ArtAujourdhui.Hebdo
N° 382 - du 26 mars 2015 au 1 avril 2015
Louis-Léopold BOILLY (1761–1845), Portraits du chanteur et comédien Simon Chenard, et du peintre François- Pascal-Simon Gérard dit Baron Gérard, vers 1791-96. Crayon noir, rehauts de blanc, sur papier bleu, 192 x 280 mm. © Katrin Bellinger Kunsthandel, Salon du Dessin, Paris.
L'AIR DU TEMPS
Aimez-vous dessiner ?
PARIS - C’est la question qu’il convient de poser en cette traditionnelle période de floraison du dessin. Avec une réponse que l’on sait plutôt décevante : même si les manuels et les carnets de coloriages pour adultes n’ont jamais autant eu le vent en poupe, la réalité est autre. L’omniprésence de nos gadgets électroniques, la qualité de leurs photos, leur mémoire inépuisable ont rendu bien rare l’esthète qui ose croquer sur le vif avec sa craie ou sa pierre noire ! Il est vrai que la virtuosité étourdissante des maîtres du passé, de Dürer à Géricault, de Thomas Jones à Boldini, a de quoi intimider. Du Salon du dessin (le vétéran, lancé en 1991, avec 39 exposants pour cette édition 2015) à Drawing Now, de DDessin à la Semaine du dessin (avec un programme très riche dans les musées), le gibouleux mars fait revivre une discipline en perte de vitesse. « Le dessin est la probité de l'art », écrivait Ingres. Qui le croit encore ? Sans doute les quelques dizaines de milliers d’amateurs qui assurent le succès inattendu de ces manifestations…
• Salon du dessin au Palais Brongniart, du 25 au 30 mars 2015.
• Drawing Now au Carreau du Temple, du 25 au 29 mars 2015.
• DDessin à l’Atelier Richelieu, du 27 au 29 mars 2015.
EXPOSITIONS
Diego Vélasquez, Autoportrait, vers 1650, 45 x 38 cm, huile sur toile, Museo de Bellas Artes, Valence, © Museo de Bellas Artes, Valence.
Vélasquez, grand d’Espagne
PARIS – Certes, les Ménines ne sont pas là, pas plus que la Reddition de Breda : des classiques du Prado aussi inamovibles que la Joconde au Louvre. Pour le reste, c’est à un beau panorama de Vélasquez (auquel les organisateurs préfèrent rendre son orthographe espagnole, Velázquez) qu’invite la rétrospective du Grand Palais, en provenance de Vienne. Y sont notamment abordés ses débuts caravagesques, fruit de ses voyages en Italie, son génie du portrait (que l’on voie comment nous toise le bouffon Pablo de Valladolid !), son lien étroit avec la cour, qui le pousse à remettre sans cesse sur le métier les images du roi et infants. Mais aussi sa versatilité – il est capable de briller aussi bien dans les bodegones que dans le nu (la célèbre Vénus Rokeby de la National Gallery est là) ou l’anatomie équestre, comme le prouve le grand Cheval blanc qui clôt le parcours. De la Forge de Vulcain au portrait de Góngora, Vélasquez a produit de nombreuses icônes. Beaucoup ont voyagé de loin, beaucoup ont leurs passionnés : pour ceux-ci, l’exposition peut se concevoir comme un pèlerinage ciblé, à condition de trouver l’heure creuse…
• Velázquez au Grand Palais, du 25 mars au 13 juillet 2015.
• A voir : Velázquez, cet illustre inconnu, documentaire de Laurence Thiriat, le 5 avril à 9h sur France 5.
Ces expositions ouvrent aussi cette semaine…
Peter Paul Rubens, Portrait de Clara Serena Rubens, vers 1616, huile sur toile, 37x27 cm, Collection du Prince de Liechtenstein, Schloss Vaduz.
Réunion de famille chez Rubens
ANVERS – On sait que Rubens avait une foule d’assistants et une infinité d’amis parmi les puissants de ce monde. Mais le prince des peintres avait aussi une famille : ses deux femmes (Isabella, morte jeune, puis Helene Fourment), ses sept enfants, ses beaux-frères… Ils sont rassemblés de nouveau par l’intermédiaire des portraits que le peintre a laissé d’eux. Venus de Londres, Paris ou New York, ils sont accrochés dans la même demeure qu’ils animèrent autrefois de leurs discussions et de leurs rires.
• Rubens privé. Le maître peint sa famille à la Maison de Rubens, du 28 mars au 28 juin 2015.
Degas, impressionniste ou pas ?
GIVERNY – Degas (1840-1917), l’un des grands noms de l’art du XIXe siècle, est malaisé à classer. S’il est évidemment contemporain et solidaire de ses collègues Monet et Renoir, il suit cependant un chemin très personnel, aussi bien dans les thèmes (le nu, le portrait, la danse, les chevaux) que dans les techniques (son goût pour le pastel, sa recherche d’éclairages artificiels), qui le rattachent aussi bien à l’impressionnisme qu’à ses devanciers Géricault ou Ingres. L’exposition, en 80 œuvres, explore ces divergences.
• Degas, un peintre impressionniste ? au musée des impressionnismes, du 27 mars au 19 juillet 2015.
