ArtAujourdhui.Hebdo
N° 188 - du 7 octobre 2010 au 13 octobre 2010
Thomas Anshutz, Le midi des forgerons, The Fine Arts Museums of San Francisco, don de Mr et Mme John D. Rockefeller 3rd (exposition Illusions of reality au musée Van Gogh, Amsterdam)
L'AIR DU TEMPS
Hanoi, 1000 ans
Connaître sa date précise de naissance n’est pas donné à toute ville. Hanoi, capitale du Vietnam, se souvient qu’elle fut créée en 1010 lorsque le roi Ly Thai To quitta sa capitale Hoa Lu pour s’y installer. Ce premier millénaire va être fêté en grande pompe à une date dont l’abréviation est toute symbolique : le 10.10.10 (10 octobre 2010). Outre des défilés, des spectacles de marionnettes et des feux d’artifice, disciplines en lesquelles les Vietnamiens sont très compétents, la célébration comprendra l’inauguration du nouveau musée de l’Histoire de Hanoi, dessiné par l’agence allemande GMP dans les nouveaux quartiers soumis à une urbanisation verticale accélérée. La création contemporaine n’est pas absente du programme : en plus de l’immense frise de mosaïque (longue de plusieurs kilomètres) qui décore la digue et sur laquelle ont travaillé de nombreux artistes, on attend beaucoup du happening de Dao Anh Khanh, qui aime mêler la danse, le feu, les acrobaties. Son installation devrait s’étendre sur près d’un kilomètre dans le quartier de Gia Lam : des dizaines de cônes enflammés répliquant la forme du bambou jeune. Pour symboliser, on s’en doute, la vigueur d’une ville qui se développe tous azimuts et que Oncle Ho aurait du mal à reconnaître…
EXPOSITIONS
Chassez le naturalisme…
AMSTERDAM – Léon Lhermitte, Jules Bastien-Lepage, Anders Zorn, Albert Edelfelt ont mal soutenu l’épreuve de la postérité. A la fin du XIXe siècle, ces artistes furent les principaux exposants du naturalisme, qui se proposait de restituer la vie des paysans, des ouvriers et des petites gens avec une exactitude topographique et documentaire, qui les mettait en concurrence directe avec les photographes de la même époque. Largement oubliés, ils sont remis à l’honneur dans cette exposition, qui rappelle justement qu’ils avaient eux-mêmes recours à la photographie comme outil. La désaffection dont ils souffrent tient aussi à la nature de leurs commanditaires : travaillant pour les mairies, les ministères, les pouvoirs publics, leurs œuvres étaient volontiers monumentales voire impossibles à transporter (fresques), ce qui les a éloignés du marché de l’art et du milieu des collectionneurs.
• Illusions of Reality au musée Van Gogh, du 8 octobre 2010 au 16 janvier 2011.
Canaletto, Réception de l'ambassadeur français Jacques–Vincent Languet, Compte de Gergy, au palais des Doges, le 4 novembre 1726, vers 1727, Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg.
Canaletto and Co
LONDRES – Sans Canaletto, Venise aurait-elle eu cette aura de carte postale ? Dès le XVIIIe siècle, les voyageurs britanniques du Grand Tour prennent l’habitude de rapporter des vues de la ville. Les plus aisés peuvent évidemment se permettre des originaux et Giovanni Antonio Canal, dit Canaletto (1697-1768), formé à la décoration théâtrale, réoriente son activité vers cette clientèle. En une cinquantaine de toiles, l’exposition montre ses principaux chefs-d’œuvre (dont la Réception de l’ambassadeur Jacques-Vincent Languet, venu de l’Ermitage) mais aussi la production de ses contemporains (certains morts trop précocement comme Michele Marieschi), de ses prédécesseurs (Vanvitelli, Lucas Carlevarijs) ou de ses successeurs, de son neveu Bellotto, jusqu’à Francesco Guardi. La mort de ce dernier, en 1793, alors que Venise a perdu son indépendance, marque symboliquement la fin du «vedutisme» vénitien et sert de touche finale à l’exposition.
• Venice: Canaletto and its rivals à la National Gallery, du 13 octobre 2010 au 16 janvier 2011
Michel-Ange, Etudes pour la Sibylle libyque (recto), 1511/12, sanguine, Metropolitan Museum of Art, New York © 2007. The Metropolitan Museum of Art/Art Resource/Scala, Florence
Michel-Ange de papier
VIENNE – Il n’est guère aisé de réunir une aussi belle sélection de dessins de Michel-Ange. Ces œuvres sont à la fois fragiles et dispersées en de nombreuses collections publiques et privées. Ces quelque 120 feuilles incluent les plus anciennes que l’on connaisse (les esquisses pour la Bataille de Cascina) et contiennent les travaux préparatoires au Jugement dernier de la chapelle Sixtine, pour finir avec le thème obsessionnel de la Crucifixion, maintes fois repris par l’artiste à la fin de sa vie. Pour fournir des éléments de comparaison, les œuvres de ses disciples comme Daniele da Volterra ou Sebastiano del Pombo sont présentées en contrepoint.
• Michelangelo, the drawings of a genius à l’Albertina, du 8 octobre 2010 au 9 janvier 2011.
Artaujourdhui vous conseille aussi…
• La saga des impressionnistes à Paris est retracée au musée Folkwang à Essen dans Images d’une capitale. Du 2 octobre 2010 au 30 janvier 2011.
• Le Metropolitan Museum de New York consacre une rétrospective au maître flamand Jan Gossaert. Du 6 octobre 2010 au 17 janvier 2011.
• A Pise, le Palazzo Blu explore les mythes méditerranéens dans l’œuvre de Joan Miró. Du 6 octobre 2010 au 23 janvier 2011.
