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N° 413 - du 7 janvier 2016 au 13 janvier 2016


Jean-Etienne Liotard, Domestique servant le thé à une dame orientale, vers 1740–42. Fusain et sanguine sur deux feuilles, 20,5x28,5 cm. Musée Oskar Reinhart, Winterthur. Photo SIK-ISEA/Philipp Hitz. Exposition organisée par la Royal Academy of Arts, Londres, et les National Galleries of Scotland.

10 EXPOSITIONS ORIGINALES DANS 10 PAYS D'EUROPE

Bienvenue à 2016

Inutile de répéter, comme une rengaine du 1er janvier, l’évidence : l’année va être riche en expositions… D’un bout à l’autre du continent, on annonce Klee, Signac, Bosch, Delacroix, Georges de La Tour, Hubert Robert, Fromanger… Nous aurons tout loisir d’y revenir. En apéritif à ce 2016 bissextile, nous jetons un dernier regard rétrospectif. Pour s’inscrire sous le signe du nomadisme - une constante de la destinée humaine qui a plutôt mauvaise presse dernièrement -, voici un petit pèlerinage qui se joue des frontières et n’est motivé que par la curiosité. De Stockholm à Madrid, de Luxembourg à Moscou, ces dix expositions originales et souvent discrètes, héritage de l’année passée, valent le déplacement. En route !

AMSTERDAM


Courtesy Rijksmuseum, Amsterdam.

Où est la petite rue de Vermeer ?

C’est l’une des plus célèbres œuvres du très rare Vermeer (1632-1675), dont on ne connaît que 35 tableaux : une vue urbaine de sa ville natale, Delft. On s’est longtemps demandé quel endroit l’avait inspirée. Frans Grizjenhout, professeur d’histoire de l’art, après avoir consulté des registres fiscaux du XVIIe siècle, détaillant les taxes pour le curage des canaux, a enfin trouvé la solution. Il s’agit des numéros 40 et 42 de Vlamingstraat, qui se trouvait alors dans l’un des quartiers les plus pauvres de la ville. Les actuels bâtiments datent du XIXe siècle mais la topographie est encore décelable (notamment avec l’aide de Google Maps), avec la petite allée centrale de 1,20 m de largeur. L’enquête a aussi révélé que la maison de droite appartenait à la tante paternelle de Vermeer, tripière de son état…
Vermeer’s The Little Street discovered au Rijksmuseum, jusqu’au 13 mars 2016.

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BERLIN


Max Beckmann, Quappi et le perroquet, 1936, Kunstmuseum Mülheim an der Ruhr © VG BILD-KUNST Bonn, 2015.

Beckmann et la grande ville

Il a habité à Florence et Paris, a enseigné à Francfort et a passé sa dernière décennie entre Amsterdam et Saint-Louis, aux Etats-Unis. Mais Max Beckmann (1884-1950) est indissolublement lié à Berlin, où il a habité de 1904 à 1914 puis de 1933 à 1937, sans compter de nombreux séjours à l’occasion d’expositions. En quelques années, il a vu la ville passer de la Belle Epoque au nazisme, et en a dépeint avec truculence la vie sociale : scènes de cabaret, embarras de la circulation, femmes libérées et personnalités des milieux artistiques composent un carnaval rutilant.
Beckmann et Berlin à la Berlinische Galerie, jusqu’au 28 février 2016.

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BRUXELLES


Diptyque en ivoire représentant l'impératrice Ariane, Kunsthistorisches Museum, Vienne.

Anatolie, j’écris ton nom

Anatolie… Ce beau nom signifie « Levant », « Orient » et avait autrefois pour synonyme Asie Mineure. Depuis douze mille ans, bien avant l’arrivée des Turcs Ottomans, l’homme y a laissé une trace continue. C’est à leur recherche que part cette exposition, qui mêle déesses-mères du VIe millénaire, idoles du IIIe millénaire, statues romaines, stèles paléochrétiennes, céramiques islamiques. Soit quelque 200 objets provenant en grande partie du riche musée des Antiquités anatoliennes d’Ankara. A l’aune de ce temps long, qui a vu se succéder dieux ailés et dieux sans tête, Artémis et Cybèle, Hittites, Phrygiens et Seldjoukides, invasions, guerres et prodiges architecturaux (comme les cités troglodytes), les remous actuels peuvent sembler un épiphénomène…
Anatolia à Bozar, jusqu’au 17 janvier 2016.