Van der Weyden et son Calvaire
MADRID – L’issue d’une importante restauration, celle du Calvaire conservé au monastère de l’Escorial, donne l’occasion au Prado d’une mini-rétrospective sur le peintre flamand Rogier van der Weyden, l’un des pionniers de la peinture à l’huile. La vingtaine d’œuvres exposées, dont la Descente de croix du Prado ou les Sept Sacrements venus d’Anvers soulignent l’influence du peintre dans la Renaissance espagnole.
• Rogier van der Weyden au musée du Prado, du 24 mars au 28 juin 2015.
Corrosif Gillray
OXFORD – On le sait, la caricature n’est pas chose nouvelle. Alors que le drame de Charlie Hebdo est encore brûlant, cette rétrospective de dessins rarement montrés de James Gillray (provenant du New College), à l’occasion du 200e anniversaire de sa mort, montre que l’on ne prenait pas des gants au XIXe siècle pour dénoncer les travers des puissants, des belliqueux, des riches et des pourris…
• Love Bites, Caricatures by James Gillray à l’Ashmolean Museum, du 26 mars au 21 juin 2015.
Dosso Dossi (vers 1489–1542), Garçon à la corbeille de fleurs, 1524, huile sur bois transposé sur toile, 67,3 x 65,2 cm. Florence, Fondazione di Studi di Storia dell’Arte Roberto Longhi © Studio Sébert Photographes
Redécouvrir Longhi
PARIS - Aujourd’hui peu connu du grand public, Roberto Longhi (1890-1970) fut l’un des plus grands historiens de l’art du XXe siècle, le « redécouvreur » du Caravage et de Piero della Francesca, un œil quasi infaillible, mais aussi un écrivain talentueux et un maître à penser pour des talents aussi différents que Giorgio Bassani ou Pasolini. Les différentes facettes de sa personnalité transparaissent dans les choix qu’il fit pour sa collection personnelle, conservée dans sa fondation florentine et dont une sélection fait le voyage parisien.
• De Giotto à Caravage, les passions de Roberto Longhi au musée Jacquemart-André, du 27 mars au 20 juillet 2015.
FILMS
Radiographie d’un musée
Ils comptent parmi les attractions les plus visitées au monde mais le grand public n’a pas une vision claire de leur fonctionnement. Que se passe-t-il dans les coulisses des musées ? Ce documentaire se penche sur une institution autrichienne, le Kunsthistoriches Museum de Vienne. Les prises de vues, étalées sur deux ans, ont suivi le chantier de rénovation. De l’accueil d’un donateur offrant un costume impérial au raccrochage des tableaux, des réunions budgétaires parfois tendues (par exemple quand on sabre le budget du « projet Bruegel ») aux discussions sur le nouveau logo, le réalisateur évite toute emphase. Il n’y a pas de commentaires « off », les seuls dialogues étant ceux des employés tandis qu’un visiteur particulier fait office de fou du roi : Neil MacGregor, le patron du British Museum, venu poser une infinité de questions à sa confrère Sabine Haag. Rien à voir avec l’Arche russe, d’Alexandre Sokourov, qui revisitait toute l’histoire de la Russie en un seul plan vertigineux traversant tout l’Ermitage. Il s’agit ici d’un témoignage brut dans un genre qui s’étoffe sans cesse (on rappellera le récent National Gallery de Frederic Wiseman) – le « biopic » sur grand musée. Dommage que personne n’ait pensé à se pencher à temps sur celui de Bagdad…
• Le Grand Musée de Johannes Holzhausen, sorti en salles le 4 mars 2015.
LIVRES
Le Poussin sans peine
Paru pour la première fois en 1990, arrivé aujourd’hui à sa quatrième édition, cet ouvrage doit sa longévité aussi bien à la fortune retrouvée de Poussin (et aux expositions qui le célèbrent, comme celle qui ouvre au Louvre la semaine prochaine) qu’à ses qualités propres. Exhaustif mais toujours clair, l’auteur n’hésite pas à manier l’anecdote (le voyage aventureux chez le « gentilhomme du Poitou », le petit théâtre de personnages de cire) ou les jugements des contemporains. Poussin (1594-1665), l’exact contemporain de Vélasquez, est replacé dans le cadre de la colonie d’artistes de Rome, où il séjourna l’essentiel de sa carrière, des personnages comme Cassiano del Pozzo, Simon Vouet ou les Barberini étant bien dessinés en toile de fond. Les thèmes, devenus si mystérieux pour nous, des sept sacrements ou des amours de Pyrame et Thisbé, sont patiemment décryptés. De quoi rendre plus accessible un peintre toujours tenu pour « difficile »…
• Poussin par Alain Mérot, éditions Hazan, 2015, 332 p., 40 €.
LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE
Elene Usdin - Femmes d'intérieur
31 mars 2015 - PARIS - Galerie Esther Woerdehoff
Un regard iconoclaste sur des classiques de l'art occidental
EN BREF
MILAN – Un nouveau musée dédié aux cultures du monde, le MUDEC, est inauguré le 27 mars 2015.
PARIS - Le nouveau salon biennal Paris Beaux Arts, organisé par le Syndicat national des antiquaires, se tient du 1er au 5 avril 2015 au Carrousel du Louvre.
PARIS - Le salon d'art moderne et contemporain Art Paris Art Fair se tient du 26 au 29 mars 2015 au Grand Palais.
PARIS - Le PAD Paris Art+Design, salon d'antiquaires, se tient au Jardin des Tuileries, du 26 au 29 mars 2015.