| | Privatiser le pont du Gard ?Le conseil général du Gard se réunit lundi pour décider s'il doit ou non confier l'exploitation du site à une filiale de la CCI.
PONT DU GARD (Gard), 1er mars (AFP) - L'aménagement des abords du pont du Gard, qui ambitionnait de faire de l'aqueduc romain un produit touristique rentable, s'est transformé en gouffre financier, engloutissant près de 48 millions d'euros depuis 1985. En 2001, 1,4 million de personnes ont visité le site, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO. Mais, après avoir pris quelques photos, pique-niqué sur les rives du Gardon et acheté des cartes postales, le touriste repart, sans avoir laissé un seul centime, ou presque, dans les espaces culturel et commercial ouverts en 2000.
C'est pour transformer les promeneurs en clients que, depuis 1985, les élus gardois tentent d'aménager le site en pôle touristique rentable. Le conseil général a étudié de nombreux projets, de "l'espace muséographique" au véritable parc d'attractions. Finalement, en 1996, la majorité PS-PC est unanime pour confier à la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Nîmes, en vertu d'une concession de 50 ans, un vaste programme d'aménagement : on construit 12.000 m2 de bâtiments, regroupant une exposition multimédia, un restaurant, des boutiques... L'aménagement coûte 31,71 M EUR, financés par les autorités locales, nationales et européenne. Les concepteurs assurent alors qu'il attirera 400.000 visiteurs payants. En fait, en 2001, ils n'ont été que 60.000. Aujourd'hui, seuls quelques visiteurs errent dans l'immense salle abritant la "Grande expo", au demeurant très bien conçue, qui retrace l'histoire des aqueducs romains et de l'eau dans les villes antiques. Les 74 employés se désennuient tant bien que mal en sirotant un café au self-service ou en bavardant devant les boutiques de souvenirs désertes.
Faute de clients, le pont est aspiré dans la spirale des pertes: 2,6 M EUR en 2000, 3,5 M EUR en 2001 et au moins autant cette année. "On a fait quelque chose de culturel-cultureux", dénonce Christophe Bouchet, conseiller général PRG et auteur d'un rapport sur le sujet. "60% des visiteurs sont des familles avec enfants. Ils ne vont pas s'enfermer dans un tombeau", dit-il, faisant référence au gigantesque bâtiment de béton couleur pierre qui abrite l'exposition et que ses détracteurs surnomment le "bunker". "En voulant chercher à gagner de l'argent avec le pont du Gard, on l'a travesti", tempête Armand Brunel, premier adjoint sans étiquette à la mairie de Vers, commune où est situé le pont. "Le pont, on le regarde, c'est tout. Il suffisait d'y installer des tables de pique-nique et des WC". Face à l'échec financier, la CCI vient de présenter un "véritable plan de relance commerciale" consistant à confier l'exploitation à la Caisse des dépôts et consignations (publique) et à Culture Espaces, société privée filiale du groupe Suez.
Qualifié de "privatisation" par certains élus, le projet a déclenché une levée de boucliers au sein de la majorité départementale PS-PCF: "Je ne vois pas une seule voix qui pourrait se prononcer en sa faveur", estime M. Bouchet, membre de la commission départementale qui étudiera lundi le projet de la CCI. M. Bouchet espère qu'il ne faudra pas rouvrir le portefeuille des contribuables. Il rappelle que ce qui devait être une poule aux oeufs d'or a déjà coûté 47,7 M EUR si on totalise tous les projets étudiés depuis 1985.
Par Loïc Vennin
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