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N° 520 - du 14 juin 2018 au 20 juin 2018


Frida sur le banc, 1939, photographie par Nickolas Muray © Nickolas Muray Photo Archives

L'AIR DU TEMPS

Frida, coquette jusqu’au bout

LONDRES - Tout ce qui touche à Frida Kahlo perd le statut d’objet du quotidien pour devenir objet mystique. Il y a beaucoup d’argent en jeu mais ce n’est pas la seule raison. Il y a quelques mois, une violente polémique a opposé la famille à propos d’une poupée Barbie – pouvait-on jouer ainsi avec une icône ? Dans la sacralisation de l’univers de l’artiste mexicaine, c’est aujourd’hui le tour de sa garde-robe : elle est exposée comme s’il s’agissait quasiment de reliques religieuses. Il y a là les huipiles (les blouses colorés de la région d’Oaxaca) qu’elle affectionnait particulièrement, des jupes de satin, ses cosmétiques. Mais ce qui fait évidemment le plus effet, ce sont les marques de sa souffrance (atteinte de polio dans sa jeunesse puis victime d’un terrible accident de tram, brisée par une barre de fer qui lui pénétra dans les chairs) : ses corsets peints d’une végétation fantastique ou sa prothèse de jambe, qu’elle décora d’une bottine rouge vif. C’est un choix qui épouse parfaitement l’actuel discours sur l’égalité : pourquoi les handicapés ne pourraient-ils pas être aussi coquets que leurs semblables ?
Frida Kahlo: Making Her Self Up au Victoria & Albert Museum, du 16 juin au 4 novembre 2018.

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EXPOSITIONS


Henri Lombard, sculpteur, et Jules Cantini, marbrier, Hélène, 1885, marbre blanc de Carrare, marbre vert antique, marbre jaune de Sienne, albâtre, malachite, métal émaillé, pierre. 203 x 100 x 50 cm. Marseille, musée des Beaux-Arts© Musée d'Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt

A propos de la dictature du blanc en sculpture…

PARIS - Le Corbusier avait publié un livre, Quand les cathédrales étaient blanches, tout plein de son admiration pour l’Amérique verticale. Cinquante ans plus tard, comme pour dissiper la fausse idée que ce titre fameux avait instillé dans l’esprit des gens, l’historien de l’art Alain Erlande-Brandenburg répondait par un Quand les cathédrales étaient peintes. Ce qui est évidemment la vérité... Cette perception d’une blancheur originelle nous poursuit aussi pour la sculpture : les Grecs et les Romains, par exemple, ne peuvent avoir produit que des Vénus d’un marbre immaculé. Et les gothiques des prophètes pâles que seul le passage du temps peut jaunir. C’est la faute à Winckelmann : peu importe que la couleur ait été, en réalité, toujours présente : notre méfiance envers la sculpture polychrome déborde désormais sur toutes les périodes, comme le prouve l’exposition du musée d’Orsay qui entend réhabiliter les victimes du XIXe siècle. Gérôme et Gauguin (parce qu’ils sont aussi peintres), Cordier et Carriès (tout récemment) sortent du lot. Mais qui se souvient de Lombard, de Barrias, de Rivière ? Grès émaillés, bronzes dorés, pâtes de verre scintillent et donnent vie à leurs sculptures mais elles sont presque automatiquement classées (déclassées, plutôt) kitsch. Il reste du chemin à parcourir pour écorner la suprématie du blanc !
En couleurs. La sculpture polychrome en France au musée d'Orsay, du 12 juin au 9 septembre 2018.

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Sam Gilliam, Crystal, 1973, acrylique sur toile, 236 x 75 x 19 cm. Photo: Fredrik Nilsen, Courtesy of the artist and David Kordansky Gallery, Los Angeles © 2018, ProLitteris, Zurich.

