Accueil > ArtAujourd'hui Hebdo > N° 62 - du 11 octobre 2007 au 17 octobre 2007

ArtAujourdhui.Hebdo

N° 62 - du 11 octobre 2007 au 17 octobre 2007

L'AIR DU TEMPS

L’artiste, le juge et la galerie commerciale

Les voies de l’art, comme celles du Seigneur, sont visiblement innombrables. A Gateshead, la police enquête sur une photographie de Nan Goldin et laisse entendre qu’il s’agit peut-être plutôt de pornographie (Elton John, propriétaire de la collection exposée au centre Baltic, a demandé qu’elle soit fermée au public plutôt que présentée dans une version amputée). Dans un shopping center d’Amérique du Nord, des artistes conceptuels qui s’étaient installés un appartement clandestin pour observer de près l’animation commerciale se sont vus infliger une condamnation par le juge pour atteinte à la propriété privée. S’il est devenu difficile de définir ce qu’est l’art en termes d’esthétique, de matériaux ou de représentation du réel, un critère semble toujours convenir, un siècle et demi après Courbet et Manet : la contravention aux règles, aux normes imposées par la société. L’artiste prospère aujourd’hui en poufendeur des hypocrisies de tout genre. Le travail ne manque pas : on propose une sculpture en foie gras, à exposer à York, où les associations de défense des animaux sont en passe d’obtenir l’interdiction du cruel aliment.

En savoir plus sur le projet d’ « appartement dans le mall » de Michael Townsend, à Providence (Etats-Unis)

EXPOSITIONS

Grande Bourgeois

LONDRES – Sa longévité exceptionnelle la rapproche de créateurs comme Manoel de Oliveira ou Mario Monicelli, largement nonagénaires. A plus de 95 ans, la « grande dame indigne » de l’art contemporain est encore sur le pont. L’exposition de la Tate Modern a l’ambition de faire le tour d’une œuvre très variée, qui a subi aussi bien l’influence des surréalistes que de Léger (dont elle fut l’élève), du conceptuel que de l’art féministe engagé. Née en France en 1911, Louise Bourgeois a cependant réalisé l’essentiel de sa carrière aux Etats-Unis, où elle s’est installée juste avant la guerre. Elle y fait l’objet d’un véritable culte, surtout depuis la rétrospective de 1982 au MoMA, qui fut la première consacrée à une femme artiste. Des sculptures monumentales en métal (comme l’araignée géante qui inaugura cette même Tate Modern en 2000) aux dessins, des installations aux compositions sexuées à base de latex ou de poupées, le répertoire de Louise Bourgeois défie la classification. Cette présentation, amenée à parcourir le monde et surtout l’Amérique (Centre Pompidou, Guggenheim New York, Los Angeles Museum of Modern Art, Hirshhorn Museum) se veut un peu la rétrospective définitive, avec 200 œuvres dont les plus récentes à base de tissus.

  • Louise Bourgeois à la Tate Modern, du 11 octobre 2007 au 20 janvier 2008

    En savoir plus

  • Courbet, encore scandaleux ?

    PARIS – Beaucoup iront sans doute au Grand Palais pour voir l’Origine du monde même si ce gros plan de l’anatomie féminine est visible depuis quelques années au musée d’Orsay. Ce tableau symbolise aujourd’hui, avec Les Baigneuses, la dimension sulfureuse de Gustave Courbet (1819-1877). En réalité, le vrai scandale, à l’époque, était autre : c’était l’excès de réalisme, de naturalisme - représenter les petites gens dans leur quotidien médiocre, au même degré que les nantis. L’Enterrement à Ornans ou L’Atelier du peintre étaient à cet égard bien plus polémiques. Cette carrière agitée, qui eut pour points cardinaux Paris, le Midi (où résidait son mécène Alfred Bruyas), sa natale vallée de la Loue, dans le Doubs, et la Suisse (où il dut se réfugier après la chute de la Commune, dont il fut partisan), est retracée en 120 tableaux et 30 dessins, trois décennies après la dernière grande rétrospective parisienne. Comme on l’a vu récemment pour d’autres artistes (Maurice Denis, Vuillard), un autre pan de l’activité de Courbet est mis en avant : ses photographies.

