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Marché

Des peintres suisses à redécouvrir

Le nouveau responsable du département d'art suisse de Sotheby's à Zürich nous présente sa «première vente».


Rodolphe-Théophile Bosshard,
Deux jeunes filles à l’oiseau

Estimation : 70 / 90 000 SFr
Depuis 1979, Sotheby’s organise à Zürich deux ventes annuelles consacrées à l’art suisse. L’auctioneer a ainsi promu de grands noms jusqu’alors méconnus à l’étranger... peut-être en raison même de la force du marché local. Aujourd’hui que Ferdinand Hodler, Félix Vallotton, Giovanni Giacometti ou Giovanni Segantini sont reconnus et que de nombreux records ont été établis dans le domaine du paysage, la maison lance d’autres peintres sur le marché international. Il s’agit d’artistes tournés vers l’art français qui ont émergé à l’heure où l’influence d’Hodler faiblissait.

Lukas Gloor, responsable du département d’art suisse depuis cet été, dirige aujourd’hui sa première vente. Il nous a guidé dans ce dédale où se distinguent des noms comme Rodolphe-Théophile Bosshard, Max Gubler Wilhelm Gimmi ou les frères Barraud. Tous séjournaient régulièrement à Paris. En sont témoin une vue de Montmartre par Gimmi (15 000 SFr) ou un Autoportrait de Max Gubler auprès de ses amis français, Marc et Marie Leroy (40 000 SFr). Mais surtout, tous s’inspiraient des dernières tendances en vogue. Le plus bel exemple est peut-être une toile de Bosshard, généralement connu pour ses seuls nus décoratifs. « Bosshard occupe une place de premier ordre dans l’art romand. Mais Deux jeunes filles à l’oiseau est une œuvre est exceptionnelle qui illustre à l’évidence l’influence de son séjour parisien. Une telle approche monumentale, c’est du pur Art Déco !


Cuno Amiet,Nature morte
aux fleurs et aux pommes

Estimation : 750 / 850 000 SFr
Dans ce cadre, la place de Cuno Amiet (1868-1961) est primordiale. Elle l’est avant tout du point de vue historique. Le peintre a inauguré ce renouveau des relations avec la France. C’est lui qui « au travers de ses œuvres amenait en Suisse l’actualité artistique parisienne » avec laquelle il se familiarisa lors de son séjour à Pont-Aven en 1892 et de ses nombreux passages dans la capitale. Sa situation est également exemplaire sous l’angle du marché de l’art. Amiet est l’un des premiers artistes à avoir été redécouvert. « De plus en plus recherché par les collectionneurs et les musées, sa reconnaissance a pris un nouvel essor, il y a environ un an, avec l’acquisition par le musée d’Orsay d’un Paysage d’hiver », explique Lukas Gloor. D’ailleurs, sa Nature morte aux pommes et aux fleurs, estimée à 750 000 SFr est la pièce majeure de cette vente. Elle fut peinte en 1908 l’année même où le collectionneur Richard Kisling achetait sur les conseils d’Amiet, la première peinture de Van Gogh a entrer en Suisse… Clin d’œil aux jeunes membres de Die Brücke, qui considéraient Van Gogh comme l’un des précurseurs de la modernité et invitèrent Amiet à les rejoindre à Dresde, reconnaissant ainsi son rôle de « messager » de l’art français dans les pays germaniques.


 Zoé Blumenfeld
03.12.2001