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N° 435 - du 9 juin 2016 au 15 juin 2016


Francis Picabia, Printemps, env. 1942-1943, huile sur toile, 115 x 90 cm. Courtesy Michael Werner Gallery, New York, London, et Märkisch Wilmersdorf © 2016 ProLitteris, Zurich

L'AIR DU TEMPS

Picabia, génie ou mystificateur ?

ZURICH - On est toujours un peu méfiant devant Picabia. L’artiste a brassé trop de styles, lancé trop de provocations, effectué trop de reniements pour être pris tout à fait au sérieux. Comment le même artiste a-t-il pu produire des tableaux pointillistes, des compositions surréalistes à base de lettres et de collages, des peintures optiques en ripolin, des pin-ups kitsch, des abstractions biomorphiques à la Arshile Gorky voire des monochromes à la Klein. C’est trop pour un seul homme ! Mais, comme chez certain de ses contemporains comme Duchamp ou Cocteau, c’est justement cette frénésie d’expérimentation qui en fait un personnage emblématique de la modernité. Le jeu déroutant des contradictions, son iconoclasme dada (à Zurich en 1919) puis son goût pour l’argent et les belles voitures, son balancement entre l’antimilitarisme de la Première Guerre mondiale et son attitude douteuse envers les dictatures fascistes, la liste vertigineuse de ses amitiés (Apollinaire, Tristan Tzara, Picasso) font que le personnage lui-même - ou sa vie - devient une œuvre d’art. Et l’on est prêt à tout pardonner à un mystificateur qui, adolescent, aurait copié la collection de tableaux de son père pour vendre les originaux et utilisé le bénéfice pour financer sa collection de timbres…
Picabia au Kunsthaus Zurich, du 3 juin au 25 septembre 2016.

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EXPOSITIONS


Sonja Sekula, Animal Without Subject of War, 1944, huile sur toile, 46 × 66 cm, Kunstmuseum Luzern.

La courte saison de Sonja Sekula

LUCERNE - A 18 ans, en 1936, avec ses parents, Sonja Sekula quitte Lucerne pour New York. La toute jeune artiste, qui comptait déjà parmi ses amitiés Annemarie Schwarzenbach et Klaus Mann, y vivra une décennie exaltante au contact des expressionnistes abstraits puis des surréalistes européens exilés. Le musée de sa ville natale lui consacre une rétrospective centrée sur ses rapports avec Max Ernst, Jackson Pollock et autres grands noms du XXe siècle. Son retour en Europe sera chaotique malgré d’autres rencontres fortes, de Dubuffet à Boulet et Sedar Senghor. Affligée de troubles psychiatriques, elle se pendra le 25 avril 1963.
Sonja Sekula au Kunstmuseum, du 11 juin au 25 septembre 2016.

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Josef Sudek, Rue de Prague, 1924, épreuve gélatino-argentique, 8,3 × 8,2 cm. Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. Don anonyme, 2010. © Succession de Josef Sudek

Sudek, l’homme au bras d’argent

PARIS - Le Pragois Josef Sudek (1896-1976) a tellement exploité les techniques de la chambre et du tirage qu’il en est devenu une incarnation de ce que la photographie argentique a produit de plus raffiné. Les vues de sa fenêtre, Prague la nuit, les natures mortes surréalistes (une chaise, une boule, une tête), les fleurs et les paysages de Bohême, ont sollicité pareillement son inventivité. Ce grand évocateur des choses passées a su allier le goût de la nostalgie aux expérimentations les plus diverses (photographies entre deux vitres, tirages tramés, etc.). Quelque 130 images évoquent l’univers particulier de celui qui partagea une particularité avec le pianiste Wittgenstein et Blaise Cendrars : la perte de son bras droit lors de la Première Guerre mondiale.
• Josef Sudek, le monde à ma fenêtre, au Jeu de paume, du 7 juin au 25 septembre 2016.

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Ces expositions ouvrent aussi cette semaine

Camoin, le fauve méconnu

AIX-EN-PROVENCE - Il participa au fameux Salon d’automne de 1905, celui de la « cage aux fauves », aux côtés de Marquet et Matisse, qui furent ses grands amis. Pourtant, Charles Camoin (1879-1965), admirable coloriste, est resté particulièrement ignoré du grand public. Cette exposition rachète un peu cette injustice. Tout près de son Marseille natal, au pays de celui qui fut son inspirateur (Cézanne), elle montre une bonne partie de son parcours, de sa formation dans l’atelier de Gustave Moreau jusqu’aux années lumineuses de l’entre-deux-guerres.
Camoin dans sa lumière au musée Granet, du 11 juin au 2 octobre 2016.

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Anthologie de l’art pauvre

PARIS - Le critique Germano Celant avait forgé en 1967 le terme « Arte Povera » pour décrire le courant contemporain qui cherchait dans les matériaux les plus simples et bruts (pierres, troncs, sable, feu) les moyens de son expression. Le Centre Pompidou relit la parabole de ce mouvement entre 1964 et 1974, en accolant aux mandarins (Merz, Penone, Kounellis, etc.), des interprètes négligés comme Ceroli et Gilardi.
Un art pauvre au Centre Pompidou, du 8 juin au 29 août 2016.

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L’ARTISTE DE LA SEMAINE


Christo, The Floating Piers (projet pour le lac d’Iseo, Italie), Collage 2015, 28 x 21,5 cm. Crayon, pastel, peinture. Photo de Wolfgang Volz, photo aérienne et échantillon de tissu. Photo : André Grossmann © 2015 Christo.

Coup double pour Christo

Il est désormais seul, sa compagne Jeanne-Claude l’ayant quitté il y a 7 ans. Leur entente parfaite était résumée par une coïncidence symbolique : ils étaient tous les deux nés le même jour, le 13 juin 1935… Sa solitude n’a pas empêché Christo de poursuivre dans le registre des projets « pharaoniques » qui l’ont rendu célèbre comme l’empaquetage du Pont-Neuf (1985) et du Reischtag (1995), ou The Gates à Central Park (2005). Deux projets voient le jour de manière quasi simultanée. Le premier est une installation à la Fondation Maeght, un mastaba composé de barils de pétrole, qui rappelle une de ses obsessions. Christo avait déjà bouché la rue Visconti à Paris en 1962 avec ce matériau et continue de travailler sur un monumental mastaba à Abu Dhabi, de 410 000 barils - qui serait la plus grande sculpture au monde. Et tandis que The River en Arkansas est enlisé depuis des années, The Floating Piers (des passerelles flottantes reliant une île à la berge sur le lac d’Iseo, en Italie) est inauguré le 18 juin 2016, cinq jours après son anniversaire. A 81 ans, Christo continue de voir grand.
• Christo et Jeanne Claude à la Fondation Maeght, du 4 juin au 27 novembre 2016.

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The Floating Piers sur le lac d’Iseo, du 18 juin au 3 juillet 2016.

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LIVRES

Hartung, un de la Légion

Enfant, fasciné par les orages, il dessinait des éclairs. Toute sa vie, Hans Hartung (1904-1989) cultivera le goût des lignes brisées, des formes véhémentes. Continuité de ses passions enfantines ou plutôt urgence de créer face à un monde dangereux ? Cet ouvrage et l’exposition qui l’accompagne à Aubagne (jusqu’au 28 août 2016) posent l’intéressante question de la mort comme force motrice. Hartung l’a connue de près : en tant qu’Allemand vivant en France, il est parqué au stade de Colombes en 1939 puis, pour recouvrer une forme de liberté et matérialiser son opposition au fascisme, s’engage dans la Légion étrangère. Stationné à Sidi Bel-Abbès, il participe au Débarquement puis perd une jambe dans les combats de Belfort, à la fin de la guerre. Faisant partie de la cohorte des artistes amputés (voir aussi Josef Sudek ci-dessus), sa création, comme celle de Pierre Mac Orlan, Cendrars, Ernst Jünger ou même Cole Porter, ne peut faire abstraction de cette période de légionnaire. Elle sert ici de fil conducteur dans une œuvre qui a couvert tout le siècle, de son premier dessin signé de 1914 à son ultime œuvre - au pistolet - de novembre 1989.
Hans Hartung, peintre et légionnaire, Gallimard/Fondation Hartung-Bergman, 2016, 160 p., 29 €.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE


JEAN LURÇAT, L'ÉCLAT DU MONDE

10 juin 2016 - ANGERS - Musée des Beaux-Arts

Après les Gobelins à Paris, c'est au tour d'Angers, siège de la tenture de l'Apocalypse, de rendre hommage à Lurçat, à 50 ans de sa mort

Notre sélection de nouvelles expositions

EN BREF

PARIS - Le Parcours Saint-Germain, itinéraire d'art contemporain dans le quartier, a lieu du 10 au 19 juin 2016.

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QUIMPER - Suite à l'annonce par la municipalité du retrait de sa subvention, le centre d'art Le Quartier, ouvert en 1990, est menacé de fermeture.

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TOURS - L'imprimerie Mame, dessinée au lendemain de la guerre par Bernard Zehrfuss et Jean Prouvé, rouvre le 10 juin 2016 en tant que Cité de la création et du numérique après sa transformation sous la direction de l'architecte Franklin Azzi.

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VENDÔME - La 28e vente Garden Party de la maison Rouillac a lieu au château d’Artigny les 12 et 13 juin 2016.

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VILNIUS - Le salon d’art moderne et contemporain Art Vilnius a lieu du 9 au 12 juin 2016 avec la Pologne comme pays invité.

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ZURICH - Manifesta 11, biennale de l’art européen, a lieu du 11 juin au 18 septembre 2016.

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