São Paulo, une biennale militanteDirigée pour la première fois par un commissaire étranger, Alfons Hug, la biennale brésilienne explore le thème de la métropole et s’ouvre aux pays «périphériques».
| Bodys Isek Kingelez (Congo), Projet
pour le Kinshasa du 3e millénaire,
maquette, 1997, diamètre : 450 cm,
Fondation Cartier pour l'art contemporain. |
Un demi-siècle, l’âge de la maturité ? La Biennale de São Paulo, fondée en 1951, frappe fort avec cette 25e édition. Pour la première fois, c’est un commissaire étranger, Alfons Hug, qui a été chargé de coordonner l’événement, qui réunit 190 artistes de 70 pays. Soucieux de laisser toute leur place aux pays de la périphérie, il a voyagé dans plus de vingt pays pour faire passer le mot d’ordre : «Iconographies métropolitaines». «Aujourd’hui comme il y a un siècle, la métropole détermine le profil de la création artistique, postule Alfons Hug. Mais lorsque l’on prend en compte la dimension que ces villes ont désormais atteinte, la question se pose de savoir comment les artistes traitent le problème de l’échelle. Quelles forces créatives la métropole libère-t-elle ? Comment l’art de la métropole réagit-il face pauvreté, à la violence, à l’exclusion sociale ?» C’est dans la première section, intitulée «Douze métropoles» (la douzième étant la cité utopique) qu’est alimentée cette recherche.
| José Damasceno (Brésil), Trille
sonore et projection,
technique mixte, 2001 |
L’approche de Hug est résolument militante. Dans le pavillon industriel construit par Oscar Niemeyer, il prend à partie les «biennales de l’OTAN», sur l’axe New York - Cologne, soulignant que les grandes manifestations comme la Documenta de Kassel accordent une sur-représentation – jusqu’à 90% - aux artistes des pays de l’Alliance atlantique. «La 25e Biennale s’est engagée à inviter des pays qui se situent en dehors des principaux courants. On a rarement autant vu par le passé d’artistes africains et asiatiques. Pour la participation africaine, l’accent est mis sur l’art vidéo, sous le commissariat de Marcel Odenbach, pour contredire la réputation low-tech qu’on lui attribue habituellement.»
La référence à la Biennale de Venise, la mère de toutes les biennales qui ont éclos depuis lors (une cinquantaine à ce jour), est clairement énoncée avec le maintien d’une représentation nationale. Pour chacun des 65 pays de cette section, un seul artiste a été sélectionné même si la France peut prétendre en aligner deux : Anri Sala, présent sous la bannière albanaise, a été choisi par Corinne Diserens, en même temps que Jean-Luc Moulène. Comme cela devient la norme, le web art est particulièrement bien représenté, sous la houlette de Rudolf Frieling, du ZKM de Karlsruhe (Centre pour l’art et la technologie). On est cependant surpris d’y retrouver le découpage traditionnel faisant la part belle aux pays occidentaux avec, comme faire-valoir symbolique, un champion chinois ou slovène. L’Afrique, bonne pour la vidéo mais pas encore pour le web ?
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