ArtAujourdhui.Hebdo
N° 145 - du 1 octobre 2009 au 7 octobre 2009
L'AIR DU TEMPS
La fin des petits musées ?
C’est une bien mauvaise nouvelle que celle qui nous est arrivée de Bruxelles la semaine dernière. Le vol d’un tableau majeur est toujours un événement déplorable. En l’occurrence, c’est une œuvre de Magritte qui a attiré deux intrus armés – Olympia, représentant son épouse Georgette nue. Fût-il intervenu dans un grand musée, l’événement aurait causé une polémique et motivé des investissements en matière de sécurité. Mais il s’est produit dans une institution charmante, aux moyens limités – la maison natale du peintre, à Jette, en banlieue de Bruxelles – qui aura autrement plus de mal à se munir des détecteurs de métal ou des caméras sophistiquées que demande la prévention du vol. Dans la course à la sécurité, les maisons d’artistes, pleines d’atmosphère et de nostalgie, marchent vent debout. Pour exposer sans danger, exposons ce qui n’a pas de valeur ? Demain, le musée sera coffre-fort ou ne sera pas : souhaitons que cette prophétie reste lettre morte.
EXPOSITIONS
Portrait de l’artiste en chef de pub
LONDRES - Titien était célèbre. Warhol aussi. La différence ? Le second avait systématiquement organisé sa notoriété et elle faisait partie intégrale de sa création artistique. C’est cet « esprit pop » que traque la rétrospective de la Tate Modern en convoquant les plasticiens les plus habiles dans la mise en scène de leur propre culte de la personnalité. Elle le fait en remontant des expositions qui ont fait date – et souvent scandale : le Pop Shop de Keith Haring, où l’artiste vendait ses propres produits dérivés, Made in Heaven où Jeff Koons présentait ses ébats érotiques avec Cicciolina, son épouse porno star, ou la performance de Damien Hirst, qui avait installé deux jumeaux sous deux Spot Paintings identiques.
Le retour de Fantin-Latour
MADRID – Il fut l’élève de Courbet, l’ami de Monet et Degas, un technicien hors pair. Pourtant, le nom d’Henri Fantin-Latour (1836-1904) est tombé dans les oubliettes et on ne l’associe plus guère qu’à des portraits de groupe, comme celui où posent tous les peintres des Batignolles. Pas assez militant, il ne lia pas son destin aux impressionnistes en refusant de participer à la première exposition du mouvement. Trop divers, il résiste aux classifications : il est à la fois un portraitiste mondain, l’auteur de scènes mythologiques qui flirtent avec le symbolisme et le dernier héritier des peintres de bodegones à l’espagnole. La rétrospective du musée Thyssen, d‘abord présentée à la fondation Gulbenkian, prouve en 70 œuvres que le discret Fantin-Latour est un maillon essentiel entre tous les mouvements de renouveau pictural de la fin du XIXe siècle.
Les mystères de Teotihuacán
PARIS – Ces immenses pyramides précisément orientées par rapport à la course des astres continuent de fasciner les Occidentaux. L’exposition du musée du quai Branly apporte les dernières réponses sur la vitalité de cette capitale pré-aztèque, à une trentaine de kilomètres de l’actuelle Mexico, symbolisée par ces monuments abandonnés autour de l’année 600. Outre une quinzaine de sculptures de grande taille et des chefs-d’œuvre de l’art décoratif – peintures murales, masques ou objets rituels en mosaïque de turquoise - le visiteur est tenu au courant des dernières découvertes, réalisées lors des fouilles menées sur la pyramide de la Lune entre 1998 et 2004. Au total, 450 pièces issues pour l’essentiel de collections mexicaines (dont celle de Diego Rivera) sont présentées, certaines pour la première fois en Europe.
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VENTES
Ismail Merchant, passeur de cultures
LONDRES - On connaît davantage James Ivory que lui mais l’un était inséparable de l’autre : le producteur Ismail Merchant (1936-2005), originaire de la riche bourgeoisie de Bombay, a constitué avec son compagnon le plus long partenariat créatif de l’histoire du cinéma, matérialisé par des films comme Howard’s End ou Une chambre avec vue et 31 nominations aux Oscars. Son goût pour le métissage culturel se reflète dans sa collection où l’on trouve aussi bien des châles indiens que du mobilier européen ou des tapis orientaux. L’absence d’œuvres de qualité muséale promet des prix abordables (dès quelques centaines d’euros), qui pourraient dépasser la barre des 100 000 euros pour une œuvre du peintre paysagiste hongrois August Schoefft (1809-1888).
