Bruges ose l’architectureLa cité flamande, capitale européenne de la culture 2002 avec Salamanque, donne aujourd'hui le coup d'envoi de ses manifestations. Elle profite de l’événement pour rattraper son retard en matière d’architecture contemporaine.
| Toyo Ito, détail du pavillon
sur le Burg. |
«Les habitants de Bruges sont très fiers du cœur historique de leur ville et ont toujours vu avec crainte les interventions sur le tissu urbain, explique Steven Slos, chargé de mission pour l’architecture au comité de Bruges 2002. C’est ce qui explique que l’on ait peu d’exemples d’architecture contemporaine dans le centre, qui sont limités à des projets comme celui de Stefan Beel pour le siège d’une banque.» La nomination de Bruges au titre de capitale européenne pour l’année 2002 constituait donc une chance à ne pas manquer pour laisser une empreinte réfléchie du début du 21e siècle. Trois grands projets ont occupé les édiles. Le premier est un équipement important, qui est aujourd’hui mis en lumière pour l’inauguration mais dont la fonction survivra à la fin de l’année européenne, fixée au 17 novembre. C’est un auditorium et centre de congrès, conçu par le cabinet gantois Robbrecht & Daem. La couverture en tuiles brunes est bien sûr une citation des traditions locales. Mais l’on trouve d’autres influences, notamment dans la petite salle de 350 places. Elle a un air de cortile italien, qui lui vient peut-être des réflexions menées avec Philippe Herreweghe, défricheur de la musique baroque italienne et ami des architectes. De même, dans la grande salle de 1200 salles, la lumière fait irruption de façon impétueuse, comme dans les églises romaines de la Contre-Réforme. D’un coût de 40 millions d’euros, l’auditorium sera géré par la Communauté flamande.
| Jürg Conzett, maquette de la
passerelle sur la Coupure. |
Deux autres projets vont aider à mettre la belle cité des canaux, trop longtemps perçue comme la mélancolique «Bruges la morte» de Rodenbach, sur la carte de l’architecture contemporaine. «Un projet symboliquement très important, poursuit Steven Slos, est le pavillon commandé à Toyo Ito. On pourrait le comparer à la pyramide du Louvre. C’est un projet très spécial, à la fois pour l’architecte et pour la ville, qui clôt ainsi le quatrième côté de sa grande place, le Burg, où s’élevait autrefois une église, détruite à la révolution. C’est un objet en verre et aluminim, très lumineux, un pont transparent sur un miroir d’eau. Il sera toujours ouvert, même la nuit.» Le projet, qui n’a coûté que 0,75 million d’euros n’a pas de fonction définie si ce n’est de laisser un signal fort, que les passants pourront s’approprier en le traversant. Le choix de Toyo Ito, virtuose de l’imbrication entre enveloppe et contenu, entre bâti et environnement, semblait tout naturel. Enfin, la Coupure, ce canal déchu qui servait à relier ceux de Bruges-Ostende et Bruges-Gand, obtient la passerelle qu’il attendait depuis longtemps. Dessinée par le suisse Jürg Conzett, qui travaille beaucoup avec Peter Zumthor, elle est fine, élégante et… mobile pour que la Coupure puisse conserver son rôle d’embarcadère pour les bateaux de plaisance. La passerelle est arrimée par des câbles à deux tubes d’acier, qui pivotent sur leur axe pour la lever. Bruges, visitée chaque année par 3 millions de touristes, passionnés par la hanse et Van Eyck, a désormais d’autres atouts à faire valoir…
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