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N° 336 - du 27 février 2014 au 5 mars 2014


Michel Giniès, L’acteur Robert Redford, en compagnie de Costa-Gavras, à la sortie du restaurant Lapérouse, Paris, septembre 1976 (exposition Paparazzi au Centre Pompidou Metz)

L'AIR DU TEMPS

Paparazzi, métier d'avenir

METZ – Voilà une profession qui ne semble pas connaître la crise – la récente une de Closer sur le président Hollande à scooter en est la preuve. C’est La Dolce Vita de Fellini, inspirée en partie de la figure de Tazio Secchiaroli, qui a donné aux paparazzi leur gloire définitive et leur appellation (Paparazzo étant le nom d’un jeune photographe dans le film). L’exposition montrer quelques prémices, comme la photo de Bismarck sur son lit de mort (en 1898), celle d’Erich Salomon croquant Aristide Briand et autres hommes d’Etat en 1931 ou les instantanés new-yorkaiss de Weegee. Mais elle ne peut réellement débuter qu’avec les progrès techniques des années 50 et 60 notamment dans le domaine des zooms et de la sensibilité des pellicules. Les paparazzi deviennent alors un sous-produit de la culture de la célébrité et leurs cibles préférées méritent dans le parcours des sections entières - Liz, Brigitte, Jackie, Caroline, Diana… Les praticiens actuels – Rostain, Apesteguy, Angeli – sont interrogés et l’intérêt du discours est de montrer comment l’esthétique paparazzi (images volées, instants décisifs, intrusion dans l’intimité), a marqué des pans entiers de la création, de la mode au cinéma, de l’édition à l’art contemporain.
Paparazzi, stars et artistes au Centre Pompidou, du 26 février au 9 juin 2014.

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EXPOSITIONS


Barbara Ker-Seymer, Portrait de Nancy Cunard © The Estate of Barbara Ker-Seymer

Nancy Cunard, une égérie oubliée

PARIS – Sa vie se lit comme un roman. Riche héritière anglo-américaine (par son père, des célèbres lignes de navigation Cunard, par sa mère de l’aristocratie d’affaires de la côte Ouest), elle rompt avec son milieu pour mener une existence bohème, qui en fera l’amante d’Aragon et de Pablo Neruda. Mais cette chronique mondaine n’aurait pas suffi à assurer sa célébrité : Nancy Cunard (1896-1965) a surtout été une promotrice des avant-gardes artistiques du XXe siècle, imprimant sur sa presse manuelle les premières œuvres de Beckett ou le célèbre poème Spain d’Auden ou défendant L’Âge d’or de Dalí et Buñuel, lors d’homériques projections à Londres. L’exposition est cependant centrée sur une autre facette de Nancy Cunard : son engagement dans la cause noire en Amérique. Se matérialisant par sa relation « scandaleuse » avec le musicien Henry Crowder, elle s’exprimera aussi et surtout dans l’édition d’un ouvrage unique, The Negro Anthology, publié en 1934.
Nancy Cunard, l’Atlantique noir au musée du quai Branly, du 4 mars au 18 mai 2014.

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Emil Nolde, Mme T. avec un collier rouge, 1930, aquarelle sur papier, 47,9 x 35,5 cm © Nolde Stiftung Seebüll

Nolde et les tempêtes du XXe siècle

FRANCFORT– Sa longue vie (près de 90 ans, de 1867 à 1956) permirent à Emil Nolde d’être contemporain de toutes les avant-gardes, de l’impressionnisme jusqu’à l’abstraction lyrique, en passant par le cubisme, le surréalisme et l’expressionnisme qui le marquèrent plus profondément. Mais aussi de vivre de près les tragédies du siècle, en ne faisant pas toujours le bon choix (il flirta un temps avec le nazisme, sans être accepté). Autant dire qu’il n’est pas aisé de faire le tour d’un artiste ayant commencé par des aquarelles des montagnes suisses, ayant plongé dans la fournaise du Berlin de la Belle Époque, ayant été marqué par l’art primitif (fruit d’une expédition scientifique en Nouvelle-Guinée en 1913) et ayant fini par des « images non peintes » pour contourner l’interdiction de pratiquer qui lui était imposée par le Reich. Parmi les 150 œuvres de toutes ses époques, un certain nombre sont exposées pour la première fois.
Emil Nolde au Städel Museum, du 5 mars au 15 juin 2014.

