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Marché

Le Maître de Moulins par Albert Châtelet


Peinture et poésie, le dialogue par le livre par Yves Peyré


Jean-Loup Champion : «Attention à la sculpture»

Pour le responsable des livres d’art chez Gallimard, le succès éditorial obéit rarement à la rationalité pure.

Deux mots sur votre parcours chez Gallimard.
Jean-Loup Champion.
Je suis entré chez Gallimard en tant que directeur littéraire, rôle que je tiens encore pour des auteurs de la Collection blanche, notamment Paula Constant, qui a reçu le prix Goncourt il y a quelques années. En janvier 1988, on m’a demandé de créer une structure de livres d’art. Avant, chez Gallimard, elle se résumait à l’«Univers des formes», la collection d’André Malraux.

Que représente le livre d’art chez Gallimard ?
Jean-Loup Champion.
La part du livre d’art dans le chiffre d’affaires de Gallimard est minime, elle est de l’ordre de 3,5%. L’art est bien sûr traité dans d’autres collections comme «Découvertes». Mais, pour nous en tenir à la structure que je dirige, nous publions une quinzaine de «beaux livres» par an, en plus de collections comme «Art et artistes»que j’ai lancée en 1991 et qui compte aujourd’hui vingt-sept titres. On distingue trois catégories et l’idéal serait qu’elles constituent chacune un tiers du total : les coéditions, qui se font surtout à l’occasion des expositions, les achats à l’étranger et les commandes. Le coût total d’un ouvrage peut varier entre 300 000 francs et 2 millions de francs.

On parle beaucoup de la dictature des grandes expositions dans la production éditoriale.
Jean-Loup Champion.
Il est certain qu’il est intéressant de rattacher une parution à un événement. Mais certaines sont tout à fait indépendantes de l’actualité comme notre récent Maître de Moulins par Albert Châtelet. Par ailleurs, les grandes expositions font avancer la recherche. Je doute que l’on aurait sorti un Chassériau sans la rétrospective du Grand Palais. Nous l’avons mis en librairie plusieurs mois avant l’exposition et les ventes ont effectivement été décevantes. Sa seconde carrière a débuté après le vernissage.

Détaillez-nous quelques réussites et quelques… échecs.
Jean-Loup Champion.
Je suis historien de l’art, spécialisé en sculpture. C’est l’exemple parfait d’un secteur qui ne marche pas ! L’un de nos grands échecs a été l’ouvrage sur Auguste Préault, qui accompagnait une exposition, pourtant présentée dans de grands musées, comme Orsay, Blois et Amsterdam. Nous en avons vendu moins de 1000 exemplaires alors que nos tirages moyens se situent autour de 3000 ou 4000 exemplaires. En analysant, on peut toujours trouver des explications : l’artiste était mal connu du grand public et le médium aussi. A l’opposé, Pompon et la sculture animalière marchent très bien. Du côté des succès, je suis agréablement surpris par Une famille dans l’impressionnisme de Jean-Marie Rouart. L’auteur raconte de l’intérieur comment une famille vit dans la peinture. Ce sont d’ailleurs ses tantes qui sont en couverture, peintes par Renoir. Peinture et poésie d’Yves Peyré est une divine surprise. C’est un livre avec beaucoup de texte, sur un sujet a priori difficile, qui aurait normalement dû avoir une carrière modeste. Mais nous avons déjà dû le réimprimer !


 Rafael Pic
27.03.2002