Peur sur la préhistoireLa Section française de l’Institut international de conservation (SFIIC) a recemment tenu ses journées d’étude sur la conservation de l’art préhistorique. État des lieux et étude de cas.
La SFIIC est une association loi 1901 réunissant des professionnels du monde de la conservation : praticiens, scientifiques et conservateurs. Un conseil d’administration de neuf membres en gère le fonctionnement. «Émanation de l’IIC ( International Institute of Conservation), organisation basée à Londres, notre objectif est de faire le point sur les recherches effectuées et d’en vulgariser les résultats lors de nos journées d’étude. L’esprit pluridisciplinaire de l’association permet d’aborder des thèmes aussi variés que «Le dessalement des matériaux poreux» en 1996 ou «L’informatique et conservation-restauration du patrimoine culturel» en 1997» explique Marcel Stefanaggi, spécialiste en peintures murales au Laboratoire des monuments historiques et membre de l’association.
Cette année, à l'Institut de paléontologie humaine, les intervenants se sont déplacés du monde entier pour exposer, durant deux jours, les problèmes relatifs à l’art rupestre. La grotte de Lascaux reste au centre des débats avec, notamment, de nouvelles analyses des peintures de La scène du puit, panneaux majeurs de l’art pariétal paléolithique. Des représentants de nombreux organismes comme le Centre national de la Préhistoire de Périgueux, le Centre de recherche et de restauration des musées de France ou le CNRS, ont expliqué les différents prélèvements effectués ainsi que leurs conclusions. La gestion microclimatique du site est également abordée et une numérisation de la grotte devrait bientôt permettre d’étudier les circulations d’air ainsi que le transport de l’humidité dans la cavité. Le cas de la grotte Cosquer est également étudié. La conservation des peintures rupestres de cette cavité sous-marine, déjà remise en question par l’impact des flux entrants, est aujourd’hui confrontée à une mise sous pression de l’atmosphère interne. Si la surveillance microbiologique de la grotte Chauvet, effectuée depuis cinq ans, a permis de conclure à un équilibre, Geneviève Orial du Laboratoire de recherche des monuments historiques préconise la vigilance.
Alan Watchman, responsable du département d’archéologie et d’histoire naturelle de l’université nationale d’Australie, soulève le problème de la poussière se déposant sur les peintures et les gravures dans les abris décorés du nord du pays et provoquant des encroûtements de surface. En Chine, la datation directe par analyse cristallographique des pétroglyphes de la région de Quinghai a permis de dresser une chronologie d’ensemble de ces signes gravés dans la roche. La préservation des sites constitue l’une des principales préoccupations des chercheurs. La solution idéale, selon Françoise Ballet, conservateur du patrimoine de la Savoie, serait de recouvrir, après moulage, les roches gravées et d’aménager des sites pour les visiteurs intéressés. Les archéologues libyens préconisent, eux, le développement d’une base de données sur l’art rupestre et l’ouverture d’un parc archéologique national pour préserver les massifs du Sud de la Libye. Outre les sites, l’industrie archéologique a également reçu une attention particulière. Le mobilier paléolithique, légué par Edouard Piette, au musée des Antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye a été l’objet d’une étude approfondie démontrant les effets négatifs des interventions précédentes. Ainsi, la célèbre Dame à la capuche de Brassempouy a subi des dégradations dues à l’utilisation d’élastomère pour les moulages. Plus que de découvrir de nouveaux sites, les chercheurs semblent aujourd’hui s’inquiéter de la préservation du patrimoine en place et de sa mise en valeur. Comment présenter l’art rupestre sans mettre en danger sa pérennité ?
| Stéphanie Magalhaes 03.06.2002 |
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