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N° 470 - du 20 avril 2017 au 26 avril 2017


Guernica, Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía, Madrid. Photo Joaquín Cortés/Román Lores.

L'AIR DU TEMPS

Il y a 80 ans, Guernica

MADRID - 26 avril 1937. Lundi. Jour de marché. Gernika, petite ville du pays Basque espagnol. Le pilonnage de la population, par les escadrilles allemandes de la légion Condor, aurait pu disparaître dans les archives de la guerre comme un acte barbare parmi tant d’autres. Il s’est gravé dans les mémoires, non seulement pour avoir été le premier véritable bombardement de civils, mais pour avoir inspiré à Picasso son œuvre la plus célèbre. Le destin de ce tableau, conçu en avril-mai dans le grenier de la rue des Grands-Augustins à Paris, est en soi romanesque. Montré dans le pavillon espagnol de l’Exposition universelle de Paris jusqu’en novembre 1937, il a ensuite effectué une tournée européenne, qui l’a, entre autres, mené dans un garage Ford à Manchester puis a été conservé au MoMA de New York. La grande toile (777 cm de long) n’a été déroulée en Espagne qu’en 1981, après la mort de Picasso et de Franco, et est aujourd’hui conservée au musée Reina Sofía de Madrid. Pour célébrer les 80 ans de Guernica, le musée a réuni des documents intéressants - photos prises par Dora Maar des différentes étapes ou papiers administratifs. On voit notamment ce courrier tapé à la machine le 31 mai 1937, qui recense les dépenses de l’ambassade espagnole à Paris en frais de propagande. A côté d’Arthur Koestler, de Pietro Nenni ou de Buñuel (destinataire de 554 000 francs), Picasso y apparaît pour la modeste somme de 150 000 francs, en remboursement des frais engagés. L’objet de l’exposition, qui nous replonge dans l’atmosphère de 1937 (avec le vrai tableau en toile de fond, surveillé en permanence par deux vigiles) est en réalité autre. Elle montre que Guernica n’est pas un accident isolé dans la carrière de Picasso mais l’aboutissement de plus d’une décennie de figures blessées, torturées, angoissées, hurlantes. Ce long mûrissement, nourri par des tensions personnelles, a trouvé dans le massacre du printemps 1937 son expression la plus grandiose et la plus en phase avec des temps cruels. On peut ne pas partager cette interprétation. Etayée par des prêts de Malaga, Paris, Houston ou Stockholm, elle a l’intérêt de renouveler le regard traditionnel sur l’icône du XXe siècle.
Piedad y Terror en Picasso. El camino a Guernica au musée Reina Sofía, du 5 avril au 4 septembre 2017. Catalogue 196 p., 35 €.

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L’ACTUALITÉ PICASSO


Bernès, Marouteau & Compagnie, Pablo Picasso posant avec les sculptures en plâtre Tête de femme, Femme assise, Buste de femme (Marie-Thérèse), dans l'atelier de Boisgeloup, Gisors, tirage sans date, épreuve gélatino-argentique, 7.4 x 5,3 cm. Musée national Picasso- Paris, don Succession Picasso, 1992, APPH2913. © Succession Picasso 2017 / © RMN-Grand Palais (Musée national Picasso - Paris) /Mathieu Rabeau.

Boisgeloup : «Silence, on sculpte !»

ROUEN - A la mort de Picasso, lors de l’interminable inventaire pour la succession (sous la direction d’un célèbre commissaire-priseur de l’époque, maître Maurice Rheims), les spécialistes découvrent, ébahis, un pan largement caché de sa production : la sculpture. Pour cette production en volume, le Vulcain jaloux avait une forge idéale, achetée en 1930, et largement utilisée jusqu’en 1935, date de sa séparation houleuse avec Olga : le manoir normand de Boisgeloup, près de Gisors. Faisant pleinement partie des demeures mythiques de l’artiste, aux côtés de la villa La Californie à Cannes ou du château de Vauvenargues, près d’Aix-en-Provence, Boisgeloup bénéficie enfin d’un éclairage spécifique. L’exposition montre un échantillon de ce qui a été produit : classiques formes en ronde-bosse mais aussi assemblages d’objets trouvés (branches, crânes d’animaux, papillons morts, ficelles), expérimentations (empreintes de napperon, visages en plâtre et carton), sculptures filiformes en sapin, et encore des centaines de dessins, photos et même films où l’on voit Olga sautillant dans l’herbe haute, des invités à l’apéritif ou Bob, le gros saint-bernard d’une famille faussement unie…
Boisgeloup, l’atelier normand de Picasso, au musée des Beaux-Arts, du 1er avril au 11 septembre 2017. Catalogue Artlys, 256 p., 39 €.

