Newman et les vandales

De Wilde, le conservateur du Stedelijk dans les années soixante s’intéressait aux artistes américains d’après guerre. Il se tourna vers les toiles de Barnett Newman pour sa spécificité, des grands formats, sans aucune trace de spontanéité. Il acquit en 1975 Cathedra (1951), un monochrome bleu qui alla rejoindre Le pont (1954) et Who is afraid of Red, Yellow and Blue (1957), deux autres Newman de la collection du Stedelijk.

Il y a quatre ans, un visiteur de 44 ans sortit un couteau pour taillader ce tableau de 2,5 m de haut sur 5,5 m de large. Il s’agissait d’un fou connu par le musée. Il avait déjà attaqué en 1996 une autre toile de l’artiste du Stedelijk. Il proclamait que cet acte était un geste de résistance des réalistes contre l’art abstrait. Heureusement, les coupures du tableau étaient nettes et le diagnostic fut vite établi : la toile pouvait être sauvée. Commença un travail scientifique d’observation de 18 mois pour définir les modalités de la restauration. La difficulté majeure était de restituer les effets de matière et de texture d’origine. Les spécialistes ont décidé de ne pas toucher aux parties intactes et que les retouches des restaurateurs devaient pouvoir être réversibles. Les opérations furent supervisées par l’équipe de restauration du musée et la mission fut menée à bien avec la collaboration du Netherlands Institute for Cultural Heritage, le tout sous controle d’un comité international de restaurateurs et de spécialistes de l’oeuvre de Newman. Un travail qui allait durer quatre années.

Aujourd’hui la toile est restaurée. Plus fragile qu’auparavant, elle doit être conservée dans des conditions idéales et ne sera plus prêtée pour des expositions. Elle est le thème d’un symposium et est présentée à l’occasion d’une exposition de peintures dédiée aux grands monochromes avec, outre les toiles de Newman, celles de Baer, Charlton, Flavin, Klein, Raysse, Ryman ou Schoonhoven. Lors de cet événement, le public pourra admirer l’œuvre et le travail de restauration.... à distance.