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N° 251 - du 15 mars 2012 au 21 mars 2012


Artemisia Gentileschi, Danaë, c.1612 Huile sur cuivre, 41,3 x 52,7 cm. Saint Louis, The Saint Louis Art Museum © Saint Louis, The Saint Louis Art Museum (exposition au musée Maillol, Paris).

L'AIR DU TEMPS

Artemisia, wonder woman baroque

Le calendrier semble avoir été mûrement pensé : Artemisia Gentileschi (1593-1652), cet emblème du féminisme en peinture, forte femme qui sut tracer sa route malgré les jalousies de ses collègues et un viol de jeunesse, est fêtée juste après ce 8 mars, reconnu jour de la femme par l’ONU depuis 1977. Déjà objet d’un film (par Agnès Merlet en 1997), Artemisia Gentileschi fait partie des icônes qui ont transcendé leur temps – on ne peut guère lui comparer dans le registre des pasionarias de l’art que Frida Kahlo ou Camille Claudel. A côté des héroïnes bibliques qui surent s’y prendre avec les hommes – Judith, Dalila ou Bethsabée – Artemisia a aussi dépeint de plus douces figures de musiciennes ou de penseuses. Dans la rétrospective, elle est accompagnée de chevaliers-servants qui occupent la seconde place du podium – son propre père Orazio, Simon Vouet, Massimo Stanzione ou Bernardo Cavallino. Mais pas son violeur, Agostino Tassi, déjà voué aux galères à l’époque et que le jugement de l’histoire a condamné une seconde fois : inconnu du grand public, il pèse cinq fois moins que sa victime en termes de transactions sur le marché de l’art…
Artemisia Gentileschi au musée Maillol, du 14 mars au 15 juillet 2012.

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LES EXPOSITIONS QUI OUVRENT


Betye Saar, The Phrenologer’s Window, 1966, panneaux de bois. Private Collection; courtesy of Michael Rosenfeld Gallery, LLC, New York, NY © Betye Saar

La West Coast version féminine

BERLIN - Quel était l’élément féminin dans les mouvements d’avant-garde de la côte Ouest ? C’est un filtre intéressant à appliquer à l’exposition « Pacific Standard Time », qui arrive en Europe tout auréolée de son succès en Californie (en version réduite puisque présentée sur un seul site et non dans des dizaines de lieux). Qu’il s’agisse de performances pour protester contre la guerre du Vietnam (Suzanne Lacy et Leslie Labowitz-Starus), de la vitalité des campus comme foyers de création (avec Martha Rosler à San Diego) ou même de l’engagement de collectionneuses audacieuses (à l’image de Betty Asher), une histoire de l’art dans l’Amérique de l’après-guerre ne peut décidément plus s’écrire au masculin. Que les machistes se rassurent : de John Baldessari à Richard Diebenkorn, en passant par Bruce Naumann et Edward Kienholz, il leur reste de la matière…
Pacific Standard Time, Art in Los Angeles 1950-1980 au Martin-Gropius Bau, du 15 mars au 10 juin 2012.

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• BERNE - Le minimaliste Sean Scully, connu pour ses bandes de couleurs, fait l'objet au Kunstmuseum d'une rétrospective de près de soixante grands formats. Du 9 mars au 29 juin 2012.

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• FERRARE - Joaquín Sorolla, marqué par les impressionnistes, est devenu l'un des plus grands paysagistes et portraitistes espagnols, comme le prouve la rétrospective du Palazzo dei Diamanti. Du 17 mars au 17 juin 2012.

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• LUGANO - La carrière de Giorgio Morandi est présentée au Museo d'Arte, et enrichie par des confrontations avec des artistes contemporains comme les Becher ou Rachel Whiteread. Du 10 mars au 1er juillet 2012.

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• MILAN - L'artiste sud-africaine Marlene Dumas (née en 1953) présente une vingtaine d'œuvres récentes à la Fondazione Stelline. Du 13 mars au 17 juin 2012.

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• ROVERETO - Le Mart explore la carrière de Gina Pane (1939-1990), pionnière du body art. Du 17 mars au 8 juillet 2012.

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SALONS


Duane Hanson, Young Shopper, 1973. Résine de polyester et fibre de verre, polychromie à l'huile, techniques mixtes et accessoires, grandeur nature. Van de Weghe Fine Art.