  • Courbet, au Galeries nationales du Grand Palais, du 13 octobre 2007 au 28 janvier 2008

    En savoir plus

  • Carriès et ses monstres

    PARIS – Une rétrospective Carriès ? Voilà une opportunité rare de redécouvrir un sculpteur étrange de la seconde moitié du XIXe siècle. Le fait que beaucoup des œuvres exposées soient déjà en dépôt au Petit Palais n’enlève rien à son intérêt puisqu’elle ne sont pas toutes visibles et qu’elles sont ici magnifiées par une œuvre délirante, la Porte monumentale, commandée par la milliardaire Winaretta Singer (la dynastie des machines à coudre). Elle est à Carriès (1848-1894) ce que la Porte de l’Enfer est à Rodin : une œuvre d’art totale, grouillant de centaines de personnages-archétypes. Chez Carriès, ils ont tous plus ou moins l’apparence de monstres, mi-hommes mi-animaux, ridés, grimaçants, avec de grandes oreilles, des becs crochus, des pustules et des cicatrices. Carriès meurt de la tuberculose avant de la finir. Mais ce qu’il en reste montre assez la virtuosité de l’artiste dans le maniement du grès, l’invention de patines inédites à base de jus de prunes, d’ocres vieillis ou d’épluchures macérées. Alors que le monde est à l’aube de l’automobile, des avions et de la machine à laver, Carriès en est encore au temps des alchimistes.

  • Jean Joseph Carriès, la matière de l’étrange au Petit Palais, du 11 octobre 2007 au 27 janvier 2008

    En savoir plus

  • MARCHÉ

    Frieze, acte V

    LONDRES – Il y a quelques années, Frieze était un magazine d’art contemporain, à la diffusion confidentielle. Aujourd’hui, elle est l’une des deux ou trois foires les plus courues du monde : on s’y fait voir (les vernissages se sont imposées comme l’un des événements mondains de la saison) et l’on y fait des affaires. Les 151 galeries admises cette année sont le fruit d’une sélection sévère mais ne devraient pas regretter leur investissement. Friez est très orientée vers le marché anglo-saxon et ne laisse que quelques strapontins aux Français, par ailleurs contraints au grand écart avec une Fiac qui suit dans la roue (le 18 octobre). Parmi les présents, on pourra citer Air de Paris, Chantal Crousel ou Emmanuel Perrotin. Les commandes directes aux artistes sont l’une des originalités de la foire. A côté de la voiture américaine trafiquée par Richard Prince, on pourra voir les productions de Gianni Motti, Elín Hansdottir ou Lara Favaretto. Cette dernière a « invité » la reine à Frieze. Après les remous causés par la séance avec Annie Leibovitz (la photographe demanda à la souveraine d’enlever sa couronne, et les commentaires de la télévision viennent de coûter son poste au directeur de la BBC), voilà une intervention potentiellement explosive…

  • Frieze Art Fair à Regent’s Park, du 11 au 14 octobre 2007

    En savoir plus

  • L’ARTISTE DE LA SEMAINE


    De gauche à droite, Débandade sur la pointe n°1 et Carrément décroché n° 1 Courtesy galerie Aline Vidal

    François Morellet : la géométrie, doux péché

    Dans la grande crise que traverse l’art contemporain français sur la scène internationale, le plasticien de Cholet (né en 1926) est l’un de ceux qui s’exportent le mieux. C’est une star au Japon et les musées allemands le collectionnent depui longtemps. Jusqu’au 16 septembre, une rétrospective au musée d’Art moderne de la Ville de Paris l’a vu jouer avec des œuvres anciennes qu’il a reproduites en les agrandissant. Toujours les mêmes ingrédients dans ses constructions : la ligne, la tige métallique et le

    néon, qui dessinent des motifs géométriques, rythmés par des trames rigoureuses et par le hasard. A la galerie Aline Vidal, Morellet part d’un titre anglais, Senile Lines, qui se lit comme un palindrome (dans les deux sens) et s’amuse à provoquer l’affrontement, sur un même segment de droite, de deux antagonistes invétérés, la ligne et la bande…

  • François Morellet est exposé à la galerie Aline Vidal (70 rue Bonaparte, 75006 Paris) du 4 octobre au 24 novembre 2007

    Le site de la galerie Aline Vidal

  • LIVRES

    La France et ses monuments

    Après dix ans de travaux, la Cité de l’architecture et du patrimoine a enfin vu le jour. Même si elle entend coller à l’actualité de la création architecturale, son socle est ancré dans le XIXe siècle. Il s’agit du musée des Monuments français, œuvre d’Alexandre Lenoir au lendemain de la Révolution, puis du musée de sculpture comparée, inspiré par Viollet-le-Duc, qui occupait à sa création, en 1882, les deux ailes du palais du Trocadéro. Il était conçu comme un répertoire des formes du Moyen Age et de la Renaissance, sauvegardées sous forme de moulages par des artisans émérites. Ceux-ci, de Jean Pouzadoux à Paul Landowski, reçoivent ici un hommage mérité. Sous la direction de Paul Deschamps (de 1937 à 1961), la copie fidèle s’exerce aussi sur les fresques. L’incendie de 1997 a endommagé certaines de ces créations mais a surtout donné l’occasion de refondre le musée. A ceux qui ont été fascinés par la dimension anachronique de son prédécesseur, cet ouvrage offre une promenade nostalgique.

  • Le musée des monuments français, sous la direction de Léon Pressouyre, coédition Cité de l’architecture et du patrimoine / Nicolas Chaudun, 2007, ISBN : 2-35039-030-7, 200 p., 49 €

    Achetez cet ouvrage chez Amazon

  • BRÈVES

    GLASGOW – La Vierge au fuseau , de Léonard de Vinci, volé en 2003 au château de Drumlanrig en Ecosse, vient d’être retrouvé par la police dans les bureaux d’une firme d’avocats.

    Une reproduction du tableau

    MARBACH (Allemagne) – David Chipperfield a remporté l’un des plus prestigieux prix d’architecture (Stirling Prize) avec le Musée de littérature moderne.

    Le bâtiment dans un article du Daily Telegraph

    PARIS – Lors de la Nuit blanche, du 6 au 7 octobre, des vandales ont forcé l’entrée du musée d’Orsay et endommagé un tableau de Monet, Le Pont d’Argenteuil.

    Une reproduction du Pont d'Argenteuil

    PARIS - La Cité nationale de l'histoire de l'immigration a ouvert ses portes le 10 octobre à la Porte Dorée dans l'ancien musée des Arts africains et océaniens.

    En savoir plus

    PARIS – La collection d’Alain Delon est mise en vente le 15 octobre à Drouot-Montaigne sous le marteau de maître Cornette de Saint-Cyr. Elle contient des tableaux significatifs du mouvement Cobra et de l’Ecole de Paris.

    Le catalogue de la vente sur le site de Cornette de Sain-Cyr

    PARIS – Les traditionnels Trois Jours du Quartier Drouot, avec de nombreuses expositions chez les galeristes et antiquaires, sont organisés du 11 au 13 octobre.

    En savoir plus

    PARIS – Le lauréat du prix de la Fondation Ricard, Vincent Lamouroux, est présenté au Centre Pompidou à partir du 16 octobre.

    En savoir plus

    SUR ARTAUJOURDHUI.INFO

    Cette semaine, ne manquez pas

    ODILON REDON. DESSINS DU MUSÉE D'ORSAY

    PARIS - Odilon Redon, qui occupe une place à part dans le mouvement symboliste, était un virtuose du dessin, qu'il déclina sous des formes très diverses. Après les "noirs" des années 1880, il abandonne le fusain pour le pastel et introduit la couleur dans ses compositions.

    En savoir plus