ArtAujourdhui.Hebdo
N° 63 - du 18 octobre 2007 au 24 octobre 2007
L'AIR DU TEMPS
Au secours, Harry Potter arrive !
ROME – Harry Potter était déjà à peu près partout : en librairie, dans les cinémas, sur les T-shirts, les mugs, les cartables d’écoliers et les paquets de céréales. Parmi les seuls espaces encore vierge d’incursions du good boy à lunettes rondes étaient les galeries et les musées. Le miracle – ou l’anomalie selon le parti pour lequel on milite - ne pouvait durer. Voici donc que Harry le conquérant fait son entrée dans le monde de la haute culture. C’est à Rome, à la Casina di Raffaello, ludothèque récemment inaugurée à Villa Borghèse. Cette fois, c’est Serena Riglietti, l’illustratrice italienne de la série, qui est propulsée au rang de star. C’est à elle qu’il est revenu de dessiner le manteau vert du héros et de conduire petits et grands, à travers une forêt feinte, vers la salle de la couleur et la salle des fables, rencontrant au passage Peter Pan ou le magicien d’Oz. Nous n’avons pas de grief particulier contre Harry Potter si ce n’est de l’avoir vraiment trop vu - jusqu’à l’épuisement. Dans cette exposition, qui ouvre la fête du cinéma, ne pouvait-on initier le jeune public à des découvertes plus originales ? Plutôt repêcher Don Camillo ! Ou faire revivre les jeux du cirque ! Pour cela, il reste une issue : foncer jusqu’à Naples. S’y ouvre une rétrospective qui promet d’être passionnante sur Alma-Tadema et la peinture néo-pompéienne.
EXPOSITIONS
Giacometti, côté fondation
PARIS – On sait qu’Alberto Giacometti a privilégié les travaux de petite dimension mais la quantité d’œuvres exposées suscite tout de même l’admiration : environ 600, entre sculptures (200), peintures (60), dessins (170), photographies (190). Ce patrimoine exceptionnel provient pour l’essentiel de la Fondation Alberto et Annette Giacometti dont la gestation a été longue et douloureuse, avec des péripéties judiciaires impliquant Roland Dumas et le commissaire-priseur Jacques Tajan. C’est autour du travail en atelier qu’est organisée la rétrospective du Centre Pompidou. Sont notamment présentés d’inédits fragments de murs de son espace de la rue Hippolyte-Maindron, dans le XIVe arrondissement, qui n’a guère changé depuis la mort de l’artiste en 1966. Un aspect souvent négligé de la postérité des sculpteurs – l’édition de leur œuvre sous forme de bronzes – est aussi évoqué.
Titien, dernier acte
VIENNE - Le vieux Titien n’avait rien à envier à celui des jeunes années, en termes de vitalité et de puissance créatrice. C’est ce que démontre l’exposition du Kunsthistorisches Museum, qui se concentre sur le dernier quart de siècle du maître vénitien, avant sa mort brutale de la peste en 1575, à l’âge de 85 ans. La démonstration est faite en soixante tableaux, d’origines variées. Deux versions de Danaé et trois Vénus, provenant respectivement de Madrid, Vienne, Rome, New York et Washington symbolisent le succès cosmopolite de l’artiste. On y voit aussi le Saint Sébastien de l’Ermitage, Tarquin et Lucrèce (Cambridge) ou le Supplice de Marsyas (Kromeriz). La touche rapide, privilégiant un traitement pré-impressionniste en taches de couleur, fut perçue comme une innovation scandaleuse. Quant au goût pour les nus féminins plantureux, il ne siéyait pas forcément à un vieillard vénérable. Des gravures provenant du fonds de l’Albertina témoignent de la large diffusion qu’avaient à l’époque les motifs les plus populaires de Titien. La visite viennoise sera complétée avec profit par celle d’une rétrospective de même thématique mais in situ puisqu’elle se tient autour de Belluno et Pieve di Cadore, la cité natale de Titien.
Rembrandt, Frans Hals et les autres...
LA HAYE - Après la National Gallery à Londres, le Mauritshuis accueille l'exposition Portraits hollandais du Siècle d'or, l'âge de Rembrandt et Frans Hals. Une trentaine de peintres, une soixantaine de tableaux, à quelques exceptions près les mêmes qu'à Londres. Parmi eux l'éblouissant Portrait de Jan Six par Rembrandt, resté depuis plus de trois siècles dans la famille Six, jamais montré et prêté exceptionnellement, qui à lui seul vaut le voyage. Loin des poses hiératiques ou avantageuses d'hommes en habit noirs, Rembrandt y peint à grandes touches proches de Frans Hals un homme richement vêtu enfilant nonchalamment ses gants. Autour des deux artistes qui dominent le siècle, une pléiade de peintres illustre, avec des oeuvres majeures, la qualité et la variété du genre, portraits individuels, doubles portraits, portraits de groupe, qui marquaent pour les riches marchands les étapes d'une vie. Né dans le contexte particulier de la République bourgeoise des Pays-Bas, l'art du portrait s'internationalise peu à peu et les œuvres de la fin du siècle sont proches de la peinture européenne et anglaise.
Quelques très beaux portraits sont restés dans la collection permanente du Mauritshuis, de L'Enfant de Franz Hals à la Jeune fille à la perle de Vermeer, à voir au premier étage
MARCHÉ
FIAC et environs
PARIS - Face à la concurrence grandissante de la jeune foire londonienne Frieze, qui, cette année encore, va publier des résultats alléchants, la FIAC a été contrainte de montrer plus de dynamisme ces dernières années. Les innovations récentes – retour au Grand Palais, extension du domaine du design, installation d’une antenne dans la cour carrée du Louvre, parcours de sculptures aux Tuileries – sont bien évidemment reconduites. On compte environ 170 galeries dont un nombre enviable de « poids lourds » internationaux, de Cheim & Read à David Zwirner, de Hauser & Wirth à Yvon Lambert. Et la FIAC bénéficie aussi du phénomène classique des foires parallèles, dont le nombre n’atteint pas encore les quantités nébuleuses d’Art Basel Miami. A côté de Slick, très centrée sur la création numérique, et de Show Off, qui propose un cocktail inventif à l’espace Cardin avec conférences, rencontres et jeu de piste à l’intention du jeune public, il faut compter cette année avec l’arrivée des Elysées de l’art, rassemblant une soixantaine de participants le long des Champs-Elysées sous la direction de Baudoin Lebon.
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Sans titre, 2000-2004, table de ping-pong, tiges en inox, balles de ping pong, dimensions variables. Edition de 3 exemplaires. Photo Achim Kukulies. Courtesy Art:Concept, Paris.
Richard Fauguet : vive la vaisselle !
C’est l’un des quatre artistes sélectionnés cette année par le jury du prix Marcel-Duchamp, en compagnie de Taitana Trouvé, Pierre Ardouvin et Adam Adach. Et peut-être celui qui s’en approche le plus par sa façon désinvolte de recycler les produits de notre modernité, qu’il s’agisse de cadenas de vélo, de billes, d’aspirateurs, de vaisselle en pyrex ou des verres Duralex qui ont hanté les cantines scolaires de France et de Navarre, tous objets qu’il réassemble en constructions très architecturées (grâce au silicone) ou qu’il marie de façon désopilante.
Né dans l’Indre en 1963, Richard Fauguet est à la croisée des disciplines, pratiquant le dessin aussi bien que la sculpture même si son fonds est fortement conceptuel : dans ses ombres de sculptures célèbres (au Centre Pompidou pour l’exposition Airs de Paris) ou dans sa table de ping pong criblée de trous de balles, il est toujours un message caché.
LIVRES
Lucien Clergue, au-delà du nu
Pour le grand public, l’affaire est dite : Lucien Clergue est un spécialiste du nu, de ces beaux corps de femmes entre sable et vague, que l’on encadre au-dessus de la cheminée. Le personnage, né en 1934, est bien plus riche que cela, ne serait-ce que parce qu’il est l’un des fondateurs des célèbres Rencontres photographiques d’Arles (sa ville natale), sans doute le festival le plus renommé en la matière. Sous la plume de Gabriel Bauret, on revit les années exaltantes de cette création en 1976 mais aussi ce qui précède : l’apprentissage du développement avec le pâtissier du quartier, la brève carrière de torero, les amitiés avec Picasso et Cocteau. Et les grands thèmes qui ponctuent son œuvre, d’Arles en ruine, au lendemain de la guerre, à la Camargue, des gitans à la corrida. Bref, plusieurs vies en une seule et qui justifiaient bien cette récente élection à l’Académie des beaux-arts…
BRÈVES
BOGOTA – La première édition de la Otra Fiera (« l’Autre Foire ») se tient du 18 au 23 octobre dans un immeuble industriel désaffecté de la capitale colombienne, avec une cinquantaine de galeries locales et latinoaméricaines.
FERRARE – L’antenne italienne du musée de l’Ermitage sera inaugurée le 20 octobre par le président de la République Giorgio Napolitano. Abritée dans le château des Este, elle jouera le rôle decentre d’études et de recherche sur l’art italien du musée russe.
NEW YORK – Après Ariane Dandois, c’est un autre marchand antiquaire français, Bernard Steinitz, qui a choisi de disperser son fonds à New York. La première vente, chez Christie’s, a lieu le 19 octobre.
NEW YORK – L’International Fine Art and Antique Dealers Show se tient du 19 au 25 octobre, à l’Armory.
PARIS – Le salon Artist Book International, consacré aux livres d’artistes, se tient au Centre Pompidou, du 19 au 21 octobre
REYKJAVIK – Le festival de films d’artistes Sequences se tient jusqu’au 21 octobre dans la capitale islandaise.
ROME – Les marchés de Trajan ont été rouverts au public le 18 octobre en même temps qu’était inauguré le musée des Fori Imperiali.
VÉRONE – ArtVerona, foire d’art contemporain, se tient du 18 au 23 octobre.
SUR ARTAUJOURDHUI.INFO
Cette semaine, ne manquez pas
AUTOUR DU GLOBE
BRUXELLES – Dans le cadre d’Europalia, cette rétrospective au Palais des Beaux-Arts raconte, au travers de près de 200 objets exceptionnels, la grande aventure des explorateurs et découvreurs portugais de la Renaissance.
BATEAUX-JOUETS 1850-1950
PARIS – Le Musée national de la marine, qui possède l’une des plus importantes collections au monde de bateaux-jouets, en présente les fleurons, en les resituant dans des ambiances d’époque (ateliers, boutiques, grands magasins).
OTHON FRIESZ, LE FAUVE BAROQUE
LE HAVRE – Après Vlaminck et Dufy, le Musée Malraux rend hommage à un autre enfant du pays, qui fut l’un des grands représentants du mouvement fauve mais dont la production a aussi connu un volet plus classique.