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N° 203 - du 3 février 2011 au 9 février 2011


Henriette Zéphir, Sans titre, 1966, stylo bille, crayon de couleur et encre de Chine sur papier plastifié, 47 x 62 cm. Courtesy galerie Christian Berst, Paris.

L'AIR DU TEMPS

Moubarak contre les momies

Qu’elles soient inspirées ou non par des sentiments légitimes, les révolutions sont rarement tendres avec les trésors du patrimoine. On se souvient évidemment des bouddhas de Bamyan et du sac du musée de Bagdad, un peu moins des tombes royales de Kasubi, en Ouganda : dans chaque cas, il a suffi de quelques heures pour que des chefs-d’œuvre soient définitivement éparpillés ou réduits en miettes. Une exposition à venir, au château de Versailles (21 février), nous rappelle qu’il ne subsiste qu’un seul trône de l’Ancien Régime français : celui que les Foliot dessinèrent, au temps de Louis XVI, pour l’ambassade de France à Londres ! Certes, il est toujours délicat de s’inquiéter pour les momies des pharaons lorsque des jeunes perdent la vie dans les affrontements. Mais il serait dommage que la révolte contre Moubarak se retourne contre Toutankhamon, dont il n’est, après tout, qu’un descendant putatif, et contre l’extraordinaire musée des Antiquités du Caire. Si la jeunesse d’Egypte a besoin de sa liberté, elle a aussi besoin de son histoire…

Une vidéo d’Al Jazeera sur les dommages au musée des Antiquités du Caire

EXPOSITIONS


Théophile-Alexandre Steinlen, Passé la mi-carême, parue dans Le Rire, Musée de Montmartre, Paris. © S.Pons

Daumier et Toulouse-Lautrec, même combat

EVIAN – Des artistes attachés à croquer le quotidien et les travers de leurs contemporains : c’est ce qui relie Daumier, Toulouse-Lautrec et le nettement moins connu Steinlen. Le premier était actif dès les années 1820, le troisième a travaillé jusqu’à sa mort en 1923. A eux trois, ils ont donc documenté un siècle de vie parisienne, les petits métiers et les scandales politiques, la Butte Montmartre et les grands boulevards, les soupentes humides et le Moulin Rouge. L’exposition est divisée en deux parties tout à fait logiques. « Le jour » présente la gouaille de la rue et des cafés. « La nuit » s’enfonce dans le règne des théâtres et des maisons closes. Outre les quelque 200 huiles et dessins, l’exposition montre une ample sélection de revues d’époque, du Charivari à L’Assiette au beurre : à l’heure où la presse écrite devient un véritable contre-pouvoir, ses illustrateurs ont le statut de véritables stars.
Daumier, Steinlen, Toulouse-Lautrec, la vie au quotidien au Palais Lumière, du 5 février au 8 mai 2011.

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Melozzo da Forlì, Ange musicien, fresque détachée et marouflée sur cadorite, cm 110 x 78 x 5. COurtesy Musei San Domenico, Forlì.

Melozzo, pionnier oublié

FORLI – Ville d’Emilie-Romagne, Forli est éventuellement connue à l’étranger pour ses liens avec Mussolini : le dictateur est né dans la province. Mais qui citera Melozzo (1438-1494) ? Aimable peintre de la seconde moitié du XVe siècle, il est le lien idéal entre Piero della Francesco et Raphaël. Du premier et de Mantegna, il apprend la science de la perspective. Au second, il lègue l’art de la composition et des couleurs douces. Melozzo est célébré dans sa ville natale avec une exposition ambitieuse qui réunit certains de ses chefs-d’œuvre - inégalables têtes d’anges et d’humanistes - mais également ceux de ses compagnons de route. On y verra notamment la célébrissime Madonna Senigallia de Piero della Francesca. La plupart des compositions « mobiles » de Melozzo da Forli sont présentes, et même son chef-d’œuvre, le cycle de fresques romain des Santi Apostoli, aujourd’hui démembré entre le Quirinal et les musées du Vatican.
Melozzo da Forli aux musei San Domenico, du 29 janvier au 12 juin 2011

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Lucas Cranach, Salomé avec la tête d'Holopherne. © Museum des Beaux Arts, Budapest.

Cranach, stakhanoviste de la Réforme

PARIS – Il a été montré à Bruxelles, et parallèlement à Rome. Mais son escale parisienne est un événement encore plus spectaculaire : en effet, l’arrivée de Cranach l’Ancien, le portraitiste de Luther et des chefs de la Réforme, (plusieurs dizaines de représentations) mais aussi auteur de nus que leur vocation symbolique (Lucrèce, la Justice, Vénus) protège de l’accusation d’érotisme, coïncide avec la réouverture du musée du Luxembourg. Après un an d’éclipse, l’institution accolée au Sénat s’inscrit de nouveau dans le panorama parisien. Protégé de Frédéric le Sage, le prince électeur de Saxe, Cranach (1472-1553), qui mènera des missions diplomatiques, sera surtout à la tête d’un atelier extrêmement productif, plus tard repris par son fils. En sortiront des allégories, des portraits produits en série, des gravures qui feront le tour de l’Europe et marqueront durablement les générations suivantes.
Cranach l’Ancien au musée du Luxembourg du 9 février au 23 mai 2011.

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Ces expositions ouvrent également cette semaine…

• A New York, le Metropolitan Museum propose une analyse exhaustive des différentes versions des Joueurs de cartes de Cézanne.Du 9 février au 8 mai 2011.