Gilliam sacré à Bâle

BÂLE - Chez les Gilliam, on connaît plutôt Terry, le patron des Monty Python remis au centre de l’actualité par l’interminable saga judiciaire et cinématographique sur son Don Quichotte. Mais le patronyme d’origine normande (dérivé de Guillaume) a d’autres porteurs notables, parmi lesquels Sam, un peintre né à Tupelo dans le Mississippi en 1933, apôtre de sa couleur (premier peintre noir américain à représenter les Etats-Unis à la Biennale de Venise, en 1972, où il est revenu en 2017) et des couleurs. Mis par commodité dans le courant de l’expressionnisme abstrait, il s’est fait une spécialité de drapés à sa façon : des toiles dépourvues de cadres, qui évoquent les draps que les lavandières mettaient à sécher. La série qu’il a faite à partir de 1968, en pleine époque troublée des revendications contre le pouvoir blanc, est présentée dans les salles du Kunstmuseum, alors que ses toiles font également fureur à Art Basel, où elles approchent en transaction du million de dollars. Une reconnaissance tardive mais significative à l’heure où d’autres grands artistes africains-américains comme Kerry James Marshall ou David Hammons occupent le devant de la scène…
Sam Gilliam, the Music of Color, au Kunstmuseum, du 6 juin au 30 septembre 2018.

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Jean Cotelle, Vue du Labyrinthe avec Diane et les nymphes, 1689-91, huile sur toile, 201,5 x 137,5 cm, Petit Trianon, Château de Versailles.

Cotelle, champion oublié des jardins

VERSAILLES - Qui, aujourd’hui, passerait commande à un peintre de 21 tableaux, représentant chacun un bosquet de son jardin, en vue de les exposer dans une galerie de 53 mètres de long ? Il faudrait être fou. Quelqu’un, pourtant, l’a fait autrefois, pour qui rien n’était impossible no trop beau : il s’agit de Louis XIV. Le peintre en question, alors glorieux, porte un nom aujourd’hui oublié : Jean Cotelle (1646-1708). Mais le lieu qu’il a ainsi décoré (le Petit Trianon) et ses toiles existent toujours, fournissant une intéressante parabole sur les aléas de la célébrité. Le château de Versailles a choisi de le célébrer en grand – en lui dédiant une exposition mais aussi en refleurissant les jardins selon les indications tirées de ses toiles. Peintre bourlingueur – il a fait le voyage en Italie, a décoré l’hôtel de ville de Marseille, a inventé des décors éphémères à Avignon – Cotelle mérite toute notre attention. Il se marie parfaitement avec notre goût renouvelé pour les jardins.
Jean Cotelle, des jardins et des dieux au Grand Trianon, du 12 juin au 16 septembre 2018.

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LIVRES

Le dernier train de Bobby

Dans la nuit du 5 au 6 juin 1968, il y a 50 ans, Robert Kennedy, frère cadet de JFK, était assassiné à son tour, alors qu’il avait le vent en poupe pour devenir le prochain candidat démocrate à la présidentielle. Le 8 juin, un train spécial convoie son corps de New York à Washington. Paul Fusco, reporter au magazine Look, reçoit de son rédacteur en chef l’ordre de monter à bord. Il s’équipe de « tonnes de pellicules » et passe tout l’après-midi, jusqu’à la nuit, à appuyer sur le déclencheur : des milliers de personnes sont massées le long des voies pour un grand hommage populaire. Le sujet de Paul Fusco est justement célèbre mais ce livre, qui accompagne une exposition aux Rencontres d’Arles, intègre deux variations plus récentes : celle de Philippe Parreno, qui fait rejouer la scène – un reenactment avec un vrai train saisi par une caméra 70 mm – en 2009, et celle de Rein Jelle Terpstra, artiste hollandais qui travaille sur la notion de mémoire et d’absence. C’est à un travail de fourmi qu’il s’est livré, enquêtant sur les photos de Fusco pour retrouver, un demi-siècle plus tard, des témoins ayant vu le train, pour qu’ils lui fournissent leurs propres photographes. Une étonnante traversée du miroir…
The Train, June 8, 1968, par Paul Fusco, Rein Jelle Terpstra et Philippe Parreno, éditions Textuel, 2018, 144p., 49 €.

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LES VERNISSAGES DE LA SEMAINE


L'ENVOL

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La dernière exposition de la maison rouge avant sa fermeture définitive

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