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Léger bâtit son monde

BIOT – Passé par le filtre du surréalisme, Fernand Léger (1881-1955) crée son monde matériel imaginaire où les objets banals (parapluies, chapeaux, fruits), déformés, agrandis, humanisés, vivent d’une nouvelle vie et instaurent de nouveaux rapports d’échelle, dans une démarche cousine de celle de Magritte.
Léger, reconstruire le réel au musée national Fernand-Léger, du 1er mars au 2 juin 2014.

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Cima et ses amis

CONEGLIANO – Cima da Conegliano (1459-1517) a réglé sa peinture sur les paysages doucement ondulés de sa région, autour de Trévise. Maître négligé de la Renaissance, il est convoqué avec ses contemporains Lorenzo Lotto ou Andrea Solario pour donner une image élargie du XVIe siècle local, qui a excellé dans tous les domaines, de la peinture de retable à la céramique.
Un Cinquecento inquieto en plusieurs lieux de la région, dont le Palazzo Sarcinelli, du 1er mars au 8 juin 2014

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Vive les ruines !

LONDRES – L’attrait des bâtiments en ruine avait déjà excité Piranèse et les romantiques – Hubert Robert en pionnier. La Tate Britain étudie le développement de ce goût sur quatre siècles, du XVIIe jusqu’à nos jours, en y plaçant les incontournables Turner et Constable mais également nos contemporains comme Eduardo Paolozzi ou Tacita Dean. Le lourd tribut du XXe siècle est mis en avant avec des photos du Mur de l’Atlantique ou de la destruction de projets novateurs des années vingt.
Ruin Lust à la Tate Britain, du 4 mars au 18 mai 2014.

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L'ARTISTE DE LA SEMAINE


Bill Viola, The Dreamers (détail), 2013, installation vidéo sonore, sept écrans plasma verticaux, quatre canaux stéréo, en continu, collection particulière, Photo Kira Perov

Bill Viola : l’art vidéo à l’âge adulte

PARIS - Grand-prêtre de l’art vidéo, Bill Viola (né en 1951) a contribué à l’affirmation de cet art emblématique du XXIe siècle avec des « classiques » comme The Greeting, Observance ou The Passions, qui réinterprète l’art médiéval. On sait moins que Viola, avant de produire ces œuvres majeures, avait aiguisé son regard et sa technique par une longue résidence en Italie, à Florence, puis par des voyages de travail aux îles Solomon, à Bali ou au Japon - et même dans le Sahara pour y traquer les mirages ! Une curiosité pour l’autre, qui se double d’un intérêt pour les grandes questions métaphysiques - la vie, la mort, l’espace, la nature, le temps. Ce sont ici près de quatre décennies de création - avec la collaboration essentielle de son plus proche associé… et épouse, Kira Perov - qui sont présentées. L’horloge tourne et l’art vidéo sera bientôt un art ancien…
Bill Viola au Grand Palais, du 5 mars au 21 juillet 2014.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE

LIVRES

Lipnitzki, un million d’images

Il était Ukrainien - Juif d’Odessa - et changea son nom une fois installé en France avec sa famille : Haïm Lipnitzky, né en 1887, brièvement violoniste dans l’Istanbul des Russes blancs, devint Boris Lipnitzki en 1920. Il change aussi de profession, devenant photographe. Fort de son bagout et de son entregent, il noue vite des relations avec les « people » qui comptent, premier entre tous le grand couturier Paul Poiret, puis Chanel, Madeleine Vionnet, Elsa Schiaparelli, contribuant à donner à leurs collections une large audience. Passent aussi devant son objectif Louis Jouvet, Joséphine Baker, Serge Lifar, Antonin Artaud, qui réapparaissent tous dans cet ouvrage. Comment ne pas voir la vie en rose avec une toute jeune Edith Piaf de 21 ans (en 1936), avec un tout aussi juvénile Charles Trénet, qui dévore le monde au volant de sa décapotable (en août 1939). Pourtant, la guerre est aux portes : le studio Lipnitzki est aryanisé et lui-même connaît un nouvel exil à Cuba puis aux Etats-Unis. Il reviendra pourtant en France, se renouvelant sans cesse, croquant désormais les écrivains ou les nouvelles vedettes de la variété pour les pochettes de 45 tours… A sa mort en 1971, son studio compte près d’un million d’images - parmi les archives les plus significatives d’un demi-siècle français.
Boris Lipnitzki le magnifique par Françoise Denoyelle, éditions Nicolas Chaudun, 2013, 208 p., 39 €.

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