Quand la ville m'était contée...Entre 1940 et 1960, la photographie prend un nouveau tournant en France et aux Etats-Unis. Le musée Malraux du Havre propose un voyage de part et d’autre de l’Atlantique à travers le regard de 13 photographes.
| Leonard Freed, Wall street, 1956
© Fonds d'art contemporain,
Paris |
Expliquez-nous les motivations d’une telle exposition.
Annette Haudiquet, conservateur. Avant la grande exposition consacrée à Auguste Perret, il nous a semblé nécessaire de montrer la réalité d’une ville et d’éduquer ainsi le regard du visiteur. Durant la période 1945-60, le territoire français se relève de la guerre. En 1944, Le Havre est détruit. Sa reconstruction est confiée à l’architecte Auguste Perret qui refuse de prendre modèle sur les villes américaines. Il nous a semblé intéressant de confronter le regard des artistes sur un même thème : la ville. Ainsi, les 63 œuvres prêtées par le Fonds national d’art contemporain (FNAC) proposent un parcours dans l’histoire de la photographie et des mentalités entre Paris et New York. Parmi les 13 photographes sélectionnés, Lisette Model, René-Jacques, Robert Doisneau, Helen Levitt, Sy Kattelson, Sabine Weiss, Robert Rauschenberg...
Comment est organisée l’exposition ?
Annette Haudiquet. La présentation débute avec deux photographies d’amoureux : Le Baiser de l’Hôtel de Ville (1950) de Robert Doisneau et Wedding Cake, New York (1949) de Louis Faurer. Nous avons ensuite opté pour un parcours linéaire avec toutefois certains rapprochements inévitables entre Sabine Weiss et Lisette Model, par exemple. Notre objectif était de montrer, à parts égales, la réalité urbaine de deux pays : les Etats-Unis et la France. L’idée n’est pas d’opposer mais de déceler les spécificités nationales. Comme le rappelle le titre de l’exposition, «Des hommes dans la ville», l’homme reste au centre des préoccupations pour ces artistes.
| Louis Faurer, Wedding cake,
New York, 1949
Fonds d'art contemporain,
Paris
© ADAGP |
Comment peut-on définir la photographie française ?
Annette Haudiquet. Cette période correspond, en France, à un intérêt nouveau pour la campagne proche et les clichés de banlieue. Des artistes comme René-Jacques (né en 1908), Robert Doisneau (1912-1995) et Sabine Weiss (née en 1924), tous membres de l’Ecole « humaniste » posent un regard tendre, rempli de poésie sur la population des quartiers modestes. Les balayeurs, les prostituées ou les ouvriers trouvent leur place dans des photographies comme Les Petits enfants au lait (1934), Les 20 ans de Josette(1947) ou L’Enfant papillon(1945) de Robert Doisneau, Pigalle de René-Jacques ou Le Facteur à Lyon de Sabine Weiss.
Et en Amérique ?
Annette Haudiquet. Les villes américaines se distinguent par leur verticalité, leur foule bigarrée et anonyme. Contrairement à la France, le paysage est essentiellement urbain. Datant des années 30, la pratique de la photographie à caractère social demeure dans les œuvres de l’après-guerre. À l’instigation du gouvernement, une campagne de photographies devait établir un état des lieux de la campagne paysanne. Les clichés se font âpres et rugueux, témoignant d’un réalisme propre à l’Ecole de New York. On peut cependant noter des points communs entre les deux pays. Les photographies nocturnes utilisant les lumières de la ville sont autant l’attribut de William Klein, René-Jacques que de Louis Faurer dans Courtyard at Hotel Marguerey, Park Avenue ( 1950).
| Stéphanie Magalhaes 27.04.2002 |
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