ArtAujourdhui.Hebdo
N° 200 - du 13 janvier 2011 au 19 janvier 2011
La Ville de la Culture à Saint-Jacques de Compostelle par l'architecte Peter Eisenman, inaugurée le 11 janvier 2010. Courtesy Fundación Cidade da Cultura
L'AIR DU TEMPS
200 au compteur…
Avec cette livraison, la newsletter hebdomadaire artaujourdhui.info atteint son 200e numéro. Lancée en avril 2006, elle s’apprête à fêter son 5e anniversaire. Dans un monde toujours plus adepte de l’instantané, sur un internet sans cesse mouvant, ce n’est pas un mauvais score… Deux cents numéros, cela signifie 200 livres chroniqués, 200 ventes aux enchères, quelque 600 expositions détaillées et plus de 1000 «brèves» reflétant la vitalité et la diversité de l’actualité artistique à travers le continent, et au-delà. Rappelez-vous : dans les tout premiers numéros, nous parlions de l’ouverture du musée de l’Ara Pacis à Rome, de la fondation Pinault à Venise, du nouveau musée de l’Orangerie à Paris. Comment, cinq ans déjà ? Toutes ces newsletters, évidemment en accès libre, permettent de jalonner utilement le temps écoulé et de replacer les événements dans une indispensable perspective. Rendez-vous dans 5 ans pour un autre bilan…
ARCHITECTURE
Un nouveau chemin de Saint-Jacques
SAINT-JACQUES-DE-COMPOSTELLE - Des dépassements de délais, des budgets qui explosent, un programme tronqué, un commanditaire (Manuel Fraga) qui fut l’un des ministres de Franco face à un architecte plutôt progressiste (le New-Yorkais Peter Eisenman), qui se trouvera dépossédé d’une partie du projet… Il y aurait de quoi écrire un roman sur la genèse de la Cité de la Culture, qui vient d’être inaugurée en Galice. Malgré tous ces obstacles, les observateurs sont à peu près unanimes à y voir une œuvre appelée à marquer l’architecture contemporaine. Près de 150 000 m2 de surface, des volumes «déconstruits», un profil plutôt surprenant… et un avenir difficile à déchiffrer. La construction continue (seuls deux des six bâtiments – la Bibliothèque et les Archives de la Galice - ont été ouverts) tandis que les coûts, estimés à 100 millions d’euros dans l’appel d’offres, pourraient quintupler à la conclusion des travaux. L’architecture a un faible pour les éléphants blancs…
• La Cidade da Cultura a été inaugurée le 11 janvier 2011.
EXPOSITIONS
Giovanni Segantini, Ave Maria a trasbordo, 1886, huile sur toile, 120 x 93 cm, Musée Segantini, St. Moritz, prêt de longue durée de l’Otto Fischbacher Giovanni Segantini Stiftung © foto flury, Inh., Alfred Lochau, Pontresina
Segantini : toujours plus haut
BÂLE – Il a commencé au bord du lac de Garde et il a fini à près de 3000 mètres d’altitude (à 2731 m exactement) à l’âge de 41 ans, en 1899, alors qu’il travaillait à un triptyque sur les sommets de l’Engadine, en Suisse. La fondation Beyeler rend hommage à un maître bien méconnu aujourd’hui : Giovanni Segantini, fou de montagne, célèbre en son temps et maître de Giovanni Giacometti, le père d’Alberto. En une cinquantaine de tableaux, l’exposition fait le tour de sa production : quelques portraits, réalisés pendant sa jeunesse à l’académie de Brera (à Milan) et en Brianza, le district lombard spécialisé dans la manufacture de meubles (où travaillait son beau-frère Carlo Bugatti), mais surtout des paysages, traités selon une technique divisionniste, dans des coloris toujours plus clairs et lumineux. Frugal, atteignant au mysticisme dans sa passion, Segantini est l’un des grands interprètes des Alpes. Jusqu’à la mort : atteint d’une péritonite dans son refuge, il est trop loin des secours pour être soigné et succombe face à ses pics chéris.
• Giovanni Segantini à la fondation Beyeler, du 16 janvier au 25 avril 2011
Chez les Farnèse
ROME - On oublie un peu vite que ce n’est pas la première fois que la fastueuse collection de la famille Farnèse, riche en capitaines, papes et cardinaux, est reconstituée. On en avait vu un superbe échantillon en 1995, dans un lieu puissamment évocateur : le palais Farnèse de Colorno, près de Parme. Mais il est vrai que l’occasion est particulière : pour la première fois depuis sa dispersion, cette évocation se fait dans le lieu d’origine, le palais Farnèse de Rome, dessiné par Michel-Ange et devenu depuis ambassade de France. Outre les quelque 150 chefs-d’œuvre qui ont fait le voyage (certains de tout près comme les tapisseries du Quirinal, beaucoup de Naples comme le Taureau Farnèse ou le Portrait de Paul III par Titien), ce sera pour les visiteurs l’occasion de voir les décorations in situ, notamment la célèbre Galerie des Carrache.
• Palais Farnèse, de la Renaissance à l’ambassade de France au palais Farnèse jusqu’au 17 avril 2010.
Ces expositions ouvrent également…
• La Fondation Cartier-Bresson présente un photographe sud-africain de premier plan, David Goldblatt a qui documenté les derniers temps de l’apartheid et la transition difficile vers une nouvelle façon de vivre ensemble. Du 12 janvier au 17 avril 2011.
• Le Musée d’art moderne de la Ville de Paris consacre une exposition monographique à Inci Eviner, une artiste engagée de la scène stambouliote. Du 13 janvier au 3 avril 2011.
• Ecrins impériaux, au Musée national de la Légion d’Honneur, retrace l’histoire napoléonienne à travers se principales décorations. Du 19 janvier au 29 mai 2011.
