Les «pensées visuelles» de Philip GustonLe Centre Julio Gonzalez de Valence fait le point sur les dernières œuvres de l’artiste canadien.
| Philip Guston, Red Box, 1970
© Ivam |
L’artiste Philip Guston, né à Montréal en 1913, de parents russes, entreprend très tôt des études artistiques à Los Angeles où il fait la connaissance de Jackson Pollock. Dans les années 30, les deux artistes sont fortement impressionnés par le travail de José Clemente Orozco qui achève alors sa fresque Prométhée pour une école d’art américaine, la Chouinard School of Art. Ce déclic sera pour Philip Guston révélateur d’une vocation, celle de la peinture murale. Un voyage au Mexique lui donne l’occasion de réaliser une œuvre pour le Palacio de Maximiliano à Morelia et son retour à New York vers 1935 est couronné par de nombreuses commandes de fresques murales pour la Works Progress Administration. L’artiste travaille alors dans l’atelier de Stuart Davis.
Les œuvres de Philip Guston, malgré une approche très personnelle, révèlent un certain nombre d’influences. S’il doit son traitement des figures et son penchant pour des thèmes à caractère sociaux-politiques à l’art mexicain, l’organisation de l’espace pictural dénonce l’enseignement de l’art italien, du Quattrocento ou encore de De Chirico. L’artiste rejoint ensuite le courant expressionniste abstrait qui explose alors en Amérique tout en conservant des caractéristiques très personnelles : goût pour les grands formats et pour la figuration. L’année 1968 est un tournant dans son œuvre. Ses peintures prennent des formats réduits. La première exposition de ces créations se déroule à la Malborough Gallery de New York en 1970 et suscite de nombreuses réactions parmi les critiques. L’iconographie qu’il utilise alors exprime sa conception du monde et rappelle sans aucun doute son enthousiasme pour les illustrations de George Herriman et Budd Fisher.
L’exposition de l’Ivam rend hommage aux dernières années de création de l’artiste, période durant laquelle il renoue avec la figuration : 1968-69. Les 28 tableaux One-Shot-Painting décrivent parfaitement l’état d’esprit du peintre et sa philosophie personnelle, ce que Paul Klee décrivait comme des « pensées visuelles». Des œuvres qui reflètent sa volonté provocatrice de transformer la tragédie de la vie moderne en images. Les toiles exposées, Le mur de 1973, Lettre à un ami de 1977 ou encore histoire de 1978, reprennent les symboles utilisés lors de sa période sociale-réaliste : l’horloge, les clés, les semelles de chaussures... On peut suivre une évolution dans son œuvre : de 1969 à 1978 les composantes de ses tableaux flottent dans le vide, de 1977 à 1978, des toiles comme Visiteur ou Martyr témoignent d’une recherche de la forme pure. Pour compléter les 54 œuvres peintes, des poèmes visuels, dans lesquels textes et images ne font qu’un, reprennent le principe des manuscrits du Moyen-Âge.
| Stéphanie Magalhaes 22.12.2001 |
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