| Marc Chagall, La Bible
© Musée de Lodève |
Sur les pas de Chagall l’illustrateurL’hôtel du cardinal de Fleury accueille gravures et dessins de l’artiste sur le thème du livre illustré.
L’artiste biélorusse commence à graver à partir de 1922, il a alors 35 ans. L’exposition du musée de Lodève se penche sur trois de ses séries réalisées entre 1926 et 1956 : « Les Âmes mortes », « La Bible » et « Les sept péchés capitaux ». Artiste reconnu, aussi bien en Russie qu’à Paris, Chagall bénéficie très vite de commandes importantes. Ambroise Vollard prend connaissance de son œuvre par l’intermédiaire de Blaise Cendrars et décide de faire participer l’artiste à son projet d’illustrations de livres. Chagall, alors à Berlin, revient à Paris pour travailler sur « Les Âmes mortes » de Gogol, son premier grand livre illustré. De 1924 à 1925, l’artiste réalise 96 eaux-fortes et aquatintes dans un esprit encore très marqué par ses souvenirs de Russie et en parfait accord avec l’esprit de l’écrivain.
« La Bible, pour moi, c’est la poésie toute pure, une tragédie humaine... C’est de la poésie engagée, Baudelaire et Verlaine sont de la famille des prophètes. »(Chagall)
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En 1930, après les « Fables de la Fontaine », l’artiste est confronté à la Bible, toujours pour le même commanditaire. Un voyage en Palestine et un retour sur les œuvres de Rembrandt lui permettent de s’imprégner de cette source d’inspiration qu’il réutilisera souvent par la suite. « La Bible est comme une résonance de la nature et ce secret, j’ai essayé de la transmettre. » Son travail sera interrompu par la guerre qui l’oblige à se réfugier aux État-Unis entre 1941 et 1948. À la mort de Vollard en 1939, Tériade prend la relève et pousse l’artiste à continuer son œuvre. Les 66 planches achevées en 1939 n’ont été complétées qu’en 1956. Parallèlement aux « Âmes mortes », l’artiste se lance dans l’illustration des « Sept péchés capitaux » en 1926 rassemblant des textes de Giraudoux, Paul Morand, Mac Orlan, André Salmon, Max Jacob, Jacques de Lacretelle et Joseph Kessel. Dans les 16 eaux-fortes illustrant les péchés du monde, Chagall témoigne de l’humour fantasque de ses années de jeunesse.
Les 200 œuvres, comprenant gravures et dessins de l’artiste, prêtées par des collectionneurs privés, apportent des éléments de compréhension sur la place de cette technique dans la carrière de Chagall. L’artiste ne s’attaque pas à la plaque de cuivre sans être passé par des études approfondies sur la lumière et la composition. L’aboutissement de ses gouaches témoigne de cette recherche de perfection et de l’importance de la couleur. Outre ses travaux à l’eau-forte, « La Bible » présente un traitement à la pointe sèche sur des fonds travaillés en réserve. Son séjour à New-York et son passage dans l’atelier de Stanley William Hayter lui donnent les clés de l’impression en couleurs. Une expérience qu’il approfondit dès son retour à Paris avec Fernand Mourlot dans les années 50. Plus de 1000 lithographies datent de cette période et explorent toutes les techniques du métier. Après la gravure sur cuivre, la lithographie assouvit son amour de la couleur. Il n’est pas étonnant que l’artiste se soit représenté sous les traits de l’Envie dans la série « Les sept péchés capitaux ». Certainement l’envie de peindre.
| Stéphanie Magalhaes 01.12.2001 |
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