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LONDRES


Jean-Etienne Liotard, Simon Lutrell of Lutrellstown, 1753–54, huile sur toile, 83 x 63 cm. Ville de Berne, en prêt permanent au Kunstmuseum. Photo Kunstmuseum Berne.

Liotard, Suisse ottoman

Avec Quentin de La Tour et Rosalba Carriera, c’est l’un des champions du pastel. Mais rien d’évanescent, de rococo, chez lui, plutôt une précision tout horlogère (il était Suisse et miniaturiste de formation), qu'il aime aussi bien cultiver à l'huile. Jean-Etienne Liotard est aussi une fenêtre ouverte sur le monde : ce grand voyageur a rapporté de ses quatre ans en Turquie (1748-52) un véritable reportage sur la Sublime Porte. Lorsqu’il s’installa à Londres en 1752, sa longue barbe le fit surnommer « le Turc » et lui valut le mépris de Reynolds, futur président de la Royal Academy… où il est de nouveau exposé deux siècles et demi plus tard. Ce « peintre de la vérité » et théoricien de la peinture, portraitiste émérite, après d’autres détours par la Hollande ou l’Autriche, s’éteint à Genève un mois avant la prise de la Bastille, manquant un bouleversement historique qui l’aurait certainement intéressé…
Jean-Etienne Liotard à la Royal Academy of Arts, jusqu’au 31 janvier 2016.

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LUXEMBOURG


Jean-Jacques de Boissieu, Vieillard au front chauve, vu de profil, eau forte, burin, 1770.

De Boissieu, un graveur de génie

Le Grand Dictionnaire universel Larousse du XIXe siècle lui consacre une vingtaine de lignes mais Jean-Jacques de Boissieu (1736-1810) a depuis longtemps déserté les encyclopédies. C’est dommage et c’est donc une initiative louable que celle de la Villa Vauban d’exhumer ce virtuose de la gravure. Né à Lyon, peintre de soieries, marqué par son voyage en Italie, de Boissieu doit abandonner la peinture car trop sensible aux huiles et aux pigments. Ce qui l’obligera à se spécialiser dans le domaine où il est le plus brillant : l’eau-forte. Paysages aux troncs et aux feuilles impeccablement détaillés, portraits et autoportraits, scènes de genre, vues urbaines de sa ville natale à la topographie infaillible : chaque estampe doit être scrutée à la loupe pour en extraire la moelle…
De Boissieu, le Rembrandt français à la Villa Vauban, jusqu’au 10 avril 2016.

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MADRID


Mujer chinchorrera recolectora de carbón, Lota, de la serie Mujeres de Chile, 1992 Copia digital Cortesía de la artista

Le Chili de Paz Errázuriz

Embrasser la carrière photographique dans le Chili de Pinochet oblige à certaines audaces lorsque l’on a la fibre sociale. Dans son œuvre, Paz Errázuriz (née en 1942) n’a cessé de s’intéresser aux populations laissées pour compte – des gosses de rue aux travestis, des internés psychiatriques aux communautés indigènes, en passant par les aveugles ou les militantes féministes. Engagée dans sa profession (elle fut l’une des fondatrices de l’association des photographes indépendants), elle dresse un portrait sans concessions mais plein d’empathie de son pays, que l’exposition résume en quelque 170 images.
Paz Errázuriz à la Fundación Mapfre, jusqu’au 28 février 2016.

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MOSCOU


Valentin Serov, Fillette aux pêches, portrait de Vera Mamontova, 1887, huile sur toile, 91×85 cm, galerie Trétiakov, Moscou.

