Cherbourg fait entrer la mer au muséeLa Cité de la Mer vient d’ouvrir ses portes à Cherbourg. Une manière, pour cette ville du Cotentin, de faire revivre le temps du tourisme maritime qui a assis sa renommée au début du siècle.
| le Pavillon des Expositions
Permanents et la Gare Maritime
Photo : Fernando Urquijo
© Studio Milou architecture |
Le projet de réhabilitation de l’ancienne gare maritime transatlantique a été lancé en 1997 par la Communauté urbaine de Cherbourg. Le lauréat du concours, Jean-François Milou, auteur du Musée archéologique de Bougon et qui travaille actuellement sur le musée de l’Automobile à Mulhouse, s’est lancé dans cette vaste entreprise d’une valeur de 25 millions d’euros. «Au début, Cherbourg était considéré comme un lieu de transit. Les voyageurs arrivaient en paquebot et repartaient en train, de la gare maritime conçue à cet effet. Cet important équipement territorial a été jugé obsolète avec le développement de l’aviation. Le programme initial avait pour priorité de réhabiliter ce site des années trente sans créer de traumatisme. Nous avons voulu donner au lieu le caractère d’une grande promenade dans un parc maritime en bord de mer. Pour cela, il nous fallait respecter l’architecture de la gare, donner au hall le statut d’un grand boulevard couvert et enfin définir une place discrète pour le sous-marin, «Le Redoutable». Les matériaux utilisés prennent en compte l’histoire du bâtiment existant : acajou, béton granitique, cassiat de céramique, acier noir et bronze redonnent au lieu l’ambiance des années trente. Notre réussite réside dans la paix qui se dégage de cet assemblage d’éléments pourtant peu propices à un sentiment de pacification : une gare, un sous-marin nucléaire. Le projet était énorme, compte tenu d’un budget réduit, mais nous sommes parvenus à cacher la complexité de la réalisation derrière une simplicité d’écriture», explique Jean-François Milou.
| le Pavillon des Expositions Permanents,
le sous-marin le Redoutable et la rade
Photo : Fernando Urquijo
© Studio Milou architecture |
Sur une surface de 11 000 mètres carrés, la Cité de la Mer associe la Grande Halle, ancien hall des trains, au Pavillon des expositions permanentes, situé au-dessus de la darse qui accueille «Le Redoutable». La ville de Cherbourg renoue ainsi avec une tradition de construction sous-marine et un héritage historique, celui des liaisons transatlantiques. Commandé en 1967 à l’arsenal de Cherbourg par le Général de Gaulle, le sous-marin nucléaire a parcouru les mers pendant vingt ans avant de rejoindre sa ville d’origine et d’être désarmé en 1991. Après une descente dans les profondeurs, enfants et adultes pourront visiter le monstre de 128 mètres de long. Parmi les pièces importantes de la Cité de la Mer se trouve le bathyscaphe Archimède, déposé par le musée national de la Marine. Cet «ascenseur» était descendu à plus de 9500 mètres de profondeur dans la fosse des Kouriles au Japon. Autre grand moment : l’aquarium. Situé dans le pavillon des expositions permanentes, le bassin s’élève sur douze mètres de haut et retient plus de mille mètres cube d’eau. «Il s’agit d’une pièce unique en Europe par ses dimensions. Le thème choisi pour cette réalisation tourne autour de la pénétration de l’homme sous la mer. L’aspect pédagogique occupe une grande place dans la conception de l’ensemble. D’ailleurs, certains bassins permettent aux enfants de caresser les poissons. La grande colonne d’eau, divisée en trois étages, permet au visiteur de découvrir la faune (requins, méduses, raies, coraux) et de ressentir les sensations des fonds marins. » précise Jacques Rougerie, architecte de l’aquarium, également auteur du centre Océanopolis de Brest et de Nausicaa de Boulogne-sur-mer.
La muséographie, réalisée par le groupe Guliver, participe activement à ces impressions de profondeur. Selon Bruno Tainturier «Il s’agissait de faire une muséographie sans musée puisque les seules pièces de la collection étaient Le Redoutable et l’aquarium. Notre objectif consistait donc à faire parler ces deux éléments ensemble. Le parcours de visite s’enroule autour de la grande colonne d’eau. Si le niveau supérieur est structuré et géométrique, laissant au visiteur le temps de se familiariser avec l’aquarium, la descente se matérialise par une fluidification de l’espace, rendu par l’utilisation de matériaux comme le tissu. Des effets d’éclairage augmentent la sensation de découverte devant les trésors de la mer. Au niveau zéro, la visite du Redoutable relate l’histoire des sous-marins mythiques jusqu’à l’invention de la propulsion nucléaire». Les visiteurs peuvent même s’accorder le pilotage d’un Nautilus virtuel.
| Stéphanie Magalhaes 02.05.2002 |
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