TEFAF pour happy few

MAASTRICHT - Chaque année, les chiffres tombent comme autant de records et chaque année les articles se ressemblent… Pour cette édition du jubilé, 260 galeries, 18 pays, 175 experts chargés de veiller à la qualité de la marchandise exposée, 640 pages dans le catalogue, plus de 70 000 visiteurs attendus. Pas d’inflation sur le prix d’entrée : 55 € l’entrée (avec un tarif « jeunes » à 20 €). Née en 1975 sous la forme d’une petite Pictura Fine Art Fair, la manifestation, qui a pris le nom peu harmonieux de TEFAF (The European Fine Art Fair) en 1988, affiche une santé insolente. Ici, les affres financières de la Grèce, les difficultés des jeunes galeristes ou la lutte quotidienne des surintendants de Pompéi pour sauver leur patrimoine croulant – bref, tout ce qui fait l’actualité du monde -, n’arrivent que comme les échos assourdis d’une tempête lointaine. L’art le plus exclusif semble être superbement immunisé contre la crise. En revanche, en termes de parité, TEFAF n’est pas en pointe : parmi les six exposants du Showcase, une section censée représenter les jeunes galeries en pleine ascension, une seule, Didier Antiques de Londres, a une direction mixte…
TEFAF à Maastricht, du 16 au 25 mars 2012

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VENTES


Lot n°76, Repose toi ma soeur ton coeur est déjà feuille, 1972, technique mixte sur toile signée, titrée et datée au dos (accidents et manques). 47 x 62 cm. Courtesy Yann Le Mouel, Paris.

Gagnaire, femme surréaliste

PARIS - Comment une artiste ayant connu une carrière tout à fait honorable (qui culmina avec une participation à la Biennale de Venise 1986 à l’invitation d’Arturo Schwartz, personnage emblématique du surréalisme italien, collectionneur, galeriste et ami de Breton) peut-elle valoir si peu aux enchères ? C’est la question qui se pose à l’heure où le fonds d’atelier d’Aligne Gagnaire (1912-1997) est mis à l’encan. Sa cote sur artprice n’atteint pas même 1000 euros… Elle a pourtant associé son nom à certaines aventures du mouvement, participant en temps de guerre à la Main à plume, publication qui rassembla des personnalités aussi diverses que Dotremont, Eluard, Léo Malet, Maurice Nadeau et Gérard Vulliamy (autre grand oublié actuellement redécouvert dans une exposition à Besançon) ou à l’Oupeinpo (Ouvroir de peinture potentielle). Ses pictogrammes qui rappellent Michaux, ses toiles chiffonnées qui ont quelque chose de Kijno, ses reliefs blancs très épurés et ses collages ont quelque chose de sincère qui devrait attirer les collectionneurs intéressés par l’époque.
Atelier d’Aline Gagnaire le 19 mars 2012 à Drouot-Richelieu (SVV Yann Le Mouel).

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LIVRES

Collectionneurs et… collectionneuses

Qu’est-ce qui pousse un individu à constituer une collection ? Sur le modèle de son précédent ouvrage sur les galeristes, Anne Martin-Fugier mène l’enquête sous forme de dialogues avec quelques cobayes choisis. C’est ainsi au lecteur de formuler ses propres conclusions, à partir de cas personnels, d’Antoine de Galbert, fondateur de la Maison rouge, à Gilles Fuchs, dirigeant de la maison Nina Ricci, qui profitait de tous ses déplacements pour fréquenter galeristes et ateliers, et qui deviendra l’âme du prix Marcel-Duchamp. Nous ne sommes plus au temps d’Artemisia : le rôle des femmes est ici essentiel, comme l’enseignent les cas de Florence (avec Daniel) Guerlain ou de Françoise (avec Jean-Philippe Billarant), qui pèsent de toute leur moitié dans le processus d’acquisition. L’ouvrage est nourri de nombreuses anecdotes, parfois tragiques (les tableaux de Claude et Micheline Renard serviront à financer les opérations de leur fille blessée par une bombe de l’OAS) et de jugements inhabituellement tranchants sur des acteurs du marché (le peintre Barthélémy Toguo, Liliane Durand-Dessert, etc.). Il montre qu’être collectionneur, ce n’est pas forcément avoir beaucoup d’argent et suivre le marché mais plutôt faire des rencontres et obéir à ses passions.
Collectionneurs, par Anne Martin-Fugier, Actes Sud, 2012, 304 p., 22 €.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE