| Une actrice célèbre avant et après la révolution, 1998, par Abbas |
Révolution photographique en IranLongtemps mis en difficulté par la rigueur du régime, les photographes iraniens bénéficient d'une reconnaissance éclatante avec l'exposition que leur consacre l'espace Electra, à Paris.
Existe-t-il une photographie iranienne ? L’interrogation est légitime tant sont ténus les échos qui nous parviennent d’une telle activité. Certes, on connaît quelques ténors, comme Abbas ou Reza, qui oeuvrent depuis longtemps pour de grands magazines d’information occidentaux. Mais qui pourrait citer quelque autre nom ? La grande exposition montée sous les auspices conjugués des autorités françaises et iraniennes, et dont le commissaire est Michket Krifa, montre que le flambeau de la photographie ne s’est jamais éteint en Iran depuis la Révolution islamique de 1979.
| Des icônes décalées, par Shadi Ghadirian |
Malgré les restrictions économiques, malgré l’hostilité avouée d’une partie du clergé pour toute représentation de la figure humaine, malgré la censure, les photographes iraniens ont continué d’ausculter courageusement leur pays. Les femmes, qui ont dû troquer leurs parures occidentales pour le voile – comme le démontre de façon saisissante le portrait par Abbas d’une grande actrice - constituent l’un des sujets de prédilection. Mohsen Rastani (1958) ou Isabelle Esraghi (1964) nous montrent une jeunesse plus libérée qu’on ne l’imagine mais les images a priori ironiques de Ghazel (1966) ou de Shadi Ghadirian (1974) – telle cette étudiante en tenue réglementaire portant son "ghetto blaster" sur l’épaule – témoignent d’une blessure non refermée.
| La maison de thé, par Peyman Hooshmandzadeh |
Les communautés d’hommes – fumeurs dans les cafés, jeunes lutteurs, mollahs sur le front – font l’objet de reportages détaillés tout comme les souffrances des soldats, décimés par centaines de milliers durant le long conflit avec l’Irak, et qui ont souvent payé d’une mort solitaire, dans une flaque de sang, leur courage, comme le saisit Jassem Ghazbampour (1963). Plutôt que de traiter de la vie des exilés, d’autres auteurs se réfugient dans la nostalgie. Arman Stepanian Avroshan (1956) fait revivre l’aristocratie arménienne du début du siècle. La nature, chantée par le grand poète Firdoussi, reste un thème noble. Entre images de montagnes sauvages, noces campagnardes, rivages déserts de la Caspienne, on retiendra les beaux clichés d’arbres, violemment contrastés, du cinéaste Kiarostami.
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