Serov, une âme russe

Sa Fillette aux pêches a tout d’un paradis perdu. On imagine la datcha douillette où entre la lumière de l’été russe, et les interminables discussions autour du samovar, comme dans Gogol ou Tchékhov. Valentin Serov, peintre d’esprit cosmopolite (formé à Berlin et Paris, habitué de Venise où il nous souvient avoir vu de lui un croquis dans le livre d’or de l’hôtel Metropole), fut un impressionniste russe, presque sans le savoir. Fils d’un célèbre compositeur, bercé par Ilya Répine, marqué par son séjour dans le phalanstère artistique d’Abramtsevo, il brilla surtout dans les portraits d’esthétique Art nouveau, dont le plus célèbre est celui de la danseuse Ida Rubinstein (Musée russe de Saint-Pétersbourg). L’exposition retrace le parcours d’un artiste disparu précocement, en 1911, à 46 ans.
Valentin Serov à la Galerie Trétiakov, jusqu’au 24 janvier 2016.

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ROME


James Tissot, La Japonaise au bain, 1864, huile sur toile, 208,92x124,46 cm. © Musée des Beaux-Arts de Dijon.

Tissot, scènes de la vie bourgeoise

Il est l’un des virtuoses de l’étoffe. Les textures, les froissés, les plis et les coupes n’ont pas de secret pour lui. Ses velours et ses soies semblent prendre vie sous le regard. Pas étonnant : son père commerçait dans ce secteur. James Tissot (1836-1902) est l’un des grands oubliés de l’art de la fin du XIXe siècle. Témoin majeur de l’évolution de la mode bourgeoise, il l’est aussi de la société avec ses belles séries de portraits, notamment lors d’une décennie en Angleterre, après la chute du Second Empire, et avec ses scènes de loisirs et de vie quotidienne (canotage, pique-niques, bals et concerts, théâtre et cirque, boutiques et grands boulevards). L’exposition, qui réunit 80 œuvres, laisse un peu de côté sa production finale, biblique, marquée par une foi croissante, par plusieurs voyages en Palestine et par une série de 365 dessins du Nouveau Testament, achetée en bloc par le musée de Brooklyn.
James Tissot au Chiostro del Bramante, jusqu’au 21 février 2016.

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STOCKHOLM


Cajsa von Zeipel, Morra, 2014. Courtesy the artist & Andrehn Schiptjenko. Photo: Sophie Mörner

Une histoire du monochrome

Il a séduit Yves Klein (en bleu), Ryman (en blanc), Soulages (en noir). Mais la fascination du monochrome ne se limite pas à ces quelques stars ni aux années de l’après-guerre : il continue d’inspirer les artistes. C’est ce que montre cette exposition transversale, qui s’occupe aussi bien de peinture que de design, de mode (Yamamoto) voire de musique et englobe Lucio Fontana, Kounellis et Donald Judd pour arriver jusqu’à nos années du XXIe siècle. Le tout dans un lieu superbe de l’archipel de Stockholm, sur une île où la saison se prête à sa propre monochromie, celle des gris perle et des bleus argentés…
The Monochrome Symphony à Artipelag, jusqu’au 28 mars 2016.

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VIENNE


Caspar David Friedrich, The Stages of Life, c. 1834 © bpk, Museum der bildenden Kunste, Leipzig, Bertram Kober (Punctum Leipzig).

Les clés du romantisme

Qu’est-ce que le romantisme ? Le plaisir d’être emporté par des visions sublimes, générées par la toute-puissance de la nature – le vent, la tempête, la mer démontée, l’immensité – plutôt que par l’ordre et le calme. Quelques icônes ont synthétisé cette vision chère au XIXe siècle : Chateaubriand cheveux au vent (par Girodet), les ruines de la Rome antique chez Hubert Robert ou l’homme isolé face à la montagne glacée chez Friedrich. L’Albertina a réuni une série de ces images fortes qui rappellent le besoin régulier de l’homme de succomber au primat de l’émotion, de l’imagination, du fantastique.
Worlds of Romanticism à l’Albertina, jusqu’au 21 février 2016.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE