LE CAIRE, 19 fév (AFP) - Le sarcophage d'or rendu en grande pompe par l'Allemagne au musée du Caire est-il bien celui du pharaon hérétique Akhenaton? Depuis sa restitution, fin janvier, les experts expriment des avis divergents. "De nombreuses études ont été faites sur l'ensemble du sarcophage, ses parties inférieure et supérieure, et il n'y a pas d'évidence claire confirmant son appartenance à Akhenaton", a affirmé à l'AFP le doyen de la faculté de lettres de Sohag (sud) et professeur d'archéologie Ahmed Al-Saoui. "Les Allemands ont affirmé que les bijoux restitués avec le sarcophage
n'appartenaient pas à Akhenaton", insiste-t-il.
L'Egypte a récupéré fin janvier le bas d'un sarcophage, volé il y a 80 ans dans la Vallée des rois, à Louxor. Il s'agit en fait d'une partie du placage en or du cercueil, qui a été reconstitué en polyester. Le secrétaire général du Conseil suprême des antiquités égyptiennes, Gaballah Ali Gaballah, s'était rendu fin janvier à Munich pour signer un accord de restitution de cette pièce avec le ministre de la Culture de Bavière, Hans Zehetmair, mettant un terme à une affaire qui durait depuis plus de vingt ans. M. Gaballah avait ensuite accompagné le précieux cercueil jusqu'au musée du Caire. "Il est certain que le sarcophage appartient à Akhenaton, car des traces de son nom ont été trouvées sur le sarcophage à l'aide d'instruments sophistiqués en Allemagne", avait affirmé M. Gaballah, en présence du ministre de la Culture, Farouk Hosni. Mais pour M. Saoui, "les inscriptions sur le sarcophage indiquent qu'il appartient à une bien-aimée ou une proche d'Akhenaton, qui pourrait être Meritt Aton, une de ses filles". D'autres études ont conclu que les restes retrouvés dans le sarcophage n'étaient pas ceux d'une femme, explique M. Saoui pour qui il pourrait donc s'agir du cercueil de Sémnékh Qarrei, le frère cadet d'Akhenaton. Les archéologues avaient trouvé dans le sarcophage une momie en mauvais état, qui serait celle d'un homme, mais dont l'identité n'a pas été établie, rappellent les experts. Ces derniers soulignent également qu'un sarcophage en pierre appartenant à Akhenaton a déjà été découvert, à Tell el-Amarna (sud du Caire), qui était la capitale du roi adorateur d'un dieu unique. "Le sarcophage rendu par l'Allemagne a été fait pour une femme, mais il a été modifié après la mort soudaine de Sémnékh Qarrei, pour convenir à un homme", avance encore M. Saoui, qui penche pour la thèse l'attribuant au frère d'Akhenaton.
Pour compliquer encore les choses, l'ex-secrétaire général du Conseil suprême des antiquités et professeur d'archéologie à l'Université du Caire, Abdel Halim Nour Eddine, explique à l'AFP qu'"il n'y a pas de preuves historiques confirmant que Sémnékh Qarrei a réellement existé". "Ce nom pourrait être celui de n'importe quel roi ou reine. Il pourrait s'appliquer à Meritt Aton à ou Kia, une des épouses d'Akhenaton", estime-t-il. "En tout cas, le sarcophage n'appartient pas à Akhenaton", conclut-il, formel. Akhenaton, de son premier nom Aménophis IV, avait répudié la religion officielle, dont le panthéon était dominé par le dieu Amon, pour lui supplanter le culte monothéiste du disque solaire Aton. Le mystérieux bas de sarcophage avait été volé en 1907 et avait disparu depuis 1931. Le couvercle, quant à lui, est conservé au Caire. En 1981, la précieuse pièce avait refait surface, identifiée dans une collection privée suisse par le directeur du Musée d'art égyptien de Munich, qui avait alors entrepris sa restauration. Le chef du gouvernement régional bavarois, Edmund Stoiber, avait accepté en mai 2001 de restituer le sarcophage en échange du prêt préalable du couvercle par le musée du Caire, le temps d'une exposition à Munich, qui vient de fermer ses portes après avoir accueilli quelque 50.000 visiteurs.
par Ryad ABOU AWAD
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