ArtAujourdhui.Hebdo
N° 135 - du 21 mai 2009 au 27 mai 2009
L'AIR DU TEMPS
Piano fortissimo ?
Hier, nous avions les stars du rock et du pop – Bob Dylan, les Beatles, les Rolling Stones – et avant-hier les grandes tragédiennes – Sarah Bernhardt ou Eleonora Duse. Aujourd’hui, nous avons les gagnants de la Star Academy, les coureurs de Formule 1 et… les architectes. A la tête d’agences de plusieurs centaines de personnes, leur célébrité vaut celle des people les plus médiatiques. Prenez Renzo Piano : son étoile n’a pas pâli depuis la construction du Centre Pompidou, qu’il signa avec Richard Rogers en 1977. Il a produit des églises et des aéroports mais le domaine dans lequel il se sent le plus à l’aise, ce sont les musées. Il y a là une concurrence sévère avec Frank Gehry (le Guggenheim Bilbao), Jean Nouvel (le Reina Sofía, le quai Branly) ou encore Herzog & de Meuron (la Tate Modern). Mais Piano plane une coudée au-dessus : la collection Menil, la fondation Beyeler, le centre Paul Klee, le High Museum d’Atlanta, l’Académie des sciences de Californie, le LACMA de Los Angeles… Dernier en date : l’Art Institute de Chicago, dont le nouveau bâtiment de 35 000 m2 a été inauguré le 16 mai. Un grand cube de verre et d’acier, où la lumière afflue à flots. Et l’on attend pour demain les extensions des musées Kimbell, Gardner, Whitney. Un rythme de stakhanoviste…
EXPOSITIONS
Picasso tendance Cézanne
AIX-EN-PROVENCE - En 1958, Picasso dit à l’un de ses galeristes : « Je viens d’acheter la Sainte-Victoire de Cézanne, l’originale ». Il entendait par là l’achat du château de Vauvenargues, qui lui permettait de vivre au plus près du motif emblématique de son maître. Il concluait ainsi plus d’un demi-siècle d’adoration pour le peintre provençal, commencée dès son arrivée à Paris en 1900. L’exposition du musée Granet, qui rêve secrètement d’égaler le succès de « Cézanne en Provence » en 2006, rassemble une centaine d’œuvres des deux hommes – un tiers de Cézanne, deux tiers de Picasso. Elle veut montrer l’étendue du rapport entre les deux artistes : Picasso est marqué par le traitement de l’espace chez Cézanne, par certaines de ses thématiques (Arlequin, les baigneurs, les compotiers) et sera même un collectionneur averti de ses toiles.
Sorolla, grand d’Espagne
MADRID – Le dernier grand maître espagnol, descendant de Vélasquez, Zurbarán et Goya : c’est ainsi que le Prado veut faire apparaître Joaquín Sorolla (1863-1923) auquel il consacre une rétrospective. Peu connu en dehors de ses frontières – bien que de nombreuses institutions étrangères conservent des œuvres de lui comme la Ca’ Pesaro à Venise ou le musée d’Orsay (Retour de la pêche) – le Valencien a excellé aussi bien dans les scènes de plage et de lumière que dans les portraits, suivant un chemin parallèle aux post-impressionnistes. Plus de cent tableaux sont réunis, dont la fameuse série des quatorze panneaux peints pour l’Hispanic Society de New York sur les Visions d’Espagne. Il y a deux ans, la rétrospective Sorolla-Sargent au Petit Palais avait remis à l’honneur le peintre, qui n’avait pas été montré de façon ambitieuse depuis 1963. Aux enchères, il fait partie des artistes les plus cotés de son époque (4,7 millions d’euros en 2001 pour l’Heure du bain). Il ne lui manque que la reconnaissance du grand public.
Beautés d’autrefois
PARIS - Cure-oreille, pomme de senteur ou tête de martre en cristal anti-puces ? A la Renaissance, le trousseau de toilette est démesuré et (à nos yeux) pittoresque. Les soins du corps deviennent un véritable cérémonial, qui intéresse les artisans et les artistes. Les premiers créent flacons, boîtes et peignes, les seconds mettent au point un nouveau type de portrait, nu à mi-corps, de la femme devant son miroir. A Ecouen, les fastes de la beauté à la Renaissance sont évoqués par le nécessaire de toilette du musée de Bâle ou le flacon en or serti d’opales du London Museum. Tableaux, dessins de Jean Mignon et traités de cosmétique complètent la sélection. Le musée de Cluny propose de prolonger le traveling en arrière, jusqu’à l’Antiquité : peignes gothiques, peintures murales de Naples, pyxides contenant encore de la crème à blanchir, le tout accompagné par une étude du Centre de recherche et de restauration des musées de France et de L’Oréal, qui décrit, à l'aide de moniteurs, quelques-uns des 150 produits utilisés à l’époque.