L'ARTISTE DE LA SEMAINE
Anne Brégeaut, Pan !, 2010, gouache sur papier; 80 x 120 cm, signé et daté au dos. Courtesy Semiose galerie, Paris.
Anne Brégeaut : hier en couleurs vives
A mi-chemin entre le conceptuel et l’art figuratif (qui n’ont évidemment pas vocation à s’opposer systématiquement), Anne Brégeaut peut aussi bien construire des petits reliefs en bois, exposer une tasse cassée et recollée que dessiner avec talents des scènes pleines de couleurs ou des planches de motifs abstraits. Un client difficile pour les taxinomistes… S’il fallait trouver un lien à ces expressions aussi diverses, ce serait la toute-puissance du passé, qui est décortiqué comme une émotion intense, comme une blessure pas toujours cicatrisée. Ces Petits Paysages oubliés, qui portent sur leurs roulettes de vertes forêts enfantines, ces gouaches sur bois ou sur papier, qui se peuplent d’amoureux, de lions, de voitures roses, perdues dans des jungles de papier peint, font immanquablement penser à un autrefois idéal, source de nostalgie permanente.
• La galerie Semiose, qui vient de changer d’adresse (54 rue Chapon, 75003) expose Anne Brégeaut du 8 janvier au 26 février 2011.
VENTES
Lot 229, Paz & Silva ( ?), exceptionnel modèle de radiateur à 4 lampes, de forme éventail en laiton estampé et verni avec gravures de scènes érotiques. Provenant de l'ancienne maison close Le Chabanais à Paris. Début des années 1900. Estimé 1900-3000 €
Percolateur et chauffe-bigoudis de Mamie…
PARIS - On se plaint souvent de l’insuffisance des ventes thématiques à Drouot. Voici l’occasion de démentir cette réalité : l’ensemble qui passe au marteau le 24 janvier 2010, fruit des recherches d’un passionné, Jacques Le Breton, ne porte que sur les objets électro-ménagers des années vingt au années soixante. Ce qui était considéré comme de simples outils de la vie quotidienne a été anobli par le temps et accède au statut de pièces de design « vintage ». A côté du ventilateur Calor «Soleil», des plaques chauffantes en bakélite, des percolateurs en laiton nickelé, on redécouvrira les radiateurs Toilectro, qui ressemblent à des temples grecs, ou les théières Goblin à système basculant. Tous les lots sont accessibles à quelques dizaines ou centaines d‘euros, à quelques exceptions près comme ce chauffe-bigoudis Perma (estimé 600 €), ce shaker à double moteur provenant du café de Flore (estimé 1500 €) ou ce radiateur de l’ancienne maison close Le Chabanais (3000 €) ! A l’heure de l’iPod et du Blackberry, certains de ses objets sont si énigmatiques (est-ce une radio, un poêle, un four, un projecteur ?) que les non avertis auront parfois du mal à déterminer leur fonction. Dommage que le catalogue en ligne laisse planer le mystère…
• Vente La maison électrique à Drouot-Richelieu le 14 janvier 2011 (Chayette Cheval SVV et Enchères Pays de Loire SVV)
LIVRES
Maïakovski : vivre vite
Une tranche de vie exaltante pour bien commencer l’année ? Ce pourrait être celle de Maïakovski, qui fait l’objet d’une monographie riche et largement illustrée. On y révise ce que l’on sait sur le poète, révolutionnaire du vers et chantre de la vitesse, cousin des futuristes. Mais l’on y découvre que l’auteur du Nuage en pantalon fut aussi actif dans d’autres domaines, se muant à l’occasion en typographe, cinéaste ou dessinateur. Au temps de la Révolution, grand creuset créatif, les frontières entre les arts sont gommées et toutes les disciplines s’interpénètrent. Si la biographie décrit son œuvre littéraire et fait le tour de la petite histoire (Maïakovski accusé par Gorki de transmettre la syphilis à une jeune fille, les triangles amoureux entre Lily Brik, lui et d’autres conquêtes), elle montre aussi l’extraordinaire soif de rencontre avec des acteurs de la culture européenne, notamment dans les arts plastiques : Rodchenko, Gontcharova, les Delaunay, Man Ray et Duchamp qu’il rencontrait dans les escaliers de l’hôtel Istria à Paris. Si Maïakovski est mort jeune (après Essenine en 1925, il se suicide lui-même à 37 ans en 1930), on a l’impression qu’il a eu le temps de vivre plusieurs vies…
• La vie en jeu, une biographie de Vladimir Maïakovski par Bengt Jangfeldt, Albin Michel, 2009, 25 €.
BRÈVES
HONG KONG – Larry Gagosian ajoute une nouvelle étoile à sa galaxie : il inaugure le 18 janvier 2011 sa galerie de Hong Kong avec un nouveau crâne en diamants de Damien Hirst.
LE CAIRE – Le Conseil suprême des antiquités égyptiennes a annoncé le fermeture prochaine de la tombe de Toutankhamon et la création d’une Vallée des Répliques.
LONDRES – La 23e édition de la London Art Fair, consacrée à l’art moderne et contemporain, accueille 120 galeries du 19 au 23 janvier 2011.
LOS ANGELES – Le salon de photographie Photo LA se tient du 13 au 17 janvier 2011.
SAINT-PETERSBOURG (Floride) – Le Salvador Dali Museum a ouvert le 11 janvier 2011 dans un nouveau bâtiment.
SINGAPOUR – Art Stage, nouvelle foire d’art contemporain, se tient du 12 au 16 janvier 2011.
WASHINGTON – La Phillips Collection, réputée pour ses collections de peinture française, rouvre le 15 janvier 2011, quatre mois après l'incendie qui avait endommagé le bâtiment.