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• A Paris, le musée de la Marine fête le 50e anniversaire du lancement du paquebot France en consacrant une rétrospective au célèbre transatlantique. Du 8 février au 23 octobre 2011.

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• L’Albertina de Vienne présente une sélection de dessins du mouvement Blaue Reiter, provenant de la collection de Gabriele Münter, compagne de Kandinsky, donnée au Lenbachhaus de Munich. Du 4 février au 20 mai 2011.

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VENTES

Affaires de fer

PARIS - Nous avions mentionné la précédente vente (dans notre newsletter du 10 mars 2010) de cette collection démesurée sur le fildu fer forgé. En voici une nouvelle édition, issue des fonds inépuisables de Michel Rullier. On y trouvera des objets tout simples de la vie quotidienne – tire-bouchons, moulins à café, fourchettes à griller – des XVIII et XIXe siècles, qui valent certes dix fois plus cher que leurs homologues contemporains mais dont la durée de vie est également proportionnelle. Parmi les curiosités moins usitées aujourd’hui, des fouchettes pliantes du XVIIe siècle, des casse-sucre (du temps que ce dernier n’était pas en poudre…), un étui à lunettes en fer damasquiné d’argent (lot 101, 1500 €). Et une impressionnante brochette de 31 mortiers en bronze, classées par années, de 1480 à 1773 (lots 66 à 96, pouvant monter à 6 000 €). Pour les indécis, il restera les clés – de maîtrise, d’accordeur, de cadenas -, les heurtoirs, les serrures et les pilons…
Collection Michel Rullier, 3e vente à Richelieu-Drouot, le 9 février 2011

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L’ARTISTE DE LA SEMAINE

Henriette Zéphir, matriarche de l’art brut

PARIS - Au printemps 1967, Jean Dubuffet organisait au musée des Arts décoratifs, à Paris, une exposition d’art brut – un concept qu’il avait défini dès 1945 comme une production artistique d’un caractère « spontané et forcément inventif », aussi loin que possible des « poncifs de l’art classique ou de l’art à la mode ». Cinquante-quatre ans plus tard, l’un des créateurs exposés est encore vivant : Henriette Zéphir (née en 1920), dont l’univers plonge dans l’occulte et le mystérieux. Inspirée par un « guide », Madame Zéphir devient médium et son stylo bille remplit la page d’efflorescences et d’indentations, dentelles végétales ou minérales qu’elle colore ou laisse noires, comme les animalcules d’Odilon Redon.
• Henriette Zéphir à la galerie Christian Berst (3-5 passage des Gravilliers, 75003 Paris), du 4 février au 5 mars 2011.

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LIVRES

Vue de l’intérieur sur l’Empire du Milieu

Robert van der Hilst est hollandais et ne parle pas mandarin. Pourtant, ses images d’intérieurs chinois parlent vrai. Son préfacier, Yu Hua, auteur du roman Brothers et chef de file de la nouvelle littérature, en est convaincu. Depuis 2004, van der Hilst passe la moitié de son temps en Chine. Il en parcourt les villes principales et les provinces les plus éloignées pour rencontrer les habitants et capter ce que la croissance économique effrénée bouleverse plus vite qu’ailleurs : le lieu de vie. Lofts de stylistes à Shanghai, appartements traditionnels avec cabine de douche en plastique ou cabanes misérables du Sichuan : la diversité du pays est à l’image de sa population démesurée. Les vieux chromos de Mao voisinent avec du design italien, les bouilloires de fer blanc et les sols de terre battue avec des écrans plats. Promenade sociologique, le livre peut aussi se lire comme une belle galerie de portraits et de natures mortes.
Intérieurs chinois photographies de Robert van der Hilst, Gallimard, 2010, 280 p., 42 €.

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BRÈVES

Le Google Art Project, lancé le 1er février 2011, permet de découvrir de très près les chefs-d’œuvre de certains des plus grands musées du monde. Un projet concurrent, celui du portail Europeana, annonce avoir déjà numérisé 16 millions d'objets du patrimoine européen.

Google Art Project

INNSBRUCK - Art Innsbruck, foire d'art moderne et contemporain, se tient du 3 au 6 février 2011.

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LUXEMBOURG - Art and Antiques Fair, salon consacré aux collectionneurs d'objets et œuvres d'art, se tient du 4 au 7 février 2011.

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NEW YORK - Une Sacra Conversazione de Titien a atteint 15 millions $ chez Sotheby's le 27 janvier 2011, établissant un nouveau record pour l'artiste aux enchères. Lors de la même vente, une Vue de rivage par Joseph Vernet a atteint 6,2 millions $, multipliant par le précédent record pour le peintre.

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PARIS - Le Musée d'Orsay vient de recevoir la donation, sous réserve d'usufruit, d'un ensemble nabi remarquable : 141 œuvres de Bonnard et 27 de Vuillard.

Deux images de la collection sur le site La Tribune de l'art

PARIS - Le jeune collectif Rhézome présente jusqu'au 28 février Night on Earth dans l'un des endroits les plus insolites de Paris, la Galerie Museum, parmi les boutiques de la cour d'arrivée de la gare d'Austerlitz...

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SUR ARTAUJOURDHUI.INFO

Cette semaine, ne manquez pas…

PORTRAITS DE CHAUSSURES - HISTOIRES DE PIEDS

ROMANS - Le Musée international de la chaussure retrace une histoire des rapports entre art de la chaussure et art contemporain. Une soixantaine de chaussures sont mises en vis-à-vis avec des tableaux, vidéos ou sculptures de Dominique Torrente à Cyril Hatt.

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