Les ambitions nouvelles du Victoria & AlbertLe musée anglais lance un ambitieux plan de développement décennal. Cette réorganisation, qui met en avant la création contemporaine, est annoncée alors que ses concurrents londoniens marquent le pas.
| Mark Jones, directeur du Victoria &
Albert Museum |
Caché par le trafic incessant d’Exhibition Road, le Victoria & Albert Museum a longtemps eu la réputation d’une belle endormie. Des trésors à profusion, certes, mais mis en scène de façon vieillotte dans un parcours labyrinthique… Cela fait longtemps qu’il n’en est plus ainsi mais les déclarations relâchées jeudi 18 avril par le directeur, Mark Jones, le confirment par un «signe fort». Le musée, spécialisé dans les arts décoratifs, entreprend un programme de rénovation de 150 millions £ sur les dix prochaines années. En le détaillant, Mark Jones a mis en avant la révolution qu’a constituée le retour à l’entrée libre, en novembre 2001 : «Nous avons connu en 2001 notre plus forte fréquentation depuis l’instauration d’un droit d’entrée volontaire en 1985. Ce qui montre que l’entrée gratuite a permis d’ouvrir le musée à un nouveau public.» Les chiffres sont en effet clairs : en 2001, le V&A a accueilli 1,86 million de visiteurs, soit un demi-million de plus que l’année précédente.
| Spiral, le projet de Daniel Libeskind |
Le musée continue sur sa lancée en réaffirmant sa volonté de porter à terme le projet architectural de Daniel Libeskind. Ce bâtiment appelé Spiral, dont la silhouette offira un contraste frappant avec les constructions victoriennes, accueillera toutes les formes de création contemporaine auxquelles l’institution est désormais attentive : le design, en premier lieu, mais aussi l’architecture, la photographie ou la mode. Son coût est estimé à 75 millions £ et il devrait être achevé en 2007. Le reste du budget servira à donner une véritable logique au parcours muséographique. Le jardin intérieur sera redessiné et servira de carrefour, comme un cloître d’abbaye médiévale. Les différents départements seront organisés autour de ce foyer, comme les quartiers d’une ville : on trouvera l’Europe, l’Asie, la création contemporaine, etc. Après l’ouverture en novembre dernier des British Galleries, le Victoria & Albert s’impose une cadence olympique. Lundi 22 avril, c’est le nouvel espace consacré au design qui est inauguré dans les anciennes salles «The Best of British». Puis la réflexion portera sur les galeries consacrées au Moyen Age et à la Renaissance, qui seront entièrement réaménagées dans les dix-huit prochains mois.
Dans le monde des musées londoniens, le V&A tente un petit coup de force médiatique. La National Gallery entre dans une période délicate avec la nomination d’un nouveau directeur, Charles Saumarez-Smith. Le British Museum se débat dans de sérieux problèmes budgétaires, envenimés par l’interminable polémique sur les frises du Parthénon et par la récente révélation portant sur des bronzes du Bénin cédés à vil prix. La Tate Modern, qui n’est pas non plus en excellente forme financière, a vu deux de ses principaux dirigeants claquer la porte. Son conservateur, Lars Nittve, a répondu aux sirènes de à Stockholm l’an dernier, et Jeremy Lewison, directeur des collections, vient de démissionner il y a quelques jours. Les déboires des uns faisant le bonheur des autres, le V&A entend en profiter pour faire de l’ombre à ses concurrents.
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