation pédagogique. Il est organisé par spécialités – archéologie et arts premiers, céramique, tableaux et sculptures, mobilier et textiles, bijouterie et orfèvrerie – et accompagné de conférences (qui décortiquent la perle fine, les paravents en laque de Coromandel ou le mobilier versaillais de la période révolutionnaire), dans l’objectif de faciliter l’initiation d’un large public. Conséquence de cette approche plus « accessible », le Salon du Collectionneur a une dimension internationale moins marquée avec deux tiers de galeries françaises sur les 124 exposants. Mais l’objectif affiché n’était pas de créer une Biennale bis…
LIVRES
L’affaire Maurizio
A la question - la provocation est-elle encore possible en art contemporain ? -, une réponse valable pourrait être : Maurizio Cattelan. L’artiste italien, en une quinzaine d’années d’activité (il est né à Padoue en 1960), a réussi à choquer un spectre assez large d’observateurs, de l’Eglise à la police, des défenseurs des animaux jusqu’aux organisateurs d’exposition. Ce petit ouvrage monographique, dans une nouvelle collection dirigée par Francesco Bonami, qui fut commissaire de la Biennale de Venise en 2005, recense ses principaux faits d’armes. Les plus connus sont certainement La nona ora (la Neuvième Heure), où le pape Jean-Paul II est tué par une météorite, ou Him, où Hitler, non nommé, prie à genoux. Il s’agit là de mannequins en cire très ressemblants. Ressortissant plus au domaine de la performance est Another Fucking Ready-Made (1996) : l’artiste exposa dans une fondation d’Amsterdam des objets qu’il venait de voler dans une autre galerie. Il fallut parlementer avec la police… Se moquant des mécanismes médiatiques qui fondent la notoriété, Cattelan a aussi vendu son espace à la Biennale de Venise (1993) à un annonceur publicitaire et institué la fondation Oblomov. Son objet : donner de l’argent aux artistes qui s'engagent à ne rien créer…
BRÈVES
BORDEAUX – Imagiques, les 8e Rencontres photographiques du Sud Gironde, sont organisées sur le thème de « Fictions cartographiques », du 15 septembre au 14 octobre 2007.
ISSY-LES-MOULINEAUX – La 7e Biennale d’art contemporain d’Issy se tient au Musée français de la Carte à jouer du 15 septembre au 21 octobre 2007.
LIVERPOOL – La ville anglaise, qui se prépare à être capitale européenne de la culture en 2008, vient d’ouvrir un Musée international de l’esclavage.
NEW YORK – Du 17 au 23 septembre, la ville vit au rythme de l’Asia Week (Semaine asiatique) avec un programme nourri de salons spécialisés, d’expositions et de ventes aux enchères.
PARIS – Les Journées du patrimoine se tiennent dans toute la France le week-end des 15 et 16 septembre.
PARIS – Un accord culturel a été signé le 4 septembre entre la France et la Roumanie en matière de coopération dans le domaine des musées, pour la recherche, la protection et la mise en valeur du patrimoine muséal.
PARIS – « Spectaculaire », le 1er Salon de la rentrée culturelle, se tient du 19 au 21 septembre au Parc floral de Paris (Bois de Vincennes).
PARIS – A l’occasion de la manifestation « Le Génie des jardins », 43 artistes plasticiens « sèment de l’art » dans 8 jardins du XIe arrondissement du 16 au 23 septembre.
PHILADELPHIE – Le cabinet d’architectes choisi pour le nouveau bâtiment de la fondation Barnes a été rendu public : il s’agit du couple Tod Williams - Billie Tsien, déjà auteur de l’extension du musée de Phoenix (Arizona).
ROME – Une rétrospective Scipione (1904-1933), l’un des maîtres de l’école romaine, a ouvert à la Villa Torlonia le 7 septembre. C’est la première exposition d’envergure qui lui est consacrée depuis un demi-siècle.
ROUEN – Le musée des Beaux-Arts de Rouen et la fondation BNP Paribas ont signé un accord de mécénat pour la restauration du tableau Le Martyre de sainte Agnès de Joseph-Désiré Court.
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Cette semaine, ne manquez pas
DANS L'OMBRE DE BÉCASSINE
NOYON - Son nom est méconnu mais Joseph Porphyre Pinchon (1871-1953) a créé l'un des personnages les plus célèbres du XXe siècle : Bécassine. Lui et son frère Emile, également artiste, ont longtemps travaillé à Noyon et dans sa région, produisant tableaux, bas-reliefs, décors de théâtre et monuments aux morts.
MAX ERNST-DANS LE JARDIN DE LA NYMPHE ANCOLIE
BÂLE - Cette gigantesque œuvre murale de Max Ernst - près de 20 m2 - ornait les murs d'un dancing de Zurich. Réalisée en 1934, elle fait enfin l'objet d'une restauration complète, que le public peut observer au musée Tinguely où elle est laissée en dépôt par le Kunsthaus Zurich.
COLETTE RICHARME
ALBERTVILLE - Née en Chine en 1904, décédée en 1991, Colette Richarme est une artiste savoyarde attachante, tôt attirée par la lumière du Midi. Correspondante de Louise Bourgeois, amie de Joseph Delteil, elle a laissé une œuvre variée et colorée, à laquelle le musée d'Albertville consacre exceptionnellement toutes ses salles.