La sculpture sanctifiée à DouaiAprès six ans de restauration, la nef de l’église des Chartreux s’ouvre à de nouveaux fidèles. Françoise Baligand, la conservatrice, nous présente les lieux.
| Chapelle des Chartreux
Vue intérieure
© Musée de la Chartreuse de Douai |
La restauration a été longue, parlez-nous en.
Françoise Baligand, conservateur. Attenante au couvent des Chartreux, qui abrite le musée depuis 1958, l’église date de la fin du 18e siècle et présente donc un style classique. La longue campagne de restauration s’est déroulée en deux phases : dans un premier temps, les travaux sur le bâtiment, classé depuis 1931, ont été confiés aux architectes en chef des Monuments Historiques, Etienne Poncelet et Vincent Brunelle. L’aménagement muséographique a ensuite été placé sous la direction de Jérôme Habersetzer, architecte lauréat du concours organisé par la ville. Financée par l’Etat, la région, le département et la ville, cette entreprise a coûté au total 30 millions de francs.
| Auguste Rodin, L'enfant prodige
© Musée de la Chartreuse de Douai |
Quelles collections seront présentées dans cette nouvelle salle ?
Françoise Baligand. Un beau panorama de la sculpture du 19e siècle occupera l’espace. Tout comme l’ancienne gare du musée d’Orsay, la nef de l’église des Chartreux offre un volume immense et une lumière extraordinaire qui met en valeur la collection. Le parcours débute avec les grands marbres du néoclassicisme, représenté par des œuvres de Théophile Bra comme Aristodème au tombeau de sa fille, se poursuit avec la terre cuite de Carpeaux, L’esclave enchaîné, étude pour la fontaine de l’Observatoire ou encore des bustes de Carrier-Belleuse. Outre Le fils prodigue, bronze de Rodin, extrait de la Porte de l’Enfer, le courant réaliste est illustré par Constantin Meunier ou encore Houssin et son Bateau de sauvetage. Tous les mouvements du siècle sont représentés par les 60 pièces exposées. Grands marbres de Salons, plâtres, bronzes et esquisses en terre cuite retracent la genèse de la sculpture.
Quel parti avez-vous choisi pour la muséographie ?
Françoise Baligand. Cette collection était présentée dans l’ancien musée de Douai jusqu’en 1944, date de sa destruction, pour être ensuite stockée dans « l’énorme dépotoir » qu’était alors l’église des Chartreux. Cet ensemble, oublié de tous, retrouve aujourd’hui sa véritable place dans le musée. Entreposées et négligées durant toutes ces années, les sculptures nécessitaient des restaurations parfois importantes comme pour cette Nymphe des eaux, grand marbre de Cordier, brisé en 58 morceaux. Le service de restauration des Musées de France s’est également livré à de grandes opérations de nettoyage. La muséographie du lieu prend en compte la diversité des matériaux exposés. Le mobilier se décline en fonction des œuvres : de la pierre, du staff pour rappeler les pièces en plâtre, ou encore du laiton patiné très proche des bronzes. Un ensemble sobre et sophistiqué. Si la lumière est essentiellement naturelle, un système d’éclairage zénithal, caché dans la charpente, donne au lieu une dimension scénographique. Le parti pris dans cette muséographie refuse toute symétrie et propose aux visiteurs une promenade à travers un jardin de sculpture. Les œuvres se répondent entre elles par des jeux de regards, de courbes, de contre-courbes. Nous attendons avec impatience l’ouverture des salles d’objets d’art, en janvier, dans les cinq chapelles.
| Stéphanie Magalhaes 15.12.2001 |
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