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Où en est le livre d’art ?

Le Salon du livre est l’occasion de publier un bilan de santé de l’édition d’art en France. Les faits marquants des dernières années sont le succès des catalogues d’exposition et l’accroissement inquiétant des droits de reproduction.

Le poids de l’édition d’art dans le chiffre d’affaires total du secteur reste contenu à 5%, soit un peu plus que la bande dessinée (4,1%), autant que le droit (5,1%) mais largement en-dessous des livres pour la jeunesse (9,3%). Cette proportion est en croissance continue depuis 1997 mais elle n’a pas encore atteint son niveau record de 1996 (5,5%). Si l’on décompose ce chiffre, on remarque la domination irrésistible des «beaux livres». Les livres d’études, qui représentaient encore 12% du chiffre d’affaires des livres d’art, sont aujourd’hui à moins de 5%. Le nombre de titres publiés s’est stabilisé autour de 1500 par an avec des années plus fastes (1602 en 1996) ou plus creuses (1316 en 1999). Le tirage moyen d'un ouvrage dépasse de peu 5 000 exemplaires.

Pour Chantal Desmazières, présidente du groupe Art du Syndicat national de l’Edition, ces résultats sont satisfaisants : «Cette situation est d’autant plus remarquable que l’édition d’art est confrontée à de multiples problèmes dont le plus préoccupant est celui des droits de reproduction. Ils sont de plus en plus difficiles à obtenir et leur coût est souvent prohibitif. Ils ont pratiquement doublé en dix ans alors que les prix des livres ne cessent de baisser». Pour Jean-Loup Champion, de Gallimard, «l'iconographie peut être un poste aussi lourd que la gravure ou l'impression et représenter un quart du budget d'un livre». Et la baisse de la part du livre d’études ? «Il y a de plus en plus d’étudiants en histoire de l’art, la vie culturelle en France est de plus en plus active, juge Chantal Desmazières. Je crois au programme de Jack Lang d’introduction de l’art à l’école. Nous sommes aussi là pour proposer de nouvelles choses aux professeurs. Et la création de l’Institut national d’histoire de l’art, en instaurant un pôle d’études et de recherches autour de l’histoire de l’art, devrait stimuler la création et inciter à la publication d’ouvrages de fond.»

Chantal Desmazières estime essentiel que les éditeurs d’art se regroupent dans ce Salon et dans d’autres manifestations, pour informer les lecteurs et se faire entendre des pouvoirs publics. L’organisation d’un «Mai du livre d’art» a donné une visibilité accrue au secteur, qui a été relayée par la presse : «Art Press» a publié en mai 2001 un numéro spécial, «L'Œil» a créé un prix du livre d'art. Quelle alchimie s’impose pour produire un best-seller ? Faire un catalogue d’exposition ! Si un certain nombre d’éditeurs se sont engouffrés avec succès dans cette activité, comme Somogy, la Réunion des musées nationaux en demeure le principal pourvoyeur. Ses catalogues sont souvent coédités avec d’autres institutions culturelles (musées de région, Galerie nationale du Jeu de Paume, Association française d'action artistique, Centre Georges Pompidou) ou avec d'autres éditeurs (Gallimard, Le Seuil, Flammarion, Calmann-Lévy, Hazan, etc). Pour Paris-Musées, «les grosses ventes accompagnent les grandes d’expositions. On peut passer de 800 exemplaires à plus de 50000». Aux éditions du Centre Pompidou, une trentaine d’ouvrages sont édités par an, dont neuf en co-édition. Le succès que remporte actuellement l'exposition «La Révolution Surréaliste» est emblématique : il a permis de vendre 12 000 exemplaires du catalogue et l'on vient d’en rééditer 8 000 pour faire face à la demande.


 Muriel Carbonnet
26.03.2002