| Jacques Renard, 2000
© Ph. Biancotto / CNMHS |
Jacques Renard : «Il n’y a aucun trou dans les caisses»Sévèrement mis en cause par «Le Figaro», le président du Centre des Monuments Nationaux défend sa gestion et sa politique.
«Le Figaro», par la plume d’Anne-Marie Romero, a lancé hier et samedi une violente charge contre Monum, l’ancienne Caisse Nationale des Monuments Historiques et des Sites, et son président, Jacques Renard. D’une virulence inaccoutumée, l’article, qui est fort documenté – une vingtaine de personnes ont été interrogées – accuse la direction de Monum de gabegie, d’incompétence et de désintérêt pour le patrimoine. L’auteur annonce la remise prochaine au ministre de la Culture d’un rapport d’inspection «extrêmement dur» sur la gestion de l’établissement public. Le grief central porte sur le détournement de la mission patrimoniale des monuments, qui serviraient désormais de «salles polyvalentes pour les copains de Jacques Renard», les arts de la scène et les créations plastiques contemporaines accaparant un budget important au détriment, sur les 115 sites gérés, d’un «projet de monument» et de l’accueil du public. Si l’on peut trouver discutables certaines interventions, comme celle de Dezeuze dans les salons de l’hôtel de Sully ou le concert de Björk à la Sainte-Chapelle, la volonté d’ouvrir les monuments à la création contemporaine est une démarche originale qui, par nature, ne peut que susciter de fortes oppositions - on se souvient des polémiques autour des colonnes de Buren ou de la pyramide du Louvre…
«Il ne s’agit pas de caprices personnels, se défend Jacques Renard, Il s’agissait, selon les souhaits de Catherine Tasca, de définir un nouveau projet culturel : les artistes dans les monuments, les monuments dans la vie culturelle. Dans le cas de la commande à Dezeuze, il ne s’agit pas du fait du prince ! Un appel d’offres a été lancé, auquel ont répondu une quinzaine d’artistes, puis un jury de spécialistes a été réuni. En faisaient partie l’inspection générale de la création artistique, celle des monuments historiques, des artistes comme Jacques Villeglé, etc. Dezeuze a été choisi mais le geste est réversible. Et les coûts ne sont pas ceux annoncés par «Le Figaro» (ndlr : 4 millions de francs). L’installation a été payée 600 000 francs. Dans l’enveloppe de 4 millions mentionnés figurent également 800 000 francs de mobilier contemporain ou encore 1,5 million de francs de travaux de mise aux normes.» Parmi les autres actions engagées, on peut citer la commande de vitraux à Sarkis pour l’abbaye de Silvacane, l’affectation du monastère de Saorge à une retraite d’écrivains, la spécialisation de l’abbaye de Montmajour dans la photographie.
Le rapport cité permettra de savoir s’il y a effectivement dérapage, malversation ou incompétence : «Le Figaro» cite notamment l’exemple d’une commande à Karine Saporta pour Chambord, qui aurait coûté 1 million de francs pour 80 spectacteurs payants. «C’est faux, répond Jacques Renard, le spectacle a coûté 300 000 francs à l’établissement et a été monté en partenariat avec le Conseil général. Et s’il est vrai qu’il n’a pas attiré un public nombreux, il faut rappeler que la gestion de Chambord est particulière. Le château relève de Monum mais il y existe également un commissariat chargé de la nature, de la pêche, de la chasse, et du monument lui-même et que cet entrelacs de responsabilités complique la programmation. D’une façon générale – et je veux souligner ce point - tous nos spectacles sont montés en partenariat avec des services de l’Etat, des collectivités locales ou des mécènes. La part de Monum ne dépasse jamais un quart ou un tiers du budget total.»
Les caisses sont-elles vides ? «C’est tout à fait faux. Les budgets ont été régulièrement votés (470 millons de francs pour 2001). Et la part de la billetterie baisse dans le total, de 54% à 52%, car nous avons augmenté les autres recettes. Nous avons par ailleurs mis en place une comptabilité analytique et une décentralisation financière, qui doivent faciliter la gestion des pièces comptables, qui sont près de 30000 sur une année. Je dois par ailleurs signaler que Monum a mieux résisté à l’après 11 septembre que la plupart des institutions culturelles. La chute de la fréquentation n’a été que de 4,5%. Enfin, je dois rappeler que jamais les éditions du Patrimoine n’ont publié autant d’ouvrages. On nous fait un faux procès en nous accusant d’avoir bloqué un livre sur l’hôtel de Sully. Nous attendions simplement de pouvoir y intégrer l’intervention de Daniel Dezeuze !»
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