ArtAujourdhui.Hebdo
N° 441 - du 15 septembre 2016 au 21 septembre 2016
Les Beatles, partition illustrée de Revolution, 1968, par Alan Aldridge © Iconic Images, Alan Aldridge.
L'AIR DU TEMPS
Faire la révolution ou pas
En 2010, selon l’ONG Oxfam, qui présente ces chiffres chaque année au congrès des puissants à Davos, 388 personnes possédaient autant de richesses que la moitié la plus pauvre de l’humanité. En 2013, ce club s’était restreint à 153 personnes, en 2015, à 62 personnes. Le 1% le plus riche de la population possède autant que les 99% restants. Cette statistique ne vous donne-t-elle pas quelque envie de révolution ? A tout le moins, le goût d’une petite révolte ? Ou vous pousse-t-elle simplement à rêver d’un autre monde ? Lorsqu’il s’agit de sentiments forts, les artistes sont de bons guides, notamment face à ce type de dilemme…
EXPOSITIONS
Poster pour le Health Education Council, publié par la Family Planning Association, Cramer Saatchi Advertising Agency, UKGrande-Bretagne, 1969. © Victoria and Albert Museum, Londres.
Message des Sixties : vive la liberté !
LONDRES - Pour ceux qui les vécurent, elles n’étaient pas forcément roses, avec la tension de la guerre froide, la lutte sanglante pour les droits civiques aux Etats-Unis (l’assassinat de Martin Luther King en 1968), l’apartheid en Afrique du Sud… Pourtant, rétrospectivement, combien ces Sixties chantées par Gainsbourg et Birkin, par les Beatles (Hey Jude) ou Simon & Garfunkel, nous enchantent ! Il a suffi au Victoria & Albert Museum de choisir cinq petites années (1966-1970) pour évoquer le souffle de la révolte et de la liberté. Manifestation contre la guerre au Vietnam, liberté politique et de mœurs (Woodstock), liberté de création (musique, peinture, installations), liberté de mouvement, jusqu’à la Lune (une pierre appartenant à la NASA est exposée). Rythmée par Sam Cooke et Jimi Hendrix, mêlant posters psychédéliques, vieux vinyles, photos et films, l’exposition présente un étonnant pot-pourri. Dont une liste de course établie derrière les barricades en mai 68 à Paris, mentionnant les bouteilles consignées à restituer. Une autre époque !
• You Say You Want a Revolution ? Records and Rebels, 1966-70 au Victoria & Albert Museum, du &0 septembre 2016 au 27 février 2017.
Daido Moriyama, sans titre, photographies extraites de la série Accident (Akushidento), 1969. © Daido Moriyama/collection de la Shadai Gallery, Tokyo Polytechnic University
Provoke, révolte à la japonaise
PARIS - Sur le site abebooks, les trois premiers numéros sont en vente à 11911,88 €. Le numéro 4 n’est pas proposé. Pour cause : il n’a jamais existé. Provoke n’a compté que trois livraisons, ce qui sans doute contribué à son statut mythique. La revue japonaise de photographie, ignorée à sa sortie en 1968, a joué un rôle moteur dans les nouvelles tendances, jouant notamment un rôle déclencheur dans la carrière d’Araki. Les photographes de Provoke, dont Daido Moriyama, documentent une société en crise, avec ses violences, ses révoltes (contre les bases américaines mais aussi contre la construction de l’aéroport de Narita, un conflit dont on a oublié l’intensité) au moyen d’une image brute, rugueuse, pleine de grain, jouant des gros plans, des basses lumières et de contrastes aveuglants.
• Provoke, entre contestation et performance, la photographie au Japon, 1960-1975, au BAL, du 14 septembre au 11 décembre 2017.http://www.le-bal.fr/
Odilon Redon, Orphée vers 1910, huile sur carton, 57 x 55 cm. Montpellier Mediterranée Métropole, Musée Fabre © Musée Fabre de Montpellier Méditerranée Métropole - photographie Frédéric Jaulmes
Chercher refuge dans le rêve ?