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Peter Klasen au pied du Mur
L’artiste allemand Peter Klasen (né en 1935) a porté le flambeau de la Figuration narrative, cousine du Pop Art américain, à côté de confrères comme Arroyo ou Stämpfli. On ne peut cependant le réduire à cette fraternité puisqu’il n’a cessé d’évoluer depuis ces lointaines années soixante, allant jusqu’à utiliser récemment les ressources de l’image numérique pour réaliser des télescopages d’un nouveau genre. D’autres cycles sont originaux dans sa production tel celui consacré au Mur de Berlin deux ans avant sa chute, dans lequel il se penche sur son univers de graffiti. Toujours actif, Peter Klasen a réalisé pour le Tri postal de Lille une installation de grande taille, la Colonie pénitentiaire, inspirée de l’œuvre de Kafka, qui aborde le thème de la torture, déjà traité en 1991 dans Shock Corridor Dead End.
LIVRES
Matisse dans l’intimité
Elle est toute jeune, à peine vingt ans, et gagne 8000 francs bruts par mois. Elle est aide dans l’atelier d’un peintre, lui taille ses crayons, lui sèche ses pinceaux et va lui acheter du papier à motifs pour ses collages. Elle sait aussi faire le ménage ou lui mettre un disque de chant grégorien quand il veut se concentrer. Une existence somme toute assez banale sauf que nous sommes en 1948, entre Vence et Nice et que le peintre s’appelle Henri Matisse. Soixante ans plus tard, Jacqueline Duhême, devenue entre temps illustratrice pour la jeunesse, couche ses souvenirs sur papier. L’ouvrage est à l’intention des enfants mais les anecdotes sur Picasso, cherchant une boîte de sardines pour agrémenter sa soupe de légumes quotidienne, sur Chagall, venu offrir un cactus à son voisin, sur Colette, Aragon ou Tériade sont peut-être encore plus croustillantes pour les adultes. De même que l’éclairage sur la vie quotidienne de Matisse est touchant, de la façon de couper un ananas à la lecture à voix haute de Chateaubriand pour s’endormir…
BRÈVES
MARSEILLE – Le musée Cantini rouvre le 6 octobre 2009 après une campagne de restauration.
NEW YORK – Les peintures murales qui ornaient le hall de l’Empire State Building lors de son inauguration en 1931 et qui étaient cachées depuis les années soixante ont été restaurées et dévoilées au public le 23 septembre dernier.
PARIS – La 8e Nuit blanche se tient à Paris le 3 octobre au soir. Des manifestations similaires se tiennent le même jour à Bruxelles, La Valette, Brescia et Toronto.
PARIS – Les immenses portraits de l’artiste JR, consacrés aux femmes, sont présentés autour de l’île Saint-Louis, sur les ponts, les quais et les bâtiments de la Ville de Paris, du 3 octobre au 2 novembre 2009.
SANTIAGO DU CHILI – La première Triennale du Chili d’art contemporain se tient du 5 octobre au 5 décembre 2009 dans sept villes du pays.
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Cette semaine, ne manquez pas
EUROPALIA.CHINA
BRUXELLES – Europalia, manifestation réunissant des centaines d’événements, est cette année consacrée à la Chine. Outre les concerts, spectacles de danse ou de marionnettes, quatre expositions-phares sont consacrées à la figure de l’empereur, à la calligraphie, à la Route de la soie et à la création contemporaine.
NOS EXPOSITIONS DE L'AUTOMNE 2009 A LONDRES
LONDRES - Outre de grandes rétrospectives sur les cultures lointaines (les Aztèques ou les maharajahs indiens), la capitale anglaise donne la part belle à l’art moderne et contemporain : Auerbach, le Pop Art et Anish Kapoor sont au programme des prochains mois.
NOS EXPOSITIONS DE L'AUTOMNE 2009 A PARIS
PARIS – La morosité ne semble pas toucher les institutions parisiennes : les grandes rétrospectives annoncées pour la rentrée se tiennent comme prévu et permettent de contenter aussi bien les amateurs d'archéologie - qui partiront en voyage vers Byzance ou le Mexique - que ceux de peinture ancienne.