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• Dans le cadre de l’exposition, le château de Boisgeloup est exceptionnellement ouvert à la visite les 22 avril, 13 et 27 mai. Il accueille l’artiste américain Joe Bradley et son parc contient plusieurs sculptures monumentales de Julian Schnabel ou Douglas Gordon.

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• A Rouen, dans le cadre de la même «Saison Picasso», le musée Le Secq des Tournelles et le musée de la Céramique présentent respectivement «González/Picasso, une amitié de fer» et «Picasso, sculptures, céramiques»

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Edward Quinn, Picasso à l'exposition de céramique, Vallauris, été 1951, © edwardquinn.com © Succession Picasso, Paris, 2017.

Quinn, vingt ans avec Picasso

ANTIBES - Picasso a été une proie de choix pour les photographes et a su exploiter avec un talent consommé la notoriété que lui apportaient des clichés multipliés à l’infini. Ils furent légion, de Brassaï à Doisneau, de Lucien Clergue à David Douglas Duncan, à croquer le minotaure. L’Irlandais Edward Quinn (1920-1997) est l’un d’eux. Leur amitié débute le 21 juillet 1951, lorsque Quinn assiste à l’exposition annuelle des potiers de Vallauris. Elle durera deux décennies et produira un corpus de neuf mille images, dont une centaine sont présentées.
Picasso sans cliché - Photographies d’Edward Quinn au musée Picasso, du 8 avril au 2 juillet 2017.

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Parade, une escapade italienne

NAPLES - En 1917, Picasso réalise sa création la plus monumentale, le rideau de scène de Parade. Cette œuvre est imaginée à Rome, où Picasso rejoint, avec Cocteau, la troupe des Ballets russes. Le séjour sera marqué par sa rencontre avec Olga, sa future épouse, et des virées à Naples et Pompéi. Une exposition sur place, jusqu’au 10 juillet 2017, rappelle cette aventure.
• Notre e-Flash (en anglais) avec présentation de l’exposition.

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Ogre Olga

PARIS - Les relations entre Olga et Picasso, d’abord empreintes d’une sérénité toute classique, prendront un tour houleux puis cruel, jusqu’à la séparation définitive en 1935, après 17 ans de vie commune et la naissance d’un enfant, Paul. Le musée Picasso se penche sur cette période Olga. Jusqu’au 3 septembre 2017.
• Notre compte-rendu de l’exposition.

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Mal d'Afrique

PARIS - Les rapports durables entre Picasso et l’art primitif offrent l’occasion d’une analyse fouillée au musée du quai Branly, jusqu’au 23 juillet 2017.
• Notre compte-rendu du catalogue.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE


BONJOUR MONSIEUR SEGONZAC

21 avril 2017 - NÈGREPELISSE - La Cuisine

Un travail pédagogique effectué avec les étudiants d'un collège local

Notre sélection de nouvelles expositions

LIVRES

A boire !

Les artistes et les débits de boisson ont toujours fait bon ménage. Les écrivains ont écrit un pan de la littérature moderne au café (pendant les Lumières, les frères Verri de Milan publièrent une belle revue intitulée Il Caffè) mais jamais cette liaison n’a été aussi fertile qu’au tournant 1900 lorsque les peintres prennent les premières places. Picasso, bien sûr, grand hanteur des « caf’conc » barcelonais, mais aussi Forain, Toulouse-Lautrec, Camoin, y ont trouvé matière inépuisable. L’ouvrage, qui accompange une exposition à la Cité du Vin à Bordeaux, fait revivre des talents oubliés, du naturaliste Léon Lhermitte au bohème Bottini de Montmartre (fils d’un coiffeur italien et d’une blanchisseuse espagnole !), jusqu’à Pierre Roy, surréaliste mort à Milan en 1950, qui se fit un plaisir de promouvoir le pinard de comptoir par des affiches placardées sur les paquebots de la French Line en route vers l’Amérique.
Bistrot ! De Baudelaire à Picasso, sous la direction de Stéphane Guégan, Gallimard/La Cité du Vin, 2017, 160 p., 29 €.

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