MARSEILLE - « Marchez à pas très doux, vous marchez sur mes rêves », écrivait l’Irlandais Yeats. Une maxime qu’auraient pu reprendre bien des songe-creux. Qu’est-ce que le rêve au fond ? Une idée que l’on caresse ? Une imagination sans fondement ? Une hallucination produite par un état morbide ? Ou une construction autre que celles-ci, que recensait le Larousse du XIXe siècle ? Le musée Cantini convoque des artistes que l’on sait marqués par cette pratique - les surréalistes évidemment (Toyen, Ernst, Brauner) mais aussi Goya ou des symbolistes comme Odilon Redon et Kubin, jusqu’à Philippe Ramette - pour donner un panorama à 180° de cette activité éminemment humaine. Et dire que l’on ne connaît pas vraiment l’étymologie du mot… Du gaélique rabhd, radotage ? Du latin repuerare, redevenir enfant ? Du vieux français desver, vagabonder ? Le rêve, c’est aussi le fantasme, le cauchemar, et même le réveil : l’exposition aborde ces différentes thématiques en laissant les portes ouvertes. Ce mot n’accepte pas de définition…
• Le Rêve au musée Cantini, du 17 septembre au 22 janvier 2017.
D'AUTRES EXPOSITIONS QUI OUVRENT
Coup de Rhin
BONN - Le Rhin, qui unit ou sépare, a été évoqué par les peintres, chanté par les poètes. L’exposition écrit sa biographie en images, bercées par Goethe et Victor Hugo (Illustration : Johann Adolf Lasinsky, Le Rhin près de Coblence, 1828, © LVR-LandesMuseum Bonn. Photo: Jürgen Vogel.) A la Bundeskunsthalle, du 9 septembre 2016 au 22 janvier 2017.
LYON - Un cubiste, donc un iconoclaste, qui devient croyant et apôtre d’une peinture religieuse, pratiquée dans une communauté isolée ? Ce parcours atypique est celui d’Albert Gleizes, qui fonda son lieu utopique Moly-Sabata, au bord du Rhône, en 1926. Au musée d’art religieux de Fourvière, du 15 septembre 2016 au 15 janvier 2017.
PARIS - Il n’a cessé de se portraiturer, cherchant au fond de lui-même l’humanité qu’il traquait aussi chez les autres. Le dessin et la gravure ont joué un grand rôle dans cette quête, comme le rappelle Rembrandt intime. Au musée Jacquemart-André, du 16 septembre 2016 au 23 janvier 2017.
PARIS - Un parcours à travers l'art soviétique et russe de 1950 à 2000, c'est ce que propose Kollektsia, la collection donnée par la Vladimir Potanin Foundation. Au Centre Pompidou, du 14 septembre 2016 au 27 mars 2017.
LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE
LE MONDE EST EN PANNE D'UNE PENSÉE POUR LE MONDE
16 septembre 2016 - PARIS - Maëlle Galerie
L'état de la planète vu de manière allégorique par les artistes (ill. Barthélemy Toguo)
LIVRES
La Beat Generation, ou comment larguer les amarres…
Quelle autre couverture que celle d’une route à perte de vue ? L’évasion ! Avec seulement une voiture au loin pour donner l’échelle : l’image de Robert Frank synthétise la Beat Generation, « une génération de mecs dans le coup (hipsters), dingues et illuminés s’élevant soudain et parcourant l’Amérique, cinglés, vivant dans la rue, allant d’un endroit à un autre en stop, déguenillés, béats et beaux d’une manière moche, gracieuse, nouvelle (…) » comme l’écrit Kerouac dans un article de 1958 publié sur Esquire. Ces clochards célestes, dont la matrice se forme à l’université de Columbia en 1943, qui pérégrinera entre Paris, Tanger et le Mexique, incarnent une forme de liberté qui rappelle Rimbaud, ses poches crevées et ses fleuves impassibles. Réunis dans le catalogue de l’exposition du Centre Pompidou (jusqu’au 3 octobre 2016) : collages, cut-up, poèmes visuels, performances, hallucinations sous l’emprise du ganja ou du LSD. La Beat Generation fait exploser les carcans et lègue aux générations futures une forme de liberté totale, exaltante, enivrante, et souvent destructrice.
• Beat Generation New York San Francisco Paris, sous la direction de Philippe Alain Michaud, 2016, 304 p., Centre Pompidou, 44,90 €
EN BREF
BEYROUTH - La Beirut Art Fair a lieu du 13 au 20 septembre 2016.
EUROPE - Les journées européennes du patrimoine ont lieu les 17 et 18 septembre 2016.
NEW YORK - La New York Art Book Fair a lieu au PS1 du 15 au 18 septembre 2016.
OSLO - LA Triennale d’architecture a lieu du 8 septembre au 27 novembre 2016.
TOKYO - Cindy Sherman en peinture et Annette Messager en sculpture ont remporté les prix Praemium Imperiale 2016.