Le grand art de la miniatureBonhams propose aujourd’hui à Londres l’une de ses ventes annuelles de miniatures européennes, une discipline qui attire des collectionneurs passionnés.
| Samuel Cooper (1609-1672),
A Lady
Est. : 20 000 - 25 000 £ |
Qu’est-ce qu’une miniature ? Dans l’esprit des gens, une peinture de petit format, généralement délicate. Pour Nicole Kramer, spécialiste, il faut retourner à l’étymologie du mot : «La miniature était la lettre tracée au minium, c’est-à-dire à l’oxyde de plomb. A l’origine, c’était donc une écriture polychrome et ornementée pour manuscrits. Puis l’on est passé de la lettre enluminée au portrait : le pionnier est François Ier, qui fait peindre le sien en 1527 sur un traité de paix conclu avec l’Angleterre.» Si la dimension est un élément important de la miniature – on trouve des compositions de 2 centimètres de côté – ce n’est pas le seul. Camilla Seymour, expert chez Bonhams, met en avant d’autres caractéristiques : «Le support est très important. Les plus belles miniatures sont peintes sur ivoire, à l ‘aquarelle. Cette surface est la plus unie. D’autres sont peintes à l’huile sur cuivre.»
Si les miniatures du 16e siècle sont très recherchées – en particulier celles du peintre anglais Nicholas Hilliard – l’âge d’or de la spécialité se situe au 18e siècle et au début du 19e siècle, avant que la photographie naissante lui porte un coup fatal. Les miniatures sont essentiellement des portraits – c’était un moyen de conserver une trace de la personne aimée notamment pour les marins ou les militaires – mais ce thème n’est pas exclusif. On trouve des paysages, des animaux ou des scènes galantes voire osées, dont Fragonard s’était fait une spécialité. Les miniatures étaient portées en pendentifs et en bracelets mais on en trouve également montées sur des bagues ou enchâssées dans des étuis à cure-dents…
| William Grimaldi, Charlotte Sophia
of Mecklenburg-Strelitz, 140 mm.
Estimation : 10 000 - 15 000 £ |
Pour déterminer la valeur d’une miniature, il faut prendre en compte plusieurs critères : la qualité du dessin, le sujet, la signature. «Mais certains artistes, parmi les meilleurs, ne signaient pas explique Nicole Kramer. Ils considéraient que la qualité de leur travail était suffisante et faisait parfaitement office de signature. Il faut par ailleurs faire attention aux signatures apocryphes : certains miniaturistes ont imité celle d’Isabey, par exemple.» Camilla Seymour met en avant un autre danger : la difficulté de distinguer les faux, qui sont souvent des photographies repeintes. Le marché de la miniature, dont les antiquaires sont les principaux vecteurs avec quelques rares maisons de ventes, comme Pescheteau-Badin à Paris, a connu un creux dans les années soixante avant de rebondir il y a une vingtaine d’années. Si l’on peut trouver des pièces convenables du 19e siècle pour quelques centaines d’euros, les maîtres coûtent beaucoup plus. «L’estimation la plus haute de la vente de ce jour, à 20000 £, concerne un portrait de femme portant un décolleté, par Samuel Cooper (1609-1672), précise Camilla Seymour. Mais s’il était signé Hilliard, il vaudrait trois ou quatre fois plus cher…»
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