Succession Giacometti : imbroglio sans finA l'annonce d'une prochaine vente chez Christie's, l'association créée par la veuve du sculpteur s'insurge contre la dilapidation des œuvres de l'artiste par ses exécuteurs testamentaires.
PARIS, 6 juin (AFP) - Le serpent de mer de la Fondation Alberto et Annette Giacometti, décidée par la veuve du sculpteur mis en carafe depuis 14 ans, vient de ressurgir, au risque d'une violente polémique. À l'annonce de la vente aux enchères, le 28 septembre prochain, de trent-huitsculptures d'Alberto Giacometti (1901-1966) provenant du legs des deux époux, l'Association de préfiguration de la Fondation s'est dit «stupéfaite» face à «une telle hémorragie d'oeuvres et d'argent».
Car des sommes importantes et des intérêts contradictoires sont en jeu dans l'affaire, véritable Loch Ness de l'Art moderne. L'histoire, au départ, est simple. En 1988, Annette Giacometti, veuve d'Alberto, sans enfant, effectue les premières démarches en vue de la création d'une Fondation Alberto et Annette Giacometti et crée, en 1989, l'Association qui la préfigure. Son but : éviter la dispersion des oeuvres d'Alberto, estimées à quelque 122 millions d'euros et qui resteront dans des entrepôts, jusqu'à ce qu'elles soient réunies au sein d'une Fondation. Tel est le voeu d'Annette Giacometti, consigné dans son testament rédigé en 1990, trois ans avant son décès, le 19 septembre 1993. En juillet 1994, son exécuteur testamentaire, Me Roland Dumas, demande au commissaire-priseur Jacques Tajan de disperser quatorze sculptures et quatre peintures pour assumer les frais de la succession. Total : plus de 6,5 millions d'euros. Avec les avoirs d'Annette au moment de son décès, les gestionnaires de la succession disposent de 7,6 millions d'euros. Du côté des pouvoirs publics, les choses traînent. A la Culture, Jack Lang s'était prononcé pour la création d'une Fondation, M. Philippe Douste-Blazy, lui, donnera un avis défavorable. Quatre années passent. Le 13 janvier 1998, l'Association Alberto et Annette Giacometti s'inquiète dans un communiqué adressé à l'AFP des «atermoiements surprenant» des autorités. Surprenants? Deux clans s'affrontent. D'un côté les partisans de la Fondation, pour qui le testament d'Annette Giacometti ne saurait être remis en cause. De l'autre, les frères d'Annette - Michel et Claude Arm - qui estiment être les vrais héritiers du legs, et que soutiennent certains musées. Des héritiers qui, pour s'acquitter de leurs droits - très élevés - de succession, pourraient faire des dations d'oeuvres... au profit des musées. Mais Catherine Trautmann, elle, est favorable à la Fondation.
En juillet 1999, Roland Dumas, à la suite de rebondissements liés à la vente de 1994, passe la main à Me Hélène Da Camara, administrateur judiciaire, qui jure de régler l'affaire rondement. Trois années passent. Et voilà que Christie's France annonce, vendredi dernier, la vente de trente-huit sculptures d'Alberto, le 28 septembre à Paris. Le monstre du Loch Ness de l'Art moderne se réveille. L'Association sursaute. «Ce projet entrave les bases mêmes de la future Fondation Alberto et Annette Giacometti dont les ressources se trouveraient amputées par la sortie définitive de ces oeuvres de son patrimoine, s'émeut-elle. Une nouvelle vente d'oeuvres ayant appartenu à Annette Giacometti dont on attend la somme de 6 millions d'euros, pour assurer le règlement de certains frais, laisse supposer que les 7,6 millions d'euros existant en 1994 ont donc été dépensés et que les prochains 6 millions d'euros le seront également. Près de neuf ans après le décès d'Annette Giacometti, une somme totale de 13,72 millions d'euros pourra avoir été déboursée, sans que cette succession soit encore réglée et sans que la fondation légataire voie le jour.»
Toutes les informations d'origine AFP reproduites dans cette page (dépêches, photos, logos) sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par l'AFP. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, modifiée, rediffusée, traduite, exploitée commercialement ou réutilisée de quelque manière que ce soit sans l'accord préalable écrit de l'AFP. L'AFP ne pourra être tenue pour responsable des délais, erreurs, omissions qui ne peuvent être exclus, ni des conséquences des actions ou transactions effectuées sur la base de ces informations.
Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2002 Agence France-Presse
|