| Illustration : Groupe Dadaïste, 1922
© Man Ray Trust / ADAGP/Telimage/
Paris 2001 |
Man Ray et l'esprit de MontparnasseLe dernier opus d'Herbert Lottman, spécialiste de la France de l'entre deux guerres, redonne vie au Montparnasse de Man Ray.
Auteur -entre autres- des biographies de Camus et de Colette, Herbert Lottman n'a pas souhaité réaliser ici celle de Man Ray, mais plutôt relater, à travers le cheminement de cette figure mythique, une période et un lieu, symboles de la vie culturelle parisienne. De son arrivée à Paris en 1921 à son retour aux Etats-Unis en 1940, Man Ray fréquente successivement les cercles dadaïste et surréaliste qui composent la scène artistique de l'époque. Introduit par Marcel Duchamp, son compagnon new-yorkais, il découvre l'effervescence d'une ville au sortir du premier conflit mondial. L'époque est au renouveau, l'américain va largement y contribuer. Montparnasse est le point névralgique de cette activité culturelle, le berceau de ce que l'on nomme «l'école de Paris» et Man Ray en est le dénominateur commun. Artiste protéiforme, il apparaît comme le liant entre les écrivains, poètes, artistes et collectionneurs de toutes nationalités qui peuplent alors Paris, l'incarnation du cosmopolitisme de la capitale.
L'auteur évoque l'arrivée de Man Ray à Paris, son installation, ses rencontres, notamment amoureuses, et son évolution artistique progressive du dadaïsme au surréalisme. Peu de place est laissée à l'œuvre elle-même, l'artiste est surtout décrit comme ce dandy mondain autour duquel gravitent toutes les personnalités majeures ou secondaires que compte alors Montparnasse, Tzara, Breton, Foujita, Lee Miller, Kiki, etc. Herbert Lottman tente ici de faire la «biographie» du Montparnasse de l'entre-deux-guerres, empruntant au style qu'il a pratiqué avec bonheur à de nombreuses reprises. Le récit fourmille d'anecdotes et s'attache à décrire très précisément la topographie du «Quartier», des ateliers d'artistes aux cafés et autres lieux de divertissement. Si ces précisions documentent bien la vie telle qu'elle pouvait l'être dans le quartier et les conditions de création artistique, les longs passages consacrés à la vie sentimentale tumultueuse de Man Ray, se justifient plus difficilement. Ne sommes-nous pas alors dans l'aspect le plus anecdotique de la biographie d'artiste ? Cet ouvrage ne vise pas en fait à une analyse de la création artistique d'alors. Son propos tient davantage dans la suggestion du bouillonnement intellectuel qui animait le «Quartier» dans ces années. Herbert Lottman réalise ici un ouvrage hybride, entre la biographie d'artiste et la peinture d'une atmosphère, celle du Montparnasse de l'entre-deux-guerres, entre le roman et le journal.
| Raphaëlle Stopin 11.12.2001 |
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