VENTES
L’Amérique en papier peint
Les grandes manufactures historiques seront présentes dans cette vente de tissus, une des spécialités de l’étude Coutau-Bégarie : Réveillon, Tassinari & Chatel, Zuber. De cette dernière maison, un panoramique devrait atteindre un des hauts prix de la vacation : on attend au moins 4500 € de cette vision idyllique du fleuve Hudson et de l’académie militaire de West Point, alors dans sa prime jeunesse (elle a été fondée en 1802 et le papier peint date de 1834). Il faudra de l’espace pour afficher ce Nouveau Monde : les lés se déploient sur plus de 7 mètres. En contrepoint, un cadre européen est curieusement désigné sous l’appellation Eldorado : c’est la quiétude des fleurs au bord d’un lac italien. Il porte la même estimation : qui vaincra de l’Amérique ou de l’Europe ? Pour le reste, sont proposés des papiers peints (notamment des années 1930), en rouleau ou en cahiers d’échantillons, des revues de mode, des études à la gouache, des châles en cachemire, des brocarts et des lampas chinois, de l’organza et de la mousseline… Une caverne d’Ali Baba pratiquant des tarifs plutôt accessibles : les premiers lots d’échangeront à quelques dizaines d’euros.
• Etoffes, costumes, papiers peints anciens à Drouot-Richelieu le 8 octobre 2010 (Coutau-Bégarie SVV).
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Lê Hong Thai : radiographier le Vietnam
Devant sa maison, près de la digue sur le fleuve Rouge, à Hanoï, rouille un vieux camion… recouvert de feuille d’or. C’est ainsi que Lê Hong Thai symbolise l’irruption du nouveau veau d’or dans un pays qui a jeté aux orties l’austérité communiste. Si l’argent coule à flots dans le nouveau Vietnam, les artistes locaux n’en tirent pas vraiment profit : le réseau des collectionneurs est encore balbutiant, la plupart des commandes venant d’acheteurs étrangers. La vie quotidienne, les femmes, les objets ménagers sont les thèmes de prédilection de cet artiste, qui emploie une technique tout à fait personnelle : la laque sur toile, qui exige d’innombrables passages du pinceau. Artiste fin, il a eu maille à partir avec la censure pour avoir représenté un personnage à petite barbiche – un sacrilège ici car immanquablement interprété comme étant Ho Chi Minh. On espère voir prochainement en France ce créateur secret, adepte de kung fu et de bonsaï, qui travaille dans le calme d’une maison montagnarde transplantée en ville : un bon candidat pour le programme d’art contemporain du musée Guimet.
Lê Hong Thai sur le site de la galerie Alicia Blue (Portland, Oregon)
LIVRES
Beau comme un immeuble
On connaît bien (au moins de nom) les architectes de l’entre-deux-guerres et de la reconstruction, puis les stars de la fin du siècle : d’un côté Le Corbusier, Perret ou Mallet-Stevens, de l’autre Portzamparc, Nouvel ou Perrault. Pour ceux qui sont coincés entre ces deux périodes, c’est un peu le purgatoire. Ce livre les en fait provisoirement sortir en s’attaquant à une thématique a priori ardue : l’immeuble parisien de la décennie 1950. Sous forme de dictionnaire, il fait redécouvrir Jean Ginsberg et Jean Dubuisson, et fait comprendre la nouvelle importance décorative de l’allège (espace entre le plancher et la fenêtre), du poteau ou des stores. La question fondamentale du gabarit – jusqu’à quelle hauteur peut-on construire ? – est notamment abordée dans les articles «alignement» et «gradins». Dans le règlement de 1950, le choix de construire haut sans obscurcir des rues étroites a abouti à ce compromis bâtard de surélévations en retrait, qui donne un profil de pyramide au bâti de l’époque…
• Paris 1950, un âge d’or de l’immeuble, par Simon Texier, éditions du pavillon de l’Arsenal, 2010, 27 €. A voir : l’exposition au pavillon de l’Arsenal jusqu’au 7 novembre 2010.
BRÈVES
BERLIN – 105 galeries participent à la foire d’art moderne et contemporain Art Forum, du 7 au 10 octobre 2010.
BERLIN – La 6e édition de la foire d’art contemporain Preview se tient du 8 au 10 octobre 2010 dans l’ancien aéroport de Tempelhof.
GAND – Le STAM, musée de la ville de Gand, est inauguré le 9 octobre 2010.
LJUBLJANA – La 22e biennale du design se tient du 7 octobre au 7 novembre 2010.
LONDRES – Zaha Hadid a remporté le 2 octobre 2010 le prix Stirling d’architecture, décerné par le RIBA (Royal Institute of British Architects), pour le musée Maxxi de Rome, inauguré en juin 2010.
MARRAKECH – La 1e Marrakech Art Fair, foire d’art contemporain, réunit une quarantaire de galeries internationales au palais Es Saadi du 8 au 11 octobre 2010.
MURCIE – Manifesta, biennale européenne d’art contemporain, ouvre le 9 octobre 2010 sa 8e édition dans la région de Murcie et Carthagène.
SAO PAULO – La 29e biennale de São Paulo se tient au parc d’Ibirapuera jusqu’au 12 décembre 2010.
SUR ARTAUJOURDHUI.INFO
Cette semaine, ne manquez pas
MUSÉE DU CINQUANTENAIRE - RÉOUVERTURE DES SALLES SUD-EST ASIATIQUE
BRUXELLES - Depuis le 1er octobre 2010, les collections Sud-Est asiatique du Musée du Cinquantenaire sont à nouveau visibles, aménagées dans cinq salles rénovées et dotées d'une nouvelle scénographie, mettant davantage en valeur les œuvres.