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VENTES
Marceau sous le marteau
PARIS – C’est une star planétaire, il a serré la main des chefs d’Etat, a fait le plein dans les théâtres du monde entier, a été comparé à Charlie Chaplin. Le rideau est tombé, le mime Marceau est mort (en 2007). Son univers resurgit par la bande, dans une vente aux enchères sur décision de justice, pour éponger les dettes de sa compagnie. On y verra défiler les livres qu’il lisait, les meubles et les tableaux qui agémentaient sa maison de Berchères-sur-Vesgres, les photos qui le montrent avec Nehru ou Rudolf Noureev, un automate musical du XIXe siècle, des masques du théâtre japonais. Mais aussi ses costumes de scène, ses dessins au crayon noir (il a commencé ses études aux Arts décoratifs à Limoges). Au total, 700 lots annoncés à des prix très modérés mais que le facteur fétichisme pourrait bien faire enfler.
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Sophie Calle, Les seins miraculeux, 2001 Photographie N/B, aluminium, texte, encadrements (x2) 100 x 170 cm + 50 x 50 cm Remerciements à Jean-Baptiste Mondino © SABAM Belgium 2009 Courtesy Galerie Emmanuel Perrotin, Paris / Miami ; Arndt & Partner, Berlin / Zurich ; Koyanagi, Tokyo ; Gallery Paula Cooper, NY
Sophie Calle : moi et les autres
Elle dévide depuis trois décennies le fil de son autobiographie : chez elle, le conceptuel s’exprime en priorité par ce biais. Qu’il s’agisse de la chronique d’échecs amoureux ou de la vie d’une femme de ménage dans un hôtel vénitien, l’individu Sophie Calle est le premier matériau de l’artiste Sophie Calle. Elle se fait suivre par un détective privé, elle invite des étrangers à dormir dans son lit et note scrupuleusement le fonctionnement de leur sommeil, elle tente de rencontrer toutes les personnes mentionnées dans un carnet d’adresses trouvé dans la rue, elle fait lire la lettre de rupture qu’elle a reçue par 107 femmes différentes (Prenez soin de vous, Biennale de Venise, 2007). Toutes ces performances sont ritualisées et immortalisées par la photographie. Leur contenu étant « banal » - au sens qu’il ne s’agit ni d’exploits ni de mondanités mais de fragments du quotidien -, la vie de Sophie Calle devient celle de quiconque. L’extrême autobiographie rejoint l’extrême anonymat.
LIVRES
Les must de l’art contemporain
Où se fait l’art contemporain ? Dans les ateliers, les galeries, les ventes aux enchères, les salons ? Certainement… mais certains lieux pèsent plus lourd que d’autres. L’auteur, sociologue et journaliste, nous emmène en sept chapitres dans autant de rendez-vous incontournables. Une grande vente chez Sotheby’s, les allées enfiévrées d’Art Basel, les cocktails cosmopolites de la Biennale de Venise… Mais aussi la salle de rédaction d’Artforum ou « l’usine » de l’artiste Murakami, qui a su adopter, comme Jeff Koons ou Damien Hirst, le taylorisme pour répondre aux besoins de ses fans. A priori exempt de copinage, sans langue de bois, riche en propos recueillis (experts, collectionneurs, critiques), le livre décrit une géographie du pouvoir, un univers de paillettes où les « kingmakers » font jongler les dollars par millions et intronisent les artistes stars. Derrière le rideau, 99% des créateurs rêvent d’atteindre ce nirvana. Ou le répudient.
BRÈVES
ATHÈNES – La foire d’art contemporain Art Athina tient sa 15e édition du 21 au 24 mai 2009 dans le pavillon Faliro.
BARCELONE – Le festival Loop, consacré à l’art vidéo, se tient du 21 au 31 mai 2009.
BUENOS AIRES – La foire d’art contemporain Arteba tient sa 18e édition du 22 au 26 mai 2009 dans les pavillons de La Rural.
LONS-LE-SAUNIER – La maison de la Vache qui rit ouvre le 21 mai 2009 dans un bâtiment conçu par les architectes Reichen et Robert. Elle contient une collection importante de boîtes, de films publicitaires et le dessin original de Benjamin Rabier.
LILLE – Dans le cadre de la manifestation Europe XXL, un salon du livre d’artistes est organisé les 21 et 22 mai 2009 dans la gare Saint-Sauveur.
NEW YORK – Le Metropolitan Museum a rouvert le 19 mai 2009 ses galeries d’art américain après deux ans de restauration.
PARIS – La 5e nuit des musées 2009, le samedi 16 mai 2009, a attiré 1,8 million de visiteurs en France.
PARIS – La ministre de la Culture, Christine Albanel, a annoncé le 20 mai la création d’un nouveau lieu de création contemporaine, « d’un genre nouveau » dans les espaces inutilisés du Palais de Tokyo.