Jean-Pierre Delarge, le dictionnaire d'une vie

Il y avait le Lagarde et Michard. Il y a aujourd'hui «le Delarge», un dictionnaire des arts plastiques modernes et contemporains paru aux éditions Gründ, si lié au travail de son auteur qu’il circule sous son nom. Jean-Pierre Delarge a fait carrière dans l’édition d’ouvrages de sciences humaines mais depuis une cinquantaine d’années, il se consacre à un travail pharaonique : constituer un recueil exhaustif des artistes ayant exposé entre 1905 et 2000. «Depuis que j’ai 12 ans, je m’intéresse à la peinture classique. C’est en 1956 que j’ai eu un déclic et que j’ai commencé à prendre des notes consacrées à l’art contemporain. Un ami éditeur m’avait incité à acquérir une œuvre d’un peintre hongrois réfugié à Paris. Nous étions allés avec ma femme dans son atelier à Montmartre et nous lui avions acheté la toile qui nous déplaisait le moins. Mais, une fois que j’ai voulu me documenter sur lui, je me suis aperçu qu’il n’existait aucun ouvrage sur les artistes modernes à l’exception de quelques grands noms… J’ai donc décidé de faire mon propre livre».

Plutôt qu’un livre, il s’agit à l’époque de notices tapées à la machine sur des fiches en carton et classées par ordre alphabétique dans une boîte. Ces notices à usage personnel, Jean-Pierre Delarge les rédige au gré de ses découvertes. «Ma démarche tient de celle du collectionneur de papillons, je suis toujours à l’affût d’œuvres que je ne connais pas !» Ces nouveaux «spécimens», Jean-Pierre Delarge, les déniche dans la presse ou dans des expositions en France ou à l’étranger car, à de rares exceptions près, il a vu des œuvres de chacun des artistes auxquels il s’est intéressé. Par la suite, il rassemble une documentation très factuelle en menant des recherches dans des établissements spécialisés ainsi que dans sa propre bibliothèque qui réunit entre 5 000 et 6 000 catalogues. Il constitue ainsi une notice biographique (date et lieu de naissance et de mort, nationalité, lieux de résidence, formation et étapes de la carrière), une analyse stylistique qui vise à replacer l’artiste dans son contexte général, et une liste des principales expositions et des collections permanentes où figurent ses œuvres.

Ce n’est que bien plus tard, vers 1985, que l’idée de publier cette somme d’informations est proposée par M. Gründ, son ami éditeur. À l’époque, Jean-Pierre Delarge a quitté ses fonctions professionnelles et il peut se consacrer à cette tâche. Quinze ans plus tard, le dictionnaire parait enfin avec ses 15 000 articles consacrés à des artistes mais aussi à des collectionneurs, des courants, des mouvements ou des techniques. Pourtant, à écouter Jean-Pierre Delarge, cette publication est une nouvelle étape et non un aboutissement. «Depuis deux ans, j’ai environ 3 500 nouvelles notices. Il est possible qu’elles donnent lieu à une nouvelle version papier et que nous passions sur Internet l’an prochain». Pour faciliter la mise à jour qui fait la richesse